Ce tome comprend une histoire complète qui s'apprécie mieux en ayant une connaissance de base des Fantastic Four. Il reprend les 6 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2007, écrits et dessinés par Alan Davis, encrés par Mark Farmer, mis en couleurs par John Kalisz.
Dans un lointain futur, l'humanité connaît un âge d'or à la fois grâce à un sérum de longévité mis au point par Reed Richards et par l'instauration d'une zone de neutralité dans le système solaire garantissant l'absence d'expansion de la race humaine tant qu'elle n'aura pas atteint un degré de maturité jugé suffisant pour rejoindre le conseil intergalactique. Mais cette utopie a été chèrement acquise, en particulier après un combat terrible entre les Fantastic Four et Doctor Doom, au cours duquel Valeria et Alexia ont trouvé la mort. Quelques années ont passé. Jennifer Walters (sous sa forme de She-Hulk) rend visite à Reed Richards qui vit seul dans une station orbitale où il recherche un moyen de voyager plus vite que la lumière, avec une source d'énergie illimitée. Aux abords de Pluton, Johnny Storm (Human Torch) mène une équipe des Avengers (Thor, Vision, Iron Man, Captain Marvel et Silver Surfer) pour affronter un groupe de supercriminels composé de Enchanteress, Sandman, Psycho-Man, Wizard, Klaw et encore un ou deux autres. Ils ont la surprise de les voir se décomposer sous leurs yeux quand Nick Fury arrive en scaphandre à la tête d'une équipe du SHIELD.
Sur Mars, The Thing se bat contre 2 petits monstres Jacob & Daniel, ses enfants. Ces derniers gagnent à la partie de chat, et The Thing s'étale de tout son long aux pieds des inhumains qui viennent d'arriver, à savoir Gorgon, Medusa et Karnak. Alicia Masters arrivent sur ces entrefaites et ramènent un peu de calme. Ben Grimm reprend sa forme humaine. Sur Terre, au fond de l'océan Atlantique, Sue Richards se livre à des fouilles archéologiques en solitaire. Alors qu'elle est en train d'inspecter les ruines d'un palais sous-marin, elle est interrompue par l'arrivée de Namor qui lui demande ce qu'elle fait dans son royaume sans l'avoir averti. Toujours en compagnie de She-Hulk, Reed Richards reçoit un appel de Wyatt Winfoot et de sa compagne Thundra. Dans une lamaserie au Tibet, Stephen Strange observe les événements se déroulant dans la station orbitale de Richards, dans un globe magique, en compagnie de sa nouvelle apprentie.
Dans les années 2000, l'éditeur Marvel décide de lancer des récits sous la bannière The End, évoquant la dernière aventure d'une partie de ses personnages. Le lecteur découvre ainsi Hulk: The end (2002) de Peter David & Dale Keown, Marvel Universe: The End (2003) de Jim Starlin & Al Milgrom, ou encore X-Men: The End (2004-2006) de Chris Claremont & Sean Chen. En 2007, c'est au tour d'Alan Davis de faire subir le même sort aux Fantastic Four. Le lecteur découvre qu'il joue le jeu : il a placé son récit dans le futur et effectivement l'équipe des Fantastic Four n'est plus, chacun s'en étant allé poursuivre sa vie de son côté, après la mort des enfants de Sue & Reed Richards. Le scénariste se montre assez cruel et original puisque la race humaine en passe d'atteindre son plein potentiel, grâce à des avancées scientifiques et médicales extraordinaires, accompagnées par une période paix sans précédent, et de croissance constructive, mais le prix à payer pour les Fantastic Four a été trop élevé.
En entamant ce genre de récit, le lecteur s'attend à ce que le scénariste s'oriente soit vers une histoire évoquant la fin des temps ou le déclin d'une institution telle que les superhéros de l'histoire, ou alors un dernier tour de piste permettant de revisiter les principaux éléments constitutifs de la mythologie des personnages. Il se rend rapidement compte qu'Alan Davis a choisi la deuxième option, à partir du moment où Namor est intégré au récit. Avec l'apparition d'Uatu le gardien et des Inhumains, il en a la confirmation. Il profite alors de voir un futur potentiel dans lequel les personnages ont évolué, sortant de la stase imposée par les règles de gestion de personnages dont la propriété intellectuelle est détenue par une entreprise de média. Le scénariste joue astucieusement avec la possibilité de montrer ce que peuvent devenir certains personnages débarrassés de cette contrainte de conserver à jamais les mêmes caractéristiques, tout en en mettant en scène d'autres qui n'ont pas bougé, comme par les exemples les Inhumains, à une exception bien trouvée et assez émouvante. De la même manière, il pioche dans la riche continuité Marvel pour mettre en scène des personnages emblématiques de la série Fantastic Four, mais aussi pour réimaginer une poignée de personnages, comme la nouvelle Captain Marvel, évoquant la version Mar-vell. Ainsi le lecteur peut à la fois profiter de voir des personnages classiques dessinés par Alan Davis (Thor par exemple) et des personnages repensés.
