Arzach (1975-76)
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le 23 juin 2022
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Avec Arzach (1976), Jean Giraud (alias Moebius) nous livre une expérience de lecture unique, quelque part entre une balade méditative et un trip psychédélique. Pas de dialogues, pas de récit classique, juste des planches somptueuses où l’on suit un mystérieux cavalier ailé à travers des paysages qui semblent tout droit sortis d’un rêve fiévreux. C’est beau, c’est étrange, et parfois aussi frustrant qu’une énigme sans solution.
L’histoire, si on peut vraiment parler d’histoire, se concentre sur Arzach, un homme silencieux et stoïque qui chevauche un ptérodactyle à travers des mondes désertiques, des citadelles étranges, et des décors surréalistes. Qui est-il ? Où va-t-il ? Pourquoi ? Moebius ne daigne pas nous donner de réponses, mais c’est précisément ce mystère qui fait le charme de cet album : c’est une œuvre qui ne se raconte pas, mais qui se vit, case après case.
Visuellement, Arzach est un chef-d'œuvre. Les illustrations de Moebius, toutes réalisées en couleurs directes, sont d’une richesse incroyable. Chaque paysage regorge de détails, chaque créature semble porteuse d’une histoire que l’on ne connaîtra jamais. Les choix de couleurs, audacieux et presque hypnotiques, donnent une ambiance à la fois oppressante et envoûtante. C’est comme si Moebius avait décidé de peindre l’inconscient collectif et les rêves oubliés.
Le silence de l’album, avec son absence totale de dialogues, est à la fois sa plus grande force et son plus grand défi. D’un côté, il pousse le lecteur à s’immerger pleinement dans l’univers visuel, à interpréter chaque image selon sa propre sensibilité. De l’autre, il peut aussi laisser certains lecteurs sur le carreau, frustrés par l’absence de repères narratifs. Si vous aimez que vos BD vous prennent par la main, Arzach vous laissera probablement sur le pas de la porte.
Mais ce qui fait la grandeur de Arzach, c’est son ambiance. Moebius crée un univers qui semble à la fois étranger et familier, une sorte de rêve éveillé où le temps et l’espace n’ont plus aucune importance. Chaque planche est une invitation à la contemplation, un voyage intérieur qui ne ressemble à rien d’autre.
Cependant, l’absence de trame narrative claire peut être déconcertante, voire répétitive. Certaines séquences donnent l’impression de tourner en rond, et l’on peut regretter un léger manque de variation dans le rythme. Mais c’est un détail qui s’efface devant la puissance visuelle et la poésie brute de l’ensemble.
En résumé, Arzach est une œuvre qui défie toutes les conventions de la bande dessinée. Moebius nous offre ici une expérience artistique pure, où chaque page est un tableau, chaque scène une énigme. C’est un album à savourer lentement, comme une méditation graphique, et qui prouve que parfois, le silence peut en dire plus long que mille mots. Une balade mystique sur un ptérodactyle, ça ne se refuse pas.
Créée
le 18 déc. 2024
Critique lue 2 fois
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