Dans Chainsaw Man, Tatsuki Fujimoto nous plonge tête la première — ou plutôt tronçonneuse la première — dans un univers où le grotesque côtoie le poignant et où chaque page semble hurler : "On va tout casser !" Entre démons déjantés, bastons épiques, et humour noir, l’histoire de Denji, jeune homme fauché devenu démon à tronçonneuses, est une montagne russe qui ne s’arrête jamais vraiment pour souffler.
L’intrigue débute sur les chapeaux de roue : Denji, un garçon sans le sou qui vend ses organes pour survivre, fusionne avec son chien-démon Pochita et devient Chainsaw Man. Une transformation qui lui vaut de se retrouver au cœur d’une guerre contre des démons menaçant l’humanité. Ce qui pourrait n’être qu’un énième shōnen de baston se distingue par son ton furieusement irrévérencieux et son héros à l’ambition terre-à-terre (il rêve surtout de manger à sa faim et, euh… toucher des seins). Un mélange explosif entre absurdité et humanité qui fonctionne, même si certains passages semblent un peu trop se complaire dans leur propre chaos.
Graphiquement, Fujimoto met la gomme. Les scènes d’action sont frénétiques, bourrées de détails et de bruit visuel qui donnent parfois l’impression d’être pris dans un vortex de tronçonneuses et d’hémoglobine. Mais cette intensité peut aussi fatiguer : il faut parfois relire les pages pour comprendre qui découpe quoi (ou qui). Les moments plus calmes, rares mais efficaces, offrent un contraste bienvenu, mettant en valeur les vulnérabilités de Denji et des autres personnages.
Côté personnages, Denji est à la fois pathétique et attachant, oscillant entre l’instinct primal et une quête désespérée de sens. Makima, Aki, et Power, ses alliés improbables, apportent chacun leur grain de sel (et de folie), même si certains arcs narratifs semblent les survoler sans leur donner la profondeur qu’ils méritent. Mais après tout, avec une tronçonneuse à la place du visage, qui a besoin de subtilité ?
Le principal bémol de Chainsaw Man réside dans son rythme parfois erratique. Fujimoto passe d’un délire sanglant à une réflexion existentielle sans prévenir, ce qui peut désarçonner. Le scénario semble parfois se perdre dans ses propres méandres, comme un moteur qui cale avant de repartir à fond les ballons.
En résumé, Chainsaw Man est un manga qui fonce tête baissée dans le chaos, oscillant entre humour absurde, violence démesurée et moments d’émotion sincère. Un trip sous adrénaline qui décoiffe, même si ça manque parfois de direction.