Terreur et angoisses à Lovecraft!
Et bien voilà, sur des conseils avisés de fans de la série, à mon tour je suis allé faire une petite promenade à Lovecraft, charmante petite ville au bord de l’eau, allant même jusqu’à pousser les intrigantes portes de la demeure de Keyhouse. Enorme bâtisse nous renvoyant aux grandes maisons terrifiantes des meilleurs films d’horreur. En route pour un voyage de l’étrange des plus passionnants.
Rendell Locke a toujours donné beaucoup d'importance à son rôle de conseiller d'orientation. Or, un jour, il est brutalement assassiné par Sam Lesser, un de ses anciens élèves. Le lycéen incarcéré, sa famille décide de quitter leur foyer pour habiter une propriété familiale, Keyhouse, dans la ville de Lovecraft où réside déjà Duncan, le frère du défunt. Les trois enfants réagissent de façons différentes à la perte de leur père. L'ainé Tyler se renferme sur lui-même, Kinsey a peur en permanence, tandis que Bode, le petit dernier, se réfugie dans son monde et ne cesse de jouer. C'est d'ailleurs en fouinant partout qu'il finit par trouver une clé étrange, qui ouvre une seule porte. L’esprit de celui qui en traverse l'ouverture se détache de son corps et peut ainsi se balader où bon lui semble. Le petit garçon raconte cela à sa famille, mais ces derniers ne le prennent pas au sérieux. Cependant, peu après, Bode entend une voix l'appeler, qui provient du fond d'un puits. Au même instant, ou presque, Sam réussit à s'enfuir avec la ferme intention de retrouver les membres survivants de la famille Locke…
Difficile de résumer en quelques lignes ce qu’il se passe tout au long des 6 chapitres formant ce premier tome de Locke and Key. Difficile tant il se passe de choses au cours de notre lecture ! Joe Hill ne peut par contre en aucun cas renier son père, Stephen King, tant l’on retrouve de sa patte dans cet œuvre. La relation conflictuelle père/fils pour la partie autobiographique, et sa facilité à introduire le fantastique ou bien l’horreur dans la vie banale d’une famille encore plus banale. Et que dire de cette ambiance qui règne à Lovecraft, tellement bien écrite par Joe Hill et dépeinte par Gabriel Rodriguez.
Nous avons 3 personnages centraux. Tyler, ainé de la famille, qui aimerait se détacher un peu de cette famille et voler de ses propres ailes. Et dans l’emportement va prononcer des paroles qui vont le hanter pendant très longtemps à mon avis. Et qui, malgré lui, va devoir prendre le rôle paternel laissé vacant. Kinsey, la cadette, qui, après avoir sauvé son petit frère va tout faire pour passer inaperçu, elle qui était tellement exubérante, et va se battre contre sa propre peur. Et enfin, le petit Bode qui va se réfugier dans son petit monde à lui. Et là, le fantastique arrive, car ce petit monde à lui s’avère en fait bien réel !
Autour d’eux vont graviter d’autres personnages, une mère alcoolique qui abandonne peu à peu son rôle maternelle, un oncle mou du bulbe, un assassin complètement barré et une personne mystérieuse et angoissante au fond d’un puits.
On comprend très vite au fil de la lecture que le titre de cette série n’est pas anodin. Elles sont au cœur de tout ! Un assassin complètement fou tue pour elles, une personne au fond du puits attend après elles depuis on ne sait combien de temps, elles ont presque le rôle de décideuses de vie ou de mort tellement elles sont importantes. Et il est plaisant de voir qu’elles sont si soigneusement travaillées par Gabriel Rodriguez. Elles sont magnifiques. La premier clé trouvée l’est par le petit Bode, et elle lui permet, une fois la porte associée trouvée, de se dématérialiser de son corps. Pouvoir assez intéressant, il faut bien l’avouer^^
De plus, on apprend qu’elles ont toutes des pouvoirs différents. On sent que cela va être passionnant.
Ensuite, un petit mot sur le dessinateur. Gabriel Rodriguez. Quelle belle rencontre que la sienne avec Joe Hill. Les deux hommes s’accordent à merveille. Le style fantastique de Rodriguez collant parfaitement à cette ambiance d’angoisse et de terreur qu’installe Joe Hill par moment. Il abuse de grandes cases sur la même page ou d’énormes panoramiques de paysage pour ralentir notre rythme de lecture et ainsi rendre la violence, l’angoisse de certaines scènes encore plus dures pour nos petits cœurs qui s’emballent alors à 100 à l’heure. On se sent vraiment oppressé par moment.
Son autre gros point fort, les yeux de ses personnages, il arrive à faire passer tellement de choses à travers eux. L’innocence chez Bode, la culpabilité chez Tyler, la peur chez Kinsy, l’incapacité chez la maman, l’angoisse et le mystère dans les yeux de la personne au fond du puits. C’est criant de réalisme. Mais le mieux restant les yeux de Sam, le tueur. C’est presque angoissant par moment de voir ses yeux vides et sereins alors qu’il est recouvert de sang en plein meurtre. Presque malsain. Et dire qu’il n’est peut-être pas la plus grande menace…
Bref, une bien belle découverte que cette maison Keyhouse à Lovecraft. On a tous les éléments d’un récit de terreur, de l’angoisse, un tueur fou, une famille fragile psychologiquement, une personne dans l’ombre, une demeure mystérieuse et un rien de fantastique. Le talent de Rodriguez pour ralentir le rythme et rendre le tout encore plus oppressant fait du récit de Joe Hill absolument passionnant. On vibre avec cette famille en deuil qui lutte contre ses peurs, fait avec ses doutes et qui se retrouve face à des forces mystérieuses. Hâte de découvrir la suite.