Clifton perd, pour cet album, son scénariste précédent (Bob de Groot). Rodrigue a cru pouvoir assurer à la fois le scénario et le dessin, mais il est mieux aux pinceaux qu'au texte. Comme dans certains James Bond, les clins d'oeil récurrents destinés à resituer l'univers et à primer la fidélité du lecteur prennent un peu trop de place: les scènes de bouffonnerie avec Miss Partridge (travestie pour l'occasion en supporter de l'équipe du Pays de Galles), l'introduction obligée de filles court vêtues disséminées au long du récit, la contredanse infligée à Clifton par un cousin irlandais de l'agent O'Strawberry...

Ceci serait agréable si l'on conservait l'intensité dramatique des récits de de Groot. Mais là, l'intrigue est poussive, assez plate, voire tirée à la ligne. Le jeu de piste est fondé sur plusieurs reproductions du tableau d'Ingres, "Oedipe et le Sphinx". L'idée n'est pas mauvaise, mais Hergé, dans "Le secret de la Licorne", s'en tire bien mieux en montrant clairement en quoi consiste exactement la nécessité de disposer des différentes reproductions. Il y a une rupture du récit trop marquée entre les planches 35 et 36. L'astuce de Clifton pour se tirer de situations délicates présente trop de contrastes, par exemple entre les planches 28 et 34. Le gag du serveur de restaurant (planches 15 à 17) est beaucoup trop long, vraiment pas drôle, et n'apporte rien au récit. Le croquis réalisé par le prof (planche 32)n'a aucun intérêt pour l'intrigue: il ne nécessite aucun décodage capable de relancer la tension. Autant prendre une carte touristique. L'interprétation assez affligeante de l'énigme du Sphinx planches 41 et 42 n'arrange pas les choses.

Il reste un agréable voyage en Irlande, avec son rugby (pour ceux qui aiment ça), l'atmosphère chaleureuse de ses pubs, le trèfle de saint Patrick (successivement enjeu archéologique, financier, puis politique - ça fait beaucoup), l'animosité rituelle des Irlandais envers les Anglais.

Notons un hommage à Tibet, habillé en Ric Hochet, et accompagné de Dog Bull et Kid Ordinn à la planche 35.

khorsabad
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le 27 déc. 2010

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