Je vais commencer cette critique en rendant hommage à Kentarō Miura, dessinateur et scénariste du manga Berserk, qui nous as quitté le 06 mai dernier. Il fut sans aucun doute l'un des plus grands auteurs de ce siècle, et il nous as offert l'une des œuvres les plus belles et profondes de notre temps. Il restera dans l'Histoire grâce à son œuvre. Paix à son âme.
(Cette critique contient des spoilers)
Berserk est donc un manga Seinen de 41 tomes, qui malheureusement ne sera jamais fini, ayant commencé sa publication en 1989. L'histoire est composé de 5 arcs narratifs : Le Chevalier Noir, l'âge d'or, l'ère des châtiments, le faucon millénaire et enfin Fantasia (arc non terminé). Cette critique ne rendra probablement pas honneur à l’œuvre qu'est Berserk, cela ne sera pas une analyse détailles ou profonde, ni même une critique très pertinente, je vais simplement évoquer ce que ce manga m'a fait ressentir et ce qu'il représente pour moi.
Berserk c'est le genre d’œuvre qui force l'admiration. Pour moi, ce n'est pas une question d'aimer ou de ne pas aimer, Berserk EST un chef d’œuvre, au même titre que Le Seigneur des Anneaux est un chef d’œuvre incontesté de la littérature par exemple. Comme des millions de gens donc, j'ai admirer cette œuvre, j'ai été impressionné et bluffer par ce manga. Par où commencer ? Peut être par le plus évident, ce sur quoi Berserk est le plus souvent reconnu : le dessin.
Kentarō Miura est un dessinateur exceptionnel.. ses traits sont si précis, son style si détailles et pourtant si vivant. On voit tout, on ressens tout, jusqu'à la plus petite émotion dans les yeux de chaque personnage. Ce sens du détail et cette maîtrise graphique s'accompagne d'un grand sens de la mise en scène et du découpage qui font de Berserk un manga extrêmement prenant à lire. Notons que le dessin de Berserk n'a pas toujours été exceptionnel, lors des premiers tome et du premier arc "Le Chevalier Noir", ce dernier était déjà bon, mais on était loin de l'exceptionnel niveau qu'aura Miura à partir de l'âge d'or. Et même là, si l'on compare une planche de l'âge d'or à une du Tome 34 par exemple (probablement le plus beau tome de l’œuvre) l'évolution est une nouvelle fois flagrante. Dernière évolution graphique de Miura lors du dernier arc, "Fantasia" : le passage au numérique, qui rend le plus style quelque peu "surnaturel", ce qui colle parfaitement avec le lieu où se déroule cet ultime arc. Au delà de la technique pur, Miura a aussi de très bon chara-design, on peut notamment notés ceux des apôtres aux travers desquels Miura arrive toujours à se renouveler dans l'horreur et le macabre, mais on peut également évoquer les sublimes décors présent dans le manga, notamment Falconia, la cité rêvée de Griffith qui est probablement la plus belle ville qui m'est été donné de voir dans une bande dessinée. La réputation graphique de Berserk n'est donc pas démérité, mais qu'en est-il de la qualité narrative de l’œuvre ?
