Le personnage de John Constantine a été créé par Alan Moore dans la série Swamp Thing. Il apparaît pour la première fois dans l'épisode 37 en juin 1985. Le présent tome comprend les épisodes 1 à 9 de la série mensuelle, ainsi que les épisodes 76 & 77 de la série Swamp Thing.
À New York, un responsable de bureau de poste est saisi d'une fringale inextinguible. Il mange une quantité de hamburgers incroyables, avant de dévorer plusieurs plats dans un restaurant, puis il essaye de manger l'une clientes, et succombe de malnutrition foudroyante. À Londres, John Constantine rentre chez lui et retrouve Gary Lester (un ami) dans sa baignoire. Pour trouver le fin mot de cette histoire, Constantine requiert l'aide de Chas (Francis Chandler, le chauffeur de taxi) et doit se rendre à New York pour travailler avec Papa Midnight.
Dans le troisième épisode, il doit mettre fin à une prolifération de yuppies soutenus par un démon. Ensuite il doit sauver Gemma Masters (sa nièce) d'un kidnapping avant qu'il ne soit trop tard. Il est ensuite confronté à une résurgence surnaturelle de conflits datant de la guerre du Viêt-Nam, puis à des skins bien fachos voulant débiter du pakistanais, à un cas de combustion humaine spontanée, à l'enlèvement de sa copine par un groupuscule religieux intégriste, etc.
Alan Moore avait fait de Constantine un personnage mystérieux, très bien renseigné, servant surtout à promener Swamp Thing d'une horreur surnaturelle à une autre, tout en rabaissant le monstre des marais pour sa naïveté et son intelligence limitée. Jamie Delano (scénariste anglais) a la lourde tâche de développer le personnage et de définir le ton de ses aventures. Il commence par définir rapidement sa vie antérieure au travers de 2 textes (reproduits en fin de volume) pastichant des articles de journaux. Il introduit des personnages qui auront la vie longue dans la série : Chas (il a même eu droit à sa propre minisérie : The Knowledge), Papa Midnight (il a également eu droit à sa minisérie : Papa Midnight), Emma Masters, Nergal, et les fantômes qui suivent Constantine, morts à l'occasion du fiasco de Newcastle.
Pour le ton de la série et la nature des aventures, Delano marie 3 ingrédients. Le premier est l'horreur issue des forces surnaturelles et des démons. Cela donne lieu à des scènes assez répugnantes, renforcées par les illustrations éloignées de l'esthétisme des superhéros. Il mélange cette horreur de carnaval avec un deuxième ingrédient que sont les horreurs de la société anglaise, anxiogènes ou révoltantes. C'est ainsi que John Constantine côtoie le libéralisme sauvage et la réélection de Margaret Thatcher, l'intégrisme religieux, la haine raciale, les traumatismes des soldats, la faim dans les pays sous-développés d'Afrique Noire, le début des années SIDA, etc. Le troisième élément définissant ces aventures réside dans le flux de pensée de John Constantine. Delano fait partager au lecteur les pensées du personnage principal, ce qui donne un accès à la perception de Constantine et aux sentiments qu'il éprouve devant chaque obstacle, et chaque catastrophe. Lion d'être artificiel, ce dispositif narratif rapproche le personnage du lecteur, et lui montre que son cynisme provient de son expérience avec les catastrophes (au début de la série, Constantine a 35 ans), et constitue l'armure sans laquelle il ne pourrait pas continuer. Ces 3 ingrédients s'amalgament pour former des histoires horrifiques à plus d'un titre, avec quelques rares pincées d'humour qui font ressortir, par contraste, l'horreur des événements.
Les épisodes 1 à 7 sont illustrés par John Ridgway, les épisodes 8& 9 sont dessinés par Ridgway et encrés par Alfredo Alcala. Ridgway utilise une esthétique assez réaliste et terre à terre, avec quelques cases renforçant l'horreur visuelle. Son style n'est pas très plaisant à l'oeil car il privilégie un encrage à base de traits fins un peu sec qui donne un aspect d'esquisse à certains visages, ou certains vêtements. Du coup, le lecteur n'a jamais l'impression de se rincer l'oeil sur des images complaisantes ; il est plutôt contraint d'affronter des visions peu avenantes. Pour la séquestration d'Emma Masters, le lecteur se retrouve dans une masure comportant des équipements récents (tels qu'un four à micro-ondes), mais qui évoque aussi l'insalubrité des taudis du dix-neuvième siècle. Quand les hallucinations de la guerre du Viêt-Nam prennent le dessus, la moiteur et la peur deviennent palpables. Quand Papa Midnight sacrifie un poulet, le sang tâche avec réalisme et quand ses zombies s'affrontent le choc du poing dans le visage fait mal à voir. Il n'y a peut être que le rendu des démons qui ne soit pas tout à fait à la hauteur. L'encrage d'Alfredo Alcala est moins précis, mais il fait mieux ressortir les textures.
Cette nouvelle édition de 2011 comprend également les épisodes 76 (scénario et dessins de Rick Veitch, encrage d'Alcala) & 77 de Swamp Thing (scénario de Delano, dessins de Tom Mandrake, encrage d'Alcala) qui constituent la fin de l'intrigue commencée dans Hellblazer. Ils sont moins denses en écriture et ils font référence de manière astucieuse à l'affrontement décisif entre le Ciel et l'Enfer raconté dans Saga of the Swamp Thing 4.
Le tome se conclut avec la reproduction des couvertures de Dave McKean (qui passera ensuite aux couvertures de Sandman, et aux textes originaux qui figuraient sur la deuxième de couverture des 4 premiers épisodes (évoqués plus haut).
La densité de la narration et le mélange des éléments horrifiques surnaturels avec les horreurs quotidiennes de l'Angleterre des années 1980 permettent à ce récit d'être toujours aussi prenant et dérangeant. DC Comics continue la réédition de cette série avec The Devil you know qui contient les épisodes 10 à 13, et la minisérie The horrorist 1 & 2 (Illustrée par David Lloyd), ainsi que le numéro annual 1.