Si Hinomaru Sumo n’est pas le premier titre traitant de ce sport à arriver sur notre marché (on peut penser à Yokozuna chez Kana, série inspirée de la vie de Chad Rowan), il porte sur un sport qui n’est pas forcément bien connu en France (même si un ancien président aurait pu en faire...) et qui n'est pas en première ligne parmi l’offre manga. Fort heureusement, il n’est pas besoin d’être spécialiste pour comprendre et apprécier ce premier tome de Kawada ! Loin de créer une barrière entre le lecteur occidental et son récit, Hinomaru Sumo, nous prend par la main pour nous faire découvrir très progressivement ce monde, ses règles, coutumes, surnoms…
Tout manga doit avoir son héros. Ici il se nomme Hinomaru Ushio. Dès le tout début il se signale en remettant à sa place un individu dont les mains baladeuses importunaient une jeune fille. Première action d’une longue liste car Ushio est un personnage très actif. Il veut obtenir le grade de Yokozuna (« champion suprême »), grade le plus élevé dans la hiérarchie du sumo. Pour cela il s’inscrit au club de sumo du lycée de Ôdachi qui ne compte… que deux membres (lui compris).
Avant même de s’entraîner et de participer à des compétitions Hinomaru doit donc « redresser » la situation, permettre au club de disposer de son dojo (occupé par des « voyous » dont Yuma, le « mec le plus fort du lycée »), trouver un autre membre (il faut être trois pour participer aux compétitions par équipe) et, ce faisant, balayer nombre d’idées reçues sur le sumo. Kawada ne se prive pas, à travers son personnage principal, de démolir les images caricaturales que l’on peut avoir en tête : les sumos sont de vrais athlètes, ce n’est pas un sport de mauviettes… Physiquement ils en imposent et les oppositions sont loin d’être un partie de plaisir.
J’ai ainsi beaucoup apprécié les combats auxquels nous assistons, même s’ils ne durent pas très longtemps. La logique suivie, les techniques utilisées, la stratégie à suivre pour gagner… ces éléments, amenés à se développer au fil des tomes, m’ont bien plu car ils montrent la diversité des outils à disposition des sumotoris pour l’emporter. Il ne suffit pas d’être le plus grand et le plus volumineux pour l’emporter.
Surtout, le propos de Hinomaru sur ce qui fait la beauté, le charme de ce sport a complètement pris avec moi. Je me permets de le citer : « Tu trouves ça ridicule, toi [de ne porter qu’un mawashi] ? Moi j’y vois plutôt une façon de se débarrasser du superflu. De renoncer aux apparences. Quand on n’a plus que son mawashi on est comme nu. Et c’est justement parce qu’on ne peut plus compter que sur soi-même que le combat est si exaltant ! » Surtout que le dessin de Kawada est intéressant lorsque l’heure est à l’affrontement. Les prises utilisées, les mouvements sont présentés clairement, sans besoin pour nous de nous attarder longuement sur les planches pour comprendre ce qui se passe.
Au fil des sept premiers chapitres, Hinomaru Sumo pose quelques grandes lignes, classiques du genre, mais qui ne sont pas pour nous déplaire :
- Un héros atypique dans l’univers du sumo : Hinomaru veut atteindre les sommets, lui qui a brillé dans la discipline par le passé. Physiquement il n’est pas du tout dans les « normes » du genre (1m60, 79 kilos) mais cela ne fait que décupler son envie de se surpasser et de battre ses adversaires
- Il n’y arrivera pas seul : une équipe se crée autour de lui, pour participer aux compétitions, nouer des liens. On pressent déjà que le groupe qui se forme débordera largement le cadre du club de sumo du lycée
- Que serait un héros sans un rival digne de ce nom ? Déjà, un opposant de premier plan se dessine déjà pour Hinomaru
- En toile de fond se joue aussi l’avenir du sumo au Japon car on apprend que les trois yokozunas du sumo professionnel sont des « étrangers » (i.e. non japonais) : les « jeunes » que nous voyons permettront-ils de chambouler tout cela d’ici quelques années ?
La volonté de (re)conquête de Hinomaru est donc contagieuse : le lecteur se prend très vite au jeu ! Si le thème retenu pouvait susciter quelques réserves, parcourir ce premier tome les lèvent complètement car on retrouve tous les ingrédients du shônen à la sauce sumo. Le tout se révèle très agréable à lire. Entrée sur le Dohyô réussie !