Jean Dufaux est un des scénaristiques les plus productifs du neuvième art français. Cela fait maintenant des dizaines d’années que son imagination fait naître des histoires souvent teintées d’aventure. Je suis loin d’avoir lu l’intégralité de son œuvre mais j’ai néanmoins pris le temps de découvrir certaines de ses productions telles que « Murena », « Saga Valta », « Barracuda » ou « Djinn ». La qualité est bien souvent de sortie et le dépaysement souvent agréable. C’était donc avec curiosité et confiance que j’étais partie à la découverte de la série « Conquistador ».
Cette série est née de la collaboration de l’écrivain avec le dessinateur Philippe Xavier dont je découvre le travail ici. Cette série nous fait voyager en Amérique du Sud au seizième siècle. Les espagnols ont des vues sur le mythique trésor de l’empereur Moctezuma. Evidemment, les ambitions de chacun ne vont toutes avoir une issue rêvée. Actuellement, cette histoire se compose de quatre tomes. Ma critique d’aujourd’hui porte sur le dernier en date sobrement intitulé « Livre IV ».
Avant d’évoquer plus précisément l’histoire et ses personnages, je voudrais commencer par parler du bel argument de cette série : son univers. Le dépaysement est absolu et envoutant. Les civilisations d’Amérique du Sud ont toujours eu un côté fascinant et cette série met cet aspect particulièrement en valeur. Ce quatrième tome s’inscrit dans cette lignée. Les pérégrinations des héros dans une forêt vierge hostile sont oppressantes. Les scènes dans ces cités majestueuses sont superbes. La dimension magique et fantastique qui accompagne ces peuples amplifie évidemment cette atmosphère ensorcelante.
La trame se centre essentiellement autour du personnage d’Hernando Royo. Avec un petit groupe, il est missionné pour mettre la main sur le trésor. Evidemment, rien ne se passe tout à fait comme prévu et c’est un véritable voyage mystique que vivre ce beau brun ténébreux. Son corps devient le support d’expression d’une divinité locale particulièrement dangereuse. Cet album confirme la place prise par Hernando et l’emprise qu’il semble avoir sur les tribus autochtones. Néanmoins, cette transformation n’est pas un long fleuve tranquille. Son évolution et ses questionnements, bien que sans réelles surprises, intriguent.
Mais Hernando n’est pas le seul personnage à occuper l’espace dans cette aventure. Les autres membres de son groupe sont tout aussi intéressants. Certains ont péri dans les albums précédents. Les survivants sont bien écrits. Le plus charismatique prend les traits d’une femme au caractère bien trempé. Je me suis tout de suite inquiété de son devenir. Par contre, les autorités espagnoles d’un côté et les autochtones de l’autres, ils restent en retrait malgré leur apport indispensable à au déroulement de l’intrigue.
L’intrigue est plutôt bien construite. Elle ne souffre d’aucun temps mort. Dans ce quatrième tome, la l’heure n’est plus à la découverte des lieux et des personnes. Cet espace sauvage et hostile nous a été présenté précédemment et nous pouvons maintenant le savourer en toute connaissance de cause. L’heure est à la préparation de la guerre. Les projets de chaque communauté mènent à l’affrontement avec les autres. L’histoire voit donc se mettre en place de grandes batailles dont les enjeux sont la survie, la cupidité et le pouvoir. Nous avons également le plaisir de voir les héros se retrouver avec une longue période de séparation. Le devenir des personnages enrichit la curiosité générée par l’issue de ce conflit pour le trésor. Sans être original ou innovant, le scénario est solide et se laisse découvrir avec plaisir.
Les dessins de Philippe Xavier sont indispensables à la réussite de l’ensemble. Les territoires sauvages de cette forêt doivent être bien construits pour dégager cette atmosphère oppressante. C’est ici le cas. On a aucun mal à se sentir perdu et inquiet dans cette végétation dense et hostile. Il s’agit vraiment de la plus grande réussite de cet album. Le travail sur la nuit, la pluie par les couleurs est également le fruit d’un beau travail. Concernant les personnages, le trait est prévis mais classique. On n’a aucun mal à identifier chaque protagoniste. Par contre, ils ne sont pas tous pourvus de la même puissance dans l’apparence graphique.
Pour conclure, ce quatrième tome s’inscrit parfaitement dans la continuité des trois précédents. Il se lit avec plaisir et je n’ai eu aucun mal à m’immerger dans le destin de tous ces personnages avalés par cette civilisation qu’ils ont voulu voler. Je pense que la conclusion de ce cycle offre un ensemble cohérent qui conviendra parfaitement aux adeptes d’aventure teintée de fantastique…
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