Coronado
6.5
Coronado

BD de Dennis Lehane et Loustal (2009)

Roman noir et dessins en couleurs

Le volume que j'ai en mains ne contient pas les récits évoqués dans le résumé, mais uniquement "Coronado" - "Adapté de la nouvelle "Avant Gwen" de Dennis Lehane par Jacques de Loustal."

L'histoire est celle d'une jeune qui sort de prison après avoir purgé sa peine, et que son père vient chercher, en cherchant à lui faire plaisir pour l'amener à révéler où il a planqué le butin d'un vol. Là-dessus se greffe une histoire de femme, Gwen, celle que le jeune a laissé derrière lui quand il s'est fait arrêter.

C'est du roman noir, donc l'histoire est assez sombre, avec son pesant de cruautés et de cynisme. Lisez-la si vous êtes accro du genre, sinon vous ne perdez pas grand chose. Le profil général de l'intrigue est assez attendu, et le suspense est moyen-moyen.

J'ai apprécié le réalisme des dialogues, empreints de cette pauvreté d'expression qui est bien celle que l'on utilise entre copains, avec ce qu'il faut d'expressions familières, mais pas plus.

Amusante, l'idée du père qui fait cadeau à son fils d'une pute à sa sortie de prison. Ca aussi, c'est du réalisme : le mec a des besoins accumulés à satisfaire. Le plus marrant dans l'histoire, c'est que la pute en question est férue d'écriture de scénarios de films, et raconte ses pulsions littéraires au jeune au moment précis où on attend d'elle que sa bouche fasse un autre office...

Intéressante, la montée de la tension entre le père et le fils, qui doit atteindre son maximum à la fin. Les flash-back en noir et blanc, destinés à révéler comment le jeune s'est retrouvé en prison, semblent bizarrement situés : ils coupent le récit à des moments qui ne font pas tellement sens.

Le principal intérêt, c'est l'adaptation de Loustal. Ses dessins, en couleurs directes, sont ceux d'un illustrateur de romans, mais assez peu ceux d'un auteur de bandes dessinées. Son art, c'est deux images par page, parfois une. Donc, déjà, la mise en page ne lui donne pas trop de migraines... Les ombres en dégradés bruns plutôt que noirs, la préférence pour les nuances de l'orangé sur les visages et la peau, l'association savante des traits nettement dessinés suggérant plis et rides, et des plages de chair évoluant du rouge vif au rose-orangé, tout ceci crée une atmosphère unique.

Les décors sont souvent minimaux, évoquant parfois la nudité étrange et silencieuse des tableaux de Chirico ou d'Edward Hopper; des bleus tendres, des roses ou des violets francs confèrent au dessin une sorte de naïveté chromatique. En revanche, Loustal ne rend absolument pas l'impression du mouvement : tout paraît raide et figé, même en pleine course, même dans les bagarres.

A lire surtout pour Loustal, parce que l'intrigue, hein...
khorsabad
6
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le 9 oct. 2012

Critique lue 281 fois

3 j'aime

khorsabad

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