Là encore, Kentarō Miura prouve qu'il est un scénariste d'exception grâce à son histoire profonde et riche. L'histoire de Berserk est véritablement grandiose, elle mêle parfaitement horreur et fantaisie, humour et drame, noirceur et beauté. Le premier arc "Le Chevalier Noir" est probablement le moins bon sur cet aspect là, tout comme d'un point de vue graphique, mais il reste néanmoins bon et utile. Il permet d'introduire les éléments clé de Berserk : Guts, son épée, Puck, Griffith et les Gods Hands, les Apôtres, la Béhérit etc. Cet arc évoque également certaines des grandes thématiques de Berserk, tel que le désespoir qui peut pousser un Homme à perdre son humanité, thématique dépeinte ici à travers les apôtres et l'histoire du comte. Après cette arc viens ce qui est souvent considéré comme étant le meilleur flashback tout manga confondu : l'âge d'or. Comme beaucoup, cette arc est mon préféré. Je ne dirais pas qu'il est forcément le meilleur, mais clairement c'est celui qui nous as pour beaucoup fait devenir fan de Berserk. Cet arc débute comme une fresque d'heroic fantasy assez médiévale, on y rencontre le jeune Griffith et sa troupe de mercenaire, la Troupe du Faucon. On découvre peu à peu l'univers de Berserk à travers le Midland, on s'attache aux différents personnages, et on est totalement pris dans le récit. Tout est grandiose. Le personnage de Griffith fascine de part ses intrigues et son ascension fulgurante au sein du Midland. La scène où il parle des rêves avec la princesse Charlotte est l'une des mes préférées, c'est là qu'on voit toute la profondeur du personnage. Guts quant à lui est dépeint comme un protagoniste à la vie tragique, semée d’embûche, mais qui trouvera à travers la Troupe du Faucon un foyer, des amis, une famille, et même l'amour à travers Casca. Mais ayant entendu Griffith parler de sa définition de l'amitié, Guts comprend qu'il n'est pas ce qu'il croit être pour Griffith. Il comprend qu'il ne l'est pas encore. Guts décide de partir, mais ne pouvant pas l'accepter, Grifftih s'y oppose. L'un des plus beaux combats du monde du manga a alors lieu. Pas besoin de power-up abusif ou de dialogues introspectif ici : la grandeur et la symbolique de ce duel se suffit à lui même. Guts gagne le combat, Griffith perd pour la première fois de sa vie, et voit son compagnon s'éloigner peu à peu. Il perd pied. Et ce seul échec va à lui seul causer sa chute. La chute de Griffith est brutale, comme pour beaucoup d'Homme ayant connu une grande ascension. On trouve dans l'Histoire de nombreux cas similaire, on peut notamment penser à Jules César ou César Borgia. Des Hommes ayant eu une ascension fulgurante, mais une chute encore plus vive. Mais Griffith n'est pas comme eux. L'âge d'or se clôture par ce qui est probablement l'un des évènements les plus traumatisant de l'histoire du manga : l'éclipse. L'éclipse c'est un véritable coup de génie de la part de Miura, c'est à la limite du miracle. C'est l'une des plus grandes scènes de l'histoire. Tout y est : l'horreur, le drame, la chute de Griffith dans les ténèbres et son ascension en tant que Femto, le sacrifice et la mort de l'intégralité de la Troupe du Faucon, le viol de Casca... L'éclipse est un coup de génie. Au final, seul Guts et Casca sortiront vivant de ce tragique évènement, sauvé in extremis par le Chevalier Squelette. Guts est rongé par la haine et rêve de vengeance, tandis que Casca perd la mémoire. Viens ensuite le troisième arc, "L'ère des châtiment", qui introduit notamment les personnages d'Isidro, Farnèse et Serpico. Je ne vais pas autant détailler mon avis sur cet arc que pour l'âge d'or, mais j'ai surtout envie de souligner la fin de celui-ci que je trouve excellente. Pour moi il s'agit là du second évènement le plus choquant de Berserk après l'éclipse, et si l'éclipse n'avait pas existé on aurait clairement trouvé ça traumatisant je crois (mais vu que l'éclipse existe.. disons qu'on n'y étais préparé). C'est un véritable chaos, on a l'impression d'assister à une fin du monde, et tout cela se finit en apothéose avec le retour de Griffith. L'atmosphère qu'a réussi à créer Miura autour d'Albion est aussi une vrai réussite, on ressens toute l'oppression et la terreur qu'incarne cette tour infernale, pourtant demeure de l'inquisition sensé appliquer la loi de Dieu. Le quatrième arc "Le faucon millénaire" permet de suivre l'évolution de Guts et la constitution d'une nouvelle bande autour de lui, dans le but d'emmener Casca en lieu sûr. L'évolution de Guts lors de son cet arc est donc très intéressante : le fait d'être à nouveau entouré d'amis lui permet de se détacher peu à peu de sa haine, et de retrouver des sentiments qu'il pensait perdu. En parallèle, nous suivons la reconquête du Midland par Griffith contre les Kushans, qui se soldera par la défaite de l'Empereur et apôtre Ganishka, permettant la création de la cité rêvée de Griffith : Falconia. Ce dernier devient alors enfin roi, et commence la réalisation de son rêve. Enfin, le dernier arc malheureusement incomplet débute lorsque Guts et ses amis débarquent sur Elf Helm. Cet arc voit Casca recouvré sa mémoire. Vous l'aurez donc compris, chaque arc de Berserk est très bien construis et contribue à créer une histoire profonde et riche de sens, brassant de nombreuses thématiques et dépeignant des évènements tragiques.
