Ce tome contient les épisodes 11 à 15, initialement parus en 2014, écrits par Joshua Williamson, dessinés et encrés par Goran Sudzuka (épisode 11) et Davide Gianfelice (épisodes 12 à 15), avec une mise en couleurs de Miroslav Mvra. Les couvertures des épisodes ont été dessinées par Dan Panosian, la couverture du recueil par Matteo Scalera.


Épisode 11 - Il y a quelques années de cela en arrière, une femme s'apprête à assassiner un individu lors d'une fête, avec un fusil à lunette. Tout ne se passe pas comme prévu. Puis l'employeur d'Anderson Lake lui confie une autre mission : infiltrer un gang de rednecks qui réalisent un trafic illégal à partir d'un état du Sud. Elle est prise de court quand elle découvre la nature de la marchandise.


Épisodes 12 à 15 - Dans plusieurs villes des États-Unis des personnes sont hantées par un proche ou un individu qui s'est récemment suicidé. Jackson Winters est à nouveau à la merci d'une tierce personne, il s'agit cette fois-ci de l'agent Creed du FBI. Ce dernier lui demande de retrouver Damian Charon (que Winters identifie immédiatement comme étant Danny, le fils de Robby Trick, voir tome précédent), un individu se trouvant trop souvent à proximité de personnes hantées par la suite. Jackson Winters est une nouvelle fois contraint de coopérer, emmenant avec lui Nina Bloodcrow et Oliver King.


Le premier tome de la série avait laissé une bonne impression, pour un suspense bien géré, et une utilisation d'esprits surnaturels intéressante. Le deuxième tome était plus convenu, à la fois pour la mission impossible, et pour la manifestation des fantômes. Néanmoins la situation de Jackson Winters fait que le lecteur ressent encore une pointe de curiosité pour savoir ce qui lui pend au nez. Effectivement, Joshua Williamson continue de développer la continuité interne de la série, avec le retour d'Oliver King (tome 1), celui de Nina Bloodcrow (tome 2), ou la réapparition de l'étrange sorcière aperçue dans la scène d'ouverture du tome 2. Il consacre le premier épisode à l'histoire personnelle d'Anderson Lake, un personnage à la participation décalée que le lecteur croyait avoir cerné. Il découvre que le scénariste ne manque pas d'ironie dans sa description. Alors qu'elle évoque ses qualifications professionnelles et son inclination personnelle, elle ironise sur le fait qu'une belle femme blonde comme elle, née dans une bonne famille, avait tout pour elle, tout pour devenir une citoyenne exemplaire et épanouie.


Williamson intègre une remarque ou deux, bien senties sur la condition humaine. Il met en scène une horreur très concrète qui est celle des individus harcelés par d'autre. Le fantôme d'un suicidé devient alors un voyeur accablant le vivant de sa présence, continuant de le harceler, comme s'il s'agissait de la présence du vivant pesant sur l'inconscient de la victime. Il bâtit son intrigue sur le trafic illégal d'une sorte d'objet (des bougies d'un genre très particulier) possédant un fort potentiel, donc attirant la convoitise d'individus aux intentions discutables, et aux méthodes encore plus discutables. Il y ajoute les combines d'un magicien aux intentions tout aussi répréhensibles, en reprenant l'objectif de Markus Schrecken (voir le premier tome) consolidant la logique de la série. Enfin, il reprend le mystère de la pièce blanche présente dans le premier tome.


Le lecteur apprécie de découvrir une nouvelle mission impossible (capturer Danny Trick / Damian Charon), tout en voyant le scénariste consolider la mythologie interne de la série. Les personnages restent essentiellement des ressorts narratifs sans grande personnalité propre. Jackson Winters continue de clamer qu'il aimerait bien en finir avec la vie, tout en faisant tout pour rester en vie, avec un instinct de survie des plus efficace. Nina Bloodcrow reste une jeune femme avec la tête sur les épaules et très autonome, mais sans bénéficier d'un développement de sa personnalité, ni même un rappel de sa psychologie telle qu'elle avait été établie dans le tome précédent. Oliver King sert de faire-valoir aux réparties de Winters. L'agent Creed n'est là que pour délivrer des informations et agacer Winters. Le scénariste se repose sur les clichés relatifs aux membres d'un gang de bikers sudistes, l'un des personnages les qualifiant même de rebuts de la série Sons of Anarchy. L'apparence de Damian Charon est très réussie, mais lui aussi n'est qu'un pion narratif, sans grande épaisseur psychologique.


