C'est une saga de Bd qui s'est voulue entre la Dark Fantasy et la Sword and Sorcery. Elle a malheureusement fini dans sa longue agonie en Light Fantasy. Les premiers tomes sont les premiers tests de Olivier Ledroit dans le monde de la Bd, on y retrouve toute l'ambiance de la Dark Fantasy qui caractérisera plus tard Requiem, Chevalier Vampire. Par la suite, on pourrait s'attendre à une baisse de qualité dans la dessin mais elle n'y est pas vraiment (en tout cas pas après le tome 14 où on change totalement de style). Ce qui change, c'est le nombre de double pages époustouflant qui va en constante augmentation tout le long de la saga. Pour le scénario, François Froideval nous offre une histoire des plus classiques, mais avec un côté Dark Fantasy dans le style Elric franchement plutôt sympathique mais qui n'a rien de novateur.
Wismerhill, notre cher protagoniste va subir une montée en puissance tout le long du récit. De simple soldat à maître d'un nouveau monde. La moralité courante n'encombre pas le récit: le héros et ses camarades volent, dépouillent et tuent des gens qui ne leur ont rien fait. Le scénario reste très jeu de rôle, et pour les personnages, on le voit bien. Les personnages principaux ne sont que Wismerhill et Haazhel Thorn au final, le reste se limite à ceci. Le chef de guerre demi-ogre horghor Bey ne sert guère qu'à jouer son Obélix, borné et bâfreur. La succube fait des infidélités à Wismerhill, car elle a trop envie de vampiriser la vitalité d'un désespéré. Fratus ressemble à un Judas de la lumière incompétent, l'Empereur de Lynn reste dans son rôle d'empereur las du pouvoir. L’elfe roublard et malicieux Pile-ou-Face, et j'en passe encore. L'évolution se fait à la manière d'un jdr, c'est pourquoi on peux facilement parler de grosbillisme. Apres pour ma part, je ne le voie pas forcément comme un défaut.
Le scénario ne mène qu'a deux immenses batailles (et même je pense que le mot colossal ne serait pas de trop). La danse écarlate, formule bien poétique pour une boucherie sans nom. Ça tabasse non stop du début à la fin dans ce volume grandiose et démesuré où une bataille épique occupe à elle seule la moitié des pages. L’Aigle foudroyé, avec la deuxième bataille qui occupe les trois quarts du volume. Épique et homérique à souhait, plein de mouvements tactiques tout en tension, les affrontements se font beaucoup avec des doubles pages magistrale graphiquement. Si j'aime cette saga, c'est bien pour cette dimension gothique et noire et à l’échelle qui pulvérise des records. Mais à part sa...
Les thématiques anti-religieuses sont plutôt mal amenées, l'ambiance sombre et manichéenne ne va tout simplement pas avec l'humour potache. La quête d'identité puis de recherche de puissance se mêlent avec les intrigues politiques, cependant tout cela reste bien simpliste. On voyage dans ce monde noir, on tape tout ce qui bouge et on revient avec plus de puissance. Certaines révélations se voit arriver à des centaines kilomètres. Les deux seuls vrais rebondissements se font après ces deux batailles, on ne ressent pas réellement de tension pour les personnages mais plutôt de l’émerveillement sur les décors. On sait déjà comment tout va se terminer si on réfléchit un peu. Les camarades de notre cher protagoniste ne sont jamais développés, leurs morts ne nous font rien au final. Le côté dramatique voulu vers la fin ne vient jamais. A force de doubles pages, on finit par se demander si on est dans une bd ou un album graphique.
On pourrait parler de tous les éléments qui ne sont pas ou mal utilisés. Une énumération? Methraton, utilisé comme simple deus ex machina, un comble pour une entité qui hait les dieux. Les princes du néant qui ne servent à rien. La dimension mystico-religieuse de l’affrontement entre Lumières et Ténèbres est sa désillusion est mal amenée. Les aventures parallèles de Parsifal sont pratiquement inutile, idem pour l'arc mort vivant... On aurait pu raccourcir la saga d'au moins un ou deux tomes. Et puis vint le final, au début on aurait du s’arrêter au tomes 10, et faire la conclusion au 11.
L’appât du gain éditorial à étirer autant que possible une série qui avait trouvé son public, et puis on connait le refrain, le combat contre la Lune Noire d’Haazheel Thorn étirer en quatre tomes au lieu d'un voir deux. La fausse conclusion du tome 14 du foutage de gueule. La fin du monde approche et la Terre vit des heures sombres, le lecteur aussi et ceci depuis le tomes 7 ou on rajoute de l'annexe pour plus de thune. Comme prévu, les personnages importants tués au cours de La Prophétie sont ressuscités. L’évacuation de la planète vers un autre monde (donc encore une suite…) s’organise. Les réponses aux questions en suspens? Les origines de Whismerhill restent un mystère, on n’en sait pas plus sur sa mère, son paternel n’a toujours pas repointé le bout du nez. La relation dudit paternel avec la succube restera un mystère. (Sur certains de ces sujets, faudra acheter le tome 0, En un jeu cruel, qui répond de façon très lapidaire vu la pauvreté de son contenu.) Lucifer est occupé à… on ne sait pas non plus. Pour Greldinard et ses origines mystérieuses, faudra aussi acheter un tome supplémentaire, celui qui lui dédié dans les Arcanes.
C'est à ce moment la que j'ai voulu continuer la lapidation mentale, même en ayant vu les avis sur le tome 15. Je dois être un peu sadomasochiste par côté je pense. Le monde se réorganise et... bah aucun enjeux. Le cirque se transforme en sketch, les lecteurs qui gardaient espoir subissent une forme d'humour minable. Le côté sombre, il est ou? Rendez-moi mon argent, et puis changez moi le nom de la série aussi. La lune noire, elle y est plu. On règle les problèmes de la même manière mais avec des solutions burlesques et des décors digne des légendaires. La Dark Fantasy est absente, on m'a volé. Je n'ai rien à ajouter.
Une série sympathique à ses débuts qui va subir la lente agonie de notre cher aimé Maître argent pour finir en déchet pitoyable. Rien de mieux pour une première critique qu'un amour disparu.