Tokyo Ghost, enfin son premier tome, fut une formidable aventure poussant à l’introspection sur notre mode de vie, et surtout sur notre dépendance, toujours plus importante, à la technologie. Rick Remender, en poussant un peu le bouchon, nous montre jusqu’à quelles horreurs et déviances notre société se dirige en continuant ainsi ! Cela fait froid dans le dos, et l’on réalise, au fil du temps, que les signes avant courreurs sont bel et bien là.
Mais Tokyo Ghost ce n’est pas que cela, c’est aussi une triste histoire d’amour, avec une dévotion incroyable qui pousse à l’admiration, et une conclusion aussi tragique que l’histoire est belle et touchante.
Nichés en plein coeur des Jardins Préservés de Tokyo, Led Dent et Debbie Decay n’ont pas pu échapper longtemps à l’enfer technologique instauré par Flak Corporation. Le pirate Davey Trauma a pris le contrôle de l’esprit et du corps de Dent, qu’il pousse désormais à tuer et à détruire tout ce qui peut se trouver sur son apssage. La ville de Tokyo a été la première à en payer le prix…
(Contient les épisodes #6 à 10)
Malgré tout l’amour de Debbie, toute sa dévotion, Led est retourné dans son monde virtuel, contrôlé par Davey et est à réduit les Jardins Préservés de Tokyo en cendres ! N’hésitant même pas une seconde à laisser Debbie, apparement, mourir également. Led cristallise à lui seul, toutes les dérives les plus absolues de la technologie, il baigne tellement dedans à longueur de journée, qu’il n’est devenu qu’une simple grosse éponge obéissant aux doigts et à l’oeil de celui qui a le flux le plus important.
Maintenant que Tokyo est redevenu un terrain vierge, Flak a les mains libres pour bâtir une nouvelle ville encore plus dépravée, vulgaire et dépendante que Los Angeles ! Et avec Davey, et son toutou Led, à ses côtés, il ne risque absolument rien ! Enfin, c’est ce qu’il croit…
Dans l’ombre, le Fantôme de Tokyo commence un travail de destruction de l’intérieur afin de venger tous les morts des Jardins Préservés de Tokyo. Debbie est toujours vivante, et elle est bien décidé à détruire Flak Corporation, et aller jusqu’à tuer son patron obscène ! Cette « nouvelle » Debbie n’a plus grand-chose à voir avec la jeune femme pleine de vie et tellement enjouée du premier tome. Armée d’un katana incroyablement puissant, elle est devenue une combattante meurtrière.
Mais alors qu’elle semble déterminée, lorsqu’elle se retrouve face à Led, Debbie perd tous ses moyens et tombe à la merci de Davey ! Ce dernier en profite pour révéler ses véritables ambitions, la puissance incroyables de ses dons, et son plan diabolique ! Surtout, il a beaucoup moins de retenu que Debbie et va trouver jouissif de faire de la vie de la jeune femme, un véritable enfer de souffrance et de tristesse.
C’est un affrontement terrible et tragique qui va alors se mettre en place, et Debbie semble bien démunie et fragile face à ce monstre de Davey !…
Bon, il faut bien avouer que Rick Remender va très loin dans ses visions du futur. Mais il n’empêche que l’instrospection est toujours là. En voyant cette vision proposée par Flak Corporation, on ne peut s’empêcher de faire la parallèle avec notre monde qui évolue technologiquement toujours plus rapidement. Quand on remonte simplement de vingt ans, que l’on voit à quoi se résumait la technologie et que l’on voit maintenant, le fossé est énorme, en un lapse de temps très court. Si on remonte encore plus loin, il faut faire passer plus d’années pour des progrès moins impressionnants.
Et qui dit progrès, dit forcément dérive, c’est hallucinant les choses vulgaires et dangereuses que nous pouvons voir ou faire grâce à nos progrès. Certes la technologie est une preuve contemporaine de notre évolution, mais elle est également notre épée de Damoclès. Il y a-t-il suffisamment de bonnes personnes à vouloir faire de belles choses avec pour contrebalancer les mauvaises ? Ce n’est pas sûr, on ne peut clairement pas dire que l’Homme soit un animal bénéfique pour son environnement et le planète…
Graphiquement, Sean Murphy, je suis totalement fan, et une nouvelle fois son travail est merveilleux. Que dire de plus ? Il illustre à merveille la décadence du monde, tout comme il fait resplendire la nature sauvage. Ces scènes d’action sont d’une vitalité incroyable. Ses personnages, quelle claque ! Debbie est tellement jolie ! Et puis il parvient tellement bien à dégager des émotions ! Tout ce qu’il se dégage de Debbie et Led lorsqu’ils sont ensemble c’est juste incroyable.
Bref, magistrale conclusion pour Tokyo Ghost ! On grimpe encore d’un cran dans la décadence, l’action et le tragique ! On ne peut s’empêcher à notre propre monde, à notre propre technologie, tout en souffrant avec les personnages. Et en s’arrêtant deux secondes sur la fin de cette série, on comprend que Rick Remender reste, malgré tout, très pessimiste sur notre évolution… J’ai vraiment adoré ce titre !