Les personnages de Berserk sont également tous très bons. Guts, protagoniste du manga, est un personnage sombre et torturé, qui a bien plus souffert que la plupart des autres héros de manga. Il est tiraillé par la haine et la rancœur, et son évolution est passionnante. Son grand ennemi, anciennement ami, Griffith, est quant à lui mon personnage préférer. Il est tout simplement FASCINANT. Il fascine à la fois les lecteurs mais aussi les personnages même du manga, et au fur et à mesure de l'histoire son aura ne cesse de grandir. Casca quant à elle est très intéressante, et le passage d'Hélène est bien plus pertinent que certains le pensent. J'aime aussi beaucoup Farnèse, qui passe d'une fille de riche à la limite de la psychopathie à sorcière disciple de Schierke, autre très bon personnage. Isma, Isidro et Puck permettent quant à eu d'amener plus de légerté au manga. Enfin, je trouve les apôtres très bon, les plus développés ayant souvent une histoire tragique qui les rendent finalement très humains.
Berserk est une œuvre au ton souvent noir et sombre, cependant, cela serait amoindrir la diversité de l’œuvre que de la réduire à cela. Certes, Berserk nous montre la pire facette du monde : la guerre, les viols, les meurtres, les massacres etc., certes Berserk nous choque et nous traumatise à travers des évènements tel que l’éclipse, certes Berserk est un histoire profondément tragique, mais Berserk c'est aussi un monde qui peut être beau et lumineux, comme on le voit à Elf Helm, Berserk c'est aussi de l'humour et de la légerté par instant, Berserk c'est aussi l'amitié, la chaleur humaine, la camaraderie, dépeinte à travers la troupe du faucon puis par la troupe de Guts. Au final, plus le manga avançait, plus l'ombre faisait place à la lumière. Cependant, le manga restant inachevé, nous ne pourrons jamais savoir si l'auteur voulait continuer dans cette voie, où si la lumière allait à nouveau faire face à l'obscurité dans la suite de l'intrigue.
Berserk est un œuvre inachevé, et c'est probablement l'une des seules choses qui lui manque pour être une œuvre parfaite. Berserk est un chef d’œuvre, un manga qui frôle la perfection, probablement le meilleur manga que j'ai pu lire (bien qu'il ne soit pas mon préférer). C'est une grande histoire, illustrer par de grands dessins. Lisez Berserk, laissez vous portez par le génie de Kentarō Miura, et découvrez l'un des plus grands manga de l'histoire.
Cette critique est dédiée à Kentarō Miura. Merci pour tout Maître Miura, votre œuvre restera dans l'Histoire, et vous avec.
« J'ai rêvé que les nuits de pleine Lune, j'étais un enfant, et ressentais une chaleur familière. Mais, en me réveillant, il ne reste qu'un vague sentiment de nostalgie... qui va lui aussi disparaître avec une simple larme, comme la rosée du matin. » - Griffith