Alan Davis a commencé sa carrière de dessinateur de comics vers 1985, en travaillant sur des séries Marvel publiées au Royaume Uni, puis il a été embauché aux États-Unis où il a aussi bien travaillé pour Marvel que pour DC Comics, avant de voler de ses propres ailes et de devenir également scénariste. Il y a quelque chose d'immédiatement plaisant à l'œil dans les dessins d'Alan Davis, à la fois grâce à des contours arrondis et des angles de vue qui dramatisent les scènes d'action. D'une certaine manière, le lecteur éprouve la sensation de découvrir un croisement entre le dynamisme de Neal Adams et l'approche un peu plus plausible de John Byrne. C'est à la fois un compliment pour les dessins, mais aussi une forme de jugement réducteur comme s'ils n'avaient pas une personnalité assez affirmée, encore trop dérivative. D'un autre côté, il s'agit de comparaison assez flatteuse. Pour ces 6 épisodes, Alan Davis bénéficie de son encreur attitré Mark Farmer, qui a succédé dans ce poste à Paul Neary. La précision de l'encrage est remarquable à la fois dans sa capacité à faire ressortir tous les traits, mais aussi par la discrétion avec laquelle il sait faire varier leur épaisseur ou leur poli avec de courts traits qui apportent une texture fine, sans supplanter l'impression générale d'arrondi.
Dans les 3 premiers épisodes, Alan Davis s'investit pour donner à voir ce monde utopique, à commencer par le dessin en double page montrant la station orbitale de Reed Richards en vue extérieure au-dessus de la Terre, mais aussi la luxuriance de la végétation de Mars qui a été terraformée, et les ruines sous-marines. Le lecteur se délecte de la visite au musée en compagnie de Ben Grimm, ou encore de la tenue du Conseil Galactique. Le lecteur prend également plaisir à regarder les différentes formes de races extraterrestres, même si elles sont toutes basées sur un modèle anthropoïde. Le dessinateur s'amuse bien à créer un monstre marin des plus impressionnants. Le lecteur ressent le plaisir que l'artiste a à créer ces personnages et ces lieux exotiques, dignes descendants de décennies de comics de superhéros et de science-fiction. Il remarque également qu'arrivé à la moitié du récit, Alan Davis s'implique plus dans la mise en scène des conflits que dans les environnements. John Kalisz effectue un gros travail de camaïeu dans les arrière-plans pour les nourrir, alors que l'artiste se concentre tout entier dans la vivacité des gestes, et dans les cadrages fortement penchés pour donner plus de force aux coups portés.
Alors même qu'il note ce glissement vers une narration de plus en plus spécifique aux comics de superhéros, le lecteur ressent tout le plaisir qu'il a à retrouver les membres des Fantastic Four, et à anticiper le fait qu'ils vont à nouveau se réunir pour une nouvelle mission. Alan Davis a conçu une intrigue qui mêlent 3 fils narratifs (la mission de Sue Richards, les attaques sur des satellites terriens, la réapparition de supercriminels), ce qui lui donne une certaine consistance. Mais rapidement c'est la certitude que les Fantastic Four vont enfin retrouver une forme de complétude en reformant l'équipe qui l'emporte sur le reste. Alan Davis ne joue pas sur la fibre de la nostalgie, ne se lamente pas sur la perte d'un âge d'or révolu. Sans avoir l'air de trop y toucher, il fait preuve de justesse dans la sensibilité pour montrer en quoi Reed, Susan, Johnny et Ben sont plus forts quand ils forment une famille ensemble. Il ne s'agit pas d'un retour à un état antérieur, mais plutôt de la redécouverte de la dynamique constructive qui existe au sein de ce noyau familial. Mine de rien, sous couvert d'un récit estampillé La fin, Alan Davis fait la preuve de la spécificité de cette équipe, et de sa capacité à capturer son esprit et à en faire le moteur du récit.
Dans un premier temps, le lecteur apprécie surtout une forme de retour à des comics de superhéros plus tranchée et honnête. Les Fantastic Four sont là pour améliorer le sort de l'humanité et lutter contre des supercriminels. Il voit bien que l'équipe est séparée, et malgré tout Alan Davis réussit à faire exister les personnages et à mettre en lumière qu'il faut compter sur eux, même pris séparément. Il a construit son histoire en 2 parties, la première dans laquelle ses dessins enchantent le lecteur avec une utopie simple et séduisante, la deuxième dans laquelle le temps du conflit est advenu. Logiquement ses dessins se concentrent sur la relation des personnages à leur environnement dans la première partie, et dans l'expression des superpouvoirs au cours des affrontements physiques dans la deuxième partie. Le lecteur peut éprouver une forme de condescendance à la découverte d'un récit à l'ancienne pour les caractères des personnages, mais dans le même temps il sent son cynisme fondre à a chaleur humaine qui se dégage du récit.