Les phares du Finistère : sources de légendes, magnificences mystérieuses, bout du vieux continent (l’autre côté, concrètement, est la Russie). Leurs histoires sont constamment du coude-à-coude pour savoir qui aura celle la plus extrémiste : forcément, c’est Ar-Men qui gagne. Emmanuel Lepage (un vrai Breton, l’évocation de la rivalité avec les Paimpolais, donc le Trégor, l’atteste) choisit d’imbriquer l’histoire de la création du phare avec une légende locale (qui donne naissance, dans certaines versions, à Quimper), le récit du quotidien des gardiens de phares au 20ème siècle, et même la tragédie d’un protagoniste. Rassurez-vous, tout est fluide ! Et que dire de cette BD, sinon que c’est un chef d’œuvre et que vous devez sauter dessus immédiatement ? Les illustrations sont lyriques, en symbiose parfaite avec le sujet : l’Enfer devient un Paradis, celui des hommes cramés de l’intérieur. On est happés dans cette atmosphère à la « Apocalypse Now » marin, halluciné devant ces conditions extrêmes mais incapable d’en revenir tout à fait et de ne pas vouloir y retourner. Le phare ne pouvait pas rêver de meilleur traitement pour raconter son histoire, ni pour donner envie d’aller le voir. Félicitations !