L'intrigue est menée tambour battant, avec une gestion plus réussie des esprits surnaturels que dans le tome précédent. Goran Sudzuka (dessinateur des épisodes 1 à 5) revient le temps d'un épisode, celui consacré à Anderson Lake. Ses pages présentent toujours la même propension à s'économiser sur les décors quand la nature de la scène le permet (absence d'arrière-plan, ou vagues marques de texture, charge à Mirslav Mvra d'habiller ces surfaces avec des textures ou des camaïeux). Le lecteur regrette d'autant plus cette propension que lorsque l'artiste représente les décors, ceux-ci sont convaincants, détaillés et crédibles, qu'il s'agisse de la pelouse de la grande villa, de la salle enfumée d'un bar, ou d'un atelier de mécanique de belle taille. Sudzuka représente les personnages et les situations de manière très prosaïque et très premier degré, ce qui donne un impact inattendu aux comportements des personnages. Le lecteur sourit avec une pointe de sadisme devant Anderson Lake flanquant un coup de boule à un biker, ou lorsqu'elle abat froidement une personne de son école supérieure. Ce parti pris très concret lui permet d'éviter le ridicule, même quand il doit représenter un sacrifice dans les bois, une scène des plus clichés.


Les 4 épisodes suivants marquent le retour de Davide Gianfelice, le dessinateur du tome précédent, pas très convaincant. Fort heureusement, Joshua Williamson lui a évité un retour dans la jungle (avec les arbres interchangeables, en plastique). De son côté, l'artiste s'est plus investi dans la représentation des décors et des environnements, et le lecteur en profite pleinement. Cela commence par une façade newyorkaise à l'architecture convaincante. Cela continue avec une vue extérieure d'une église tout aussi bien représentée. La vue de l'intérieur est à couper le souffle, à la fois par la surprise qu'elle constitue, mais aussi par la capacité du dessinateur à transcrire son volume. La vue de dehors de l'asile montre une belle grille en fer forgé.


Davide Gianfelice représente des lieux palpables, légèrement simplifiés tout en restant bien détaillés. Au sein de ces environnements, évoluent des personnages très vivants. L'artiste trace les contours par le biais de traits à l'épaisseur variable, parfois repassés par endroit, pas toujours jointifs. Cela donne une impression de dessin réalisé sur le vif, mais pas bâclés. Les visages présentent la même apparence rapidement dessinée, avec un bon niveau d'expressivité, ce qui les rend eux aussi très vivants. En ajoutant quelques petits traits non signifiants, Gianfelice fait ressortir les marques du temps sur ces visages. Il donne une apparence très haute en couleurs à Damian Charon donnant l'impression au lecteur de pouvoir ressentir son entrain et son bagout. Les spectres sont toujours dessinés à gros trait, mais cette fois-ci, il a réussi à déplacer le curseur pour qu'ils apparaissent moins ridicules et plus menaçants.


Du fait de ces améliorations, la narration visuelle devient plus convaincante, car plus premier degré que dans le tome précédent, et plus détaillée. Le lecteur peut croire dans la consistance des lieux, dans le comportement des personnages, et dans la dangerosité des manifestations surnaturelles. Alors que la mission impossible de Jackson Winters emprunte des voies déjà utilisées dans les tomes précédents, le degré de divertissement reste satisfaisant grâce à l'investissement plus important du dessinateur.


Un peu déçu par le tome précédent, le lecteur entame celui-ci en se disant qu'il arrêtera là dans cette série qui semblait prometteuse. Il éprouve un plaisir certains à retrouver la mythologie interne de l'histoire et à constater que Joshua Williamson ne fait pas traîner les choses en longueur. Le lien de la sorcière avec l'histoire est dévoilé, certains personnages secondaires effectuent un retour confortant le lecteur dans le temps qu'il a passé à apprendre à les connaître. L'intrigue réutilise des cas de possession, mais avec un nouveau personnage très réussi (Damian Charon). Le cas particulier de Jackson Winters continue de révéler sa saveur. Le premier épisode consacré à Anderson Lake s'avère enlevé et très sarcastique. Il ne reste plus à Joshua Williamson qu'à étoffer ses personnages en leur donnant un peu plus de personnalité, et au dessinateur à donner un peu plus de noirceur à ses cases pour que cette série acquiert plus d'étoiles.

Presence
8
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le 27 juin 2020

Critique lue 20 fois

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