Enorme déception... Moi qui suis un fan absolu du personnage, j'attendais ce livre avec impatience, d'autant que Alfred, le dessinateur, est un cador et que le scénariste est loin d'être un manchot...
Je ne savais pas trop à quoi m'attendre : biopic ou oeuvres illustrées, c'est encore une troisième voie qui a été choisie, à savoir l'histoire de l'album récemment sorti, les chansons de l'innocence retrouvée, un album absolument excellent.
Alors pourquoi pas ?
Après tout, un album, c'est une aventure, ce sont des rencontres, des choses qu'on ne soupçonne pas, des coulisses à découvrir... Il n'y a qu'à voir la couverture de l'album avec le bel Etienne et une actrice de charme à l'opulente poitrine découverte, rien que cette image donne envie de découvrir l'histoire qui se cache derrière ce cliché. Heureusement, cette histoire là, on l'aura. Mais au lieu de la lire comme elle s'est passée, on devra lire le témoignage du photographe qui raconte comme ça s'est passé. Tout une séquence sensée se passé à Ibiza deviendra un plan fixe sur fond blanc d'un personnage qui bouge la tête à droite et à gauche.
Hélas... ça va être comme ça pour tout l'album.
La narration est tellement poussive que la lecture en devient pénible.
On ouvre sur un monologue de l'artiste sur fond de ville en mouvement, on se dit "oui bon ok, allez, pour une ouverture, tenter un truc" et puis... et puis en fait, tout l'album consiste à mettre des monologues en page, le pire étant les nombreux (trop nombreux) témoignages de proches du chanteurs, de collaborateurs, qui viennent témoigner.
Le dessinateur fait des pieds et des mains pour tenter de varier les positions du protagoniste, mais comme il a choisit des effet minimaux, ça reste limité et, finalement, on se retrouve à lire des blocs de texte, moins digestes encore que ceux d'un album de Black et Mortimer.
Témoignage / Monologue / témoignage / Monologue...
Quand, par chance, on a un échange, on devine vite que cet échange a été créé pour l'occasion par les auteurs qui ont dû quand même se douter qu'on aller se faire chier à un moment.
Même le dessin virtuose d'Alfred ne parvient pas à sauver de l'ennui ce livre, qui aurait pu être si bien, si, au lieu de faire parler Daho à la première personne, et témoigner ses proches, on avait choisit par exemple, une narration extérieur, sans regard-lecteur... Ou, tout du moins, si on avait varié un peu les plaisirs.
Quant au fond... Ma foi, au delà du name dropping de technicien et de lieux, on ne retient rien, on apprend peu... Peut être dans le milieu musical, ça parlera à une poignée d'afficionados. On aurait adorer savourer une ou deux anecdotes sur les albums passés, un regard sur la carrière... Non. On aura des références de loin en loin, des comparaisons. Mais rien de plus. Le fan connait les albums et les titres, certes, mais il est loin de connaitre ce qui se cache derrière, du coup... personne n'apprend rien : ni le fan qui reconnait juste un titre, ni le profane, qui lui reçoit dans le visage 150 titres sans rien de plus.
Bref, ça ne donne pas envie. Alors que merde : c'est Daho !
Le graphisme d'Alfred, qui donne des choses assez belles lors des pages réellement dessinées devient poussif dans les pages esquissées avec un trait minimal. Quand on se contente d'une seule ligne de couleur pour un visage et une main, le dessin doit être parfait, et là, c'est hélas rarement le cas. Le dessinateur s'ennuie à redessiner dix ou douze fois par témoignage le même personnage. Du coup, certains dessins sont mous, certaines poses sont posées... les mains deviennent minuscules par rapport à la tête, faute d'être rattachée au corps.
Bien sûr, graphiquement, ça fonctionne superficiellement, mais, dès qu'on rentre dans le détail, ça pêche. Et toujours ces doubles pages blanches, blindées de textes qui ne font pas envies...
L'amoureux du dessin d'Alfred ira plutôt chercher celui-ci dans le très beau recueil Italiques parus chez le même éditeur.
Le personnage même d'Etienne Daho, idéalisé, devient une sorte de marionette inexpressive, qui ferme les yeux trois occurences sur quatre, à croire que Daho est aveugle et se dirige par la force d'un sens Dardevillien.
L'Album se termine sur un monologue, encore un, un peu pédant d'un personnage qui ne nous aura finalement jamais ému à force d'être dans le constat narratif et la distance.
"Il n'est pas de hasard, il est des rendez-vous" chante Etienne.
Rendez-vous manqué avec la bande dessinée.