Sur la route de la Californie, un cow-boy âgé, Edmund Fisher, abat trois tueurs, qui viennent d’assassiner un père et son fils. Seule une jeune fille a survécu. Les malfrats n’étaient pas seuls, le reste de la bande accoure. Edmund et le gamine se réfugient dans une ruine.
Tout à la fois réaliste et expressionniste, le dessin de Tiburce Oger peut ne pas plaire. Très précis, il illustre parfaitement les sentiments de ses personnages. Les cadrages sont variés et judicieusement choisis.
Le scénario ne brille guère par son originalité ; dans l’attente de l’assaut et pour lutter contre le sommeil, Fisher conte sa longue vie ; mais par sa cruauté. Son existence ne fut que plaies, bosses et fureur. L’Ouest est un monde impitoyable, livré à la loi du plus fort. Edmund a vécu par et pour son fusil. Ses rares périodes de paix ont tôt fait de basculer dans la tragédie. Il a tué hommes et bêtes sous l’uniforme, puis à son « propre compte », enfin sous les ordres d’un jeune patron, le flamboyant marquis de Morès.
Ce brillant second lui vole la vedette. Antoine-Amédée-Marie-Vincent Manca-Amat de Vallombrosa (1858-1896), marquis de Morès et de Montemaggiore, est un authentique aristocrate français, furieusement antisémite et d’origine sarde, qui méritait le premier rôle. Aventurier à la gâchette facile, Morès multiplia les duels et les accusations de meurtres. Il dissipa sa fortune dans l’édification de sa propre ville, Medora (Dakota du Nord), du nom de son épouse. Infatigable, il se lança dans l’élevage de bovins, finança ses propres abattoirs et une compagnie de diligences. Il ligua contre lui les barons de la viande, les éleveurs concurrents et les banquiers juifs. Ruiné, il rentra en France pour se jeter dans la Ligue nationale antisémitique de France d’Édouard Drumont, avant de trouver la mort en Tunisie, alors qu’il tentait de soulever des tribus arabes comme l’ennemi anglais. Souvenez-vous de Fachoda !
Novembre 2017