Science-fiction baroque 'n' roll

Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome initialement parue en 1992.


Quelque part dans une autre galaxie, loin dans le futur (61ème siècle), les êtres humains ont conquis l'espace et trouvé le secret de l'immortalité. L'histoire commence sur l'un des 3 mondes de la Triad qui a été coupé du reste de la civilisation il ya des décennies de cela. Il y a des années ces planètes avaient été achetées par de riches propriétaires ayant réinstitué un gouvernement fondé sur une classe de nobles et une classe de paysans. Au début du récit, Brian Ironwolf participe à des actes révolutionnaires ayant pour objectif de renverser le système politique en place. Une escarmouche à bord d'un vaisseau spatial tourne mal et il plonge dans le coma pendant 8 ans. À son réveil, la révolution a fait long feu, mais il se replace rapidement au milieu d'intrigues complexes pour une lutte du pouvoir acharnée.


À la lecture de ce tome, il est possible que vous soyez déconcerté par l'un des personnages : Homer Glint et ses allusions à une déesse appelée Karen Sorensen. En fait cette histoire d'Ironwolf prend sa source à la fois dans le fait qu'Howard Chaykin avait créé ce personnage (Ironwolf) des années auparavant pour DC Comics, et dans une autres histoire appelée "Twilight" (illustrée par Jose Garcia Lopez) dans laquelle Chaykin s'amusait avec tous les personnages du futur de l'univers DC pour décrire une grande fresque de l'évolution de la race humaine. Il est toutefois possible de comprendre ce récit, sans rien savoir de tout cela. La forêt détruite au début a une grande importance car c'est à partir de ces arbres (dont le bois présente des propriétés neutralisant la gravité) qu'il est possible de construire des vaisseaux spatiaux.


Évidemment ce qui a fait que "Fires of revolution" reste dans les mémoires, c'est le nom de son dessinateur : Mike Mignola. Il s'agit là de l'un de ses derniers travaux pour DC, avant d'aller créer Hellboy en 1993, chez Dark Horse. Ses dessins sont encrés par Philip Craig Russel avec il avait déjà travaillé sur Gotham by Gaslight. Mignola se cale sur les visuels que Chaykin avait créés en 1973. Il y a des tartans écossais, des robes de bal du dix-huitième siècle, de très beaux bâtiments haussmanniens, ces vaisseaux spatiaux particuliers qui mélangent les structures métalliques de Gustave Eiffel, avec des planches de bois, des vampires très ténébreux, des lions anthropomorphes, etc.


Il y a aussi le style de Mike Mignola qui transforme toutes ces bizarreries. Le lecteur retrouve sa forte propension à omettre les décors qui n'est pas encore contrebalancée par son utilisation magistrale de la couleur noir qui n'apparaîtra qu'à partir d'Hellboy. Passés ces 2 défauts de jeunesse, Mignola crée des visuels d'un autre monde, d'une autre époque, au charme fou. Il y a l'apparence des vampires nimbés d'une aura de mystère impénétrable. Il y a les scènes de foules qui évoquent tour à tour la révolution française et le bal du 14 juillet, et une incroyable scène de bal masqué. Il y a quelques gags visuels discrets comme ce rétiaire qui combat un poulet géant. Il y a le museau des créatures léonines. Il y les hommes de main armés en train de massacrer la foule, etc. Déjà, Mike Mignola dose parfaitement ce qu'il montre et ce qu'il suggère pour une efficacité subtile. L'encrage de Philip Craig Russell et d'une délicatesse extrême et il complète quelques éléments de costumes (les cols de robes de bal) ou de décors en apportant un degré de finesse exquis.


Pour cette histoire, Howard Chaykin a fourni la trame (et visiblement la structure un peu alambiquée de distillation d'informations éparses). À cette époque, il travaillait avec John Francis Moore qu'il avait pris comme assistant et dont il a lancé la carrière dans le monde des comics. Il est facile de reconnaître la patte de Chaykin dans la thématique politique (la lutte des classes) et dans la touche de science-fiction. Il est vraisemblable que John Francis Moore a rédigé les dialogues et les commentaires. Il a chois un style assez écrit avec des exposés quasi-systématiques sur les tenants et les aboutissants politiques de chaque situation. Ce n'est pas vraiment désagréable, ça aboutit à une science-fiction légèrement politisée (pas trop quand même, ce n'est pas du Toqueville), mais aussi à une narration parfois un peu pesante avec des dialogues assez artificiels. En particulier la scène se déroulant sur la planète Omicron ne reste digeste que grâce aux visuels de Mike Mignola.


Alors cette histoire constitue une bonne aventure de science-fiction qui cultive intelligemment son coté rétro par les thèmes abordés et par le style des illustrations, avec une vraie volonté de proposer des scènes visuellement intéressantes et séduisantes.

Presence
7
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le 25 août 2019

Critique lue 131 fois

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