Miss Bell tombe amoureuse. Il s’appelle Mark, il est jeune, fringuant, sportif. Elle est veuve, pleine aux as et se sent revivre. Pourtant miss Bell est morte. Cette amourette n’est qu’un fantasme, le dernier souffle de sa conscience. Derrière cet écran de fumée se cache un toubib allumé, sorte de réanimateur façon Lovecraft. Son fonds de commerce clandestin : s’immiscer dans le dernier souvenir d’un défunt pour l’empêcher de traverser le Styx grâce à une machine expérimentale, le Charon. Mais chez Dash Shaw, la résurrection n’est pas une sinécure. Trahis par leurs perceptions, les vivants-morts étouffent et sont vite incapables de distinguer le réel de l’imaginaire. Remarqué pour Bottomless Belly Button, le jeune Américain décline sa SF façon Philip K. Ubik. Le ton est sombre, le fond coloré : son dessin en noir et blanc suffocant, sans gouttière, se déployant sur des pages jaunes, vertes, rouges. Parcouru d’images totems qui jouent sur la persistance rétinienne, Doctors réussi à titiller le cerveau sans le vriller.