De la rivalité Chine-Japon.
Sur près de 600 pages, Ikki Mandara inaugurait une grande fresque, celle de la révolte des Boxers en 1900 en Chine, puis la montée du montée du socialisme au Japon, menant droit à la guerre contre la Russie en 1904.
L'histoire est vue du côté de Sanniang, une jeune Chinoise qui va assister, voire participer à ces évènements, mais surtout parce qu'elle sera ballotée souvent contre son gré.
Cette jeune femme sera au départ fouettée par par le percepteur des impôts pour ne pas avoir payé sa dîme, puis le tuera, ce qui lui vaudra d'être pourchassée dans tout le pays, puis de se cacher en tant que soldat participant à la révolte des Boxers. Il lui arrivera plein de choses, jusqu'à son arrivée au Japon où sa condition de Chinoise sera loin d'être acceptée par tous, surtout dans un pays aussi conservateur que le Japon.
Mais Sanniang a surtout un caractère bien trempé, loin des mœurs en cours à l'époque, à la fois naïf, ingénu, et qui ne supporte pas la vision d'un homme nu, au point de vouloir le tuer.
Mais cette femme n'est pas le seul intérêt du livre, c'est aussi voir les tensions qui se créaient entre les Chinois et les Japonais, la montée du nationalisme, ce qui donne au manga un aspect très politique qui peut rebuter les non-initiés (ce que je suis). Mais Tezuka a voulu proposer l'apparition de Sanniang en tant que témoin de cette période troublée, au côtés de personnages ayant réellement existé même si une part de fiction demeure, ce qui est tout à l'honneur de Osamu Tezuka.
Le livre paru en France n'est que le début de ce qui aurait dû être une grande saga sur la situation Sino-Japonaise du début du XXeme siècle, mais malheureusement, sa publication a été interrompue au Japon. Doit-on y voir un signe d'une censure concernant un sujet sensible ? Tout cela pour dire que cette fin en suspens laisse une grande frustration sur la suite des évènements, notamment le devenir de Sanniang.
L'auteur n'hésite pas à montrer des passages souvent durs, à une époque où la torture était souvent roi, et où la condition des femmes se résumait à peau de chagrin, en plus de proposer un dessin plus réaliste qu'à l'accoutumée, notamment dans la représentation des personnages. Seule Sanniang est représentée dans un style un peu plus cartoon, du fait de sa grande expressivité, et on peut dire que c'est aussi une grande gueule, n'éhsitant pas à dire tout haut ce que d'autres pensent tout bas.
C'est elle, ainsi que le contexte social évoqué, qui apportent le sel de ce manga fort intéressant à lire.