Girls' Last Tour
7.7
Girls' Last Tour

Manga de Tsukumizu (2014)

D’une semaine à l’autre, je plonge d’un de ces mangas écrits avec, pour cheville ouvrière, des personnages aux concepts graphiques orientés vers des cercles pour constituer leur seule silhouette… à un autre. De La Cité Saturne à Girl’s Last Tour, on ne se sent pas trop dépaysé pour ce qui est du dessin, quoi qu’il est ici un poil plus terne et plus rupestre qu’il n’est mignon. Il y en a que ça enchante, mais il y a d’autres que ça horripile. Au lecteur de cette critique de deviner à quelle catégorie j’appartiens. Le son strident du grincement de dents entre ces lignes devrait, je pense, constituer un indice criant.


Ça n’est pas ici minimaliste et empreint d’une identité graphique définie comme cela peut l’être chez des artistes dont la patte, si elle n’est pas élaborée, s’avère marquante. C’est ici un dessin franchement fainéant, présenté sous couvert de mignardises afin de faire passer une pilule présumée lyrique. Eh bien la pilule ne prend pas chez ceux dont le système immunitaire critique s’avère des plus coriace.


Du faux drame étant ici au drame ce que le faux sucre est au sucre, c’est-à-dire un contenu insipide et franchement cancérigène auquel il ne fait pas bon s’y éprouver pour une quelconque raison que ce soit.


Rien ne nous est présenté, mais cela est voulu par l’auteur. Il nous plonge dans un monde industriel, où le contexte de la guerre y semble peut-être de rigueur, et où nos deux protagonistes errent sans trop que l’on sache où elles se dirigent ou pour quelle raison. L’auteur, le plus sérieusement du monde, cherche ainsi, narrativement parlant, à nous faire du BLAME! garni de petites filles mignonnes. Il faudra, à CES auteurs, car il s’agit du collectif Tsukumizu – vraisemblablement féminin comme peut l’être CLAMP à en juger la mignardise outrecuidante – qu’on leur dise que si ce qu’elles essayent d’accomplir fonctionnait avec BLAME!, cela tenait avant tout au fait que l’aspect contemplatif de l’œuvre jouait pour beaucoup à mieux échafauder l’atmosphère cela, sans compter la maîtrise de l’écriture allusive qui y fut distillée habilement et parcimonieusement tout le long du périple. Ici… c’est du silence gênant imprégné dans des cases où il ne s’y passe rien et cela, afin de paraître plus éthéré. Un effet de style minable qui, minablement, foire son effet en contribue ainsi mieux à façonner l’ennui.


C’est donc de là que furent tirés ces si abondants – et lamentables memes – de « Lolis avec des guns, lol ». Ce sera, je crois, à ça que se bornera finalement la postérité de Girl’s Last Tour.


L’humour estampillé mignon, avec des armes en sus… y est aussi minable que dans les mièvreries analogues. Le côté bon enfant au milieu du désastre ne prend pas. Rien ne prend, rien ne saisit, rien n’a d’intérêt si on pense mieux qu'on ne ressent. La cervelle ayant, chez moi, le mauvais sens de prendre le pas sur les hormones, j'analyse ce qui est après avoir observé ce qui fut. Le scénario se veut d’abord diffus pour intriguer un lecteur curieux de la suite ? Qu’on s’assure dans ce cas que l’univers soit alléchant, que les personnages aient à faire valoir quoi que ce soit, que le dessin, au moins, y soit original. Il n’y a rien de tout ça. Ça se donne des airs. Et moi les airs, fatalement, ça me gonfle.


Les deux crétines qui nous servent de protagonistes sont interchangeables du fait qu’elles soient foncièrement dépourvues de personnalité. C’est avec ça que vous espérez écrire un drame planant, mesdames ? Bon courage. Bon courage aussi aux lecteurs qui s’y essaieront en pensant extraire quoi que ce soit d’entre ces pages vides ou les répliques de chaque personnage sont employées en pure perte afin de ne rien retranscrire.


Qu’essayiez-vous d’accomplir, bougres d’auteurs, à les faire causer, l’une et l’autre de sujets légers qu’on cherche néanmoins à nous présenter comme profonds pour ce qu’ils ont de pertinents et, présumément, de poétiques ? Ce qu’on y lit ne sont rien que les cahiers de niaiseries adolescentes de collégiennes qui s’essayent à la profondeur intellectuelle. Exercice périlleux s’il en est. Quand Girls’ Last Tour s’avère amusant, ça n’est jamais qu’à son corps défendant alors qu’il se tente philosophe et poète sans verve ou semblant de réflexion pour y reposer les truismes mignons qu’on nous déballe. Ce qu’on y lit, c’est finalement du The Horizon avec davantage de sourires et de palabres.


En principe, le récit, la narration, tout a été fait – et bien mal – pour nous faire aimer ces personnages. Nous y attacher pour ce qu’elles ont de mignonnes.

À chaque page qui venait, je priais pour qu’un sniper nous en délivre d’un tir bien senti. Un sniper, ou un drone, ou même une tête nucléaire tactique, je pinaille pas quand on peut me garantir la paix de l’esprit. Ce qu’elles sont insupportables de niaiseries ; c’est d’un lourd.


À personnages niais : conclusion niaiseuse. Il a bon dos le sens du « mignon » et les lombaires chargés de prévarications multiples. Rien ne se sera accompli le temps de ce manga : rien. Le crayon a traîné là, sur les pages, on ne saura jamais trop pour quelle raison ni pour aboutir à quel propos puis aura tracé un chemin parti de nulle part pour y faire un cercle jusqu’à revenir à son point de départ. Lisez le premier chapitre, lisez le dernier : rien ne se sera passé entre les deux qui mérita seulement qu’on le retienne. Pour un auteur un peu consciencieux, Girls' Last Tour, c’est le brouillon qui vient en partant d’une idée qu’on croit porteuse avant de s’exprimer « Non, mais ça ne mène nulle part cette histoire, elle n’a aucune finalité ni même aucun objectif ». De là, la papier se froisse pour finir à la corbeille. Avec Tsukumizu aux commandes, le papier se sera étalé le long de six volumes, et il aura fallu tous se les faner pour, qu’à l’arrivée, on en conclut comme il se devait : « Effectivement, tout ce périple et ce qui l’entourait n’aura eu ni sens ni propos ».


Certains sont prétentieux sans avoir les moyens de leurs prétentions.

L'auteur n'avait ici pas même les moyens d'être prétentieux.

Merci pour la balade.

Josselin-B
2
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le 11 sept. 2024

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Josselin Bigaut

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