La fin du monde comme on aimerait la voir plus souvent
« Kingdome Come » en deux phrases : Le comic nous présente un univers où Superman et les autres héros se sont retirés du monde, laissant la place à une nouvelle génération de meta-humains qui ne pensent qu'à se mettre sur la tronche sans se soucier de la population. Suite à un événement catastrophique, Superman réuni ses anciens amis pour remettre les choses dans l'ordre, quitte à devoir affronter ses anciens ennemis, et de nouveaux !
Présenté comme ça, c'est sûr que ça fait un peu léger. Mais tout l'intérêt du comic va bien au delà de son scénario. Ce qui frappe évidemment lorsqu'on l'ouvre pour la première fois, ce sont les peintures superbes d'Alex Ross. Le style est flamboyant, les couleurs sont marquées, le travail sur les lumières est impressionnant et les personnages sont empreints de gravité dans tout ce qu'ils font. On est vraiment dans un monde sublimé où évoluent des demi-dieux, bien loin des humains ordinaires, qu'on ne voit d'ailleurs presque jamais. Ce côté épique est encore plus souligné par la dynamique du découpage des pages et des actions. Ici, pas de cases mais des pages entières, divisées selon le besoin de l'action. On a l'impression que celle-ci déborde des pages, qu'elle continue bien au delà du cadre de l'image. Ross déploie tout l'ampleur de son talent dans les illustrations pleine page, voire de double page. C'est beau, c'est grand, c'est fort, que demande le peuple ?
Quand on passe à la lecture proprement dite, on peut alors apprécier le scénario de Mark Waid. Pour développer un peu plus mon « intro-minute », on peut y ajouter que le récit est vue à travers les yeux d'un pasteur ayant des visions de fin du monde. Il est choisi par le Spectre pour servir de témoin invisibles des événements qui se préparent et de juge lorsque la fin du monde se présentera. On ne peut pas dire qu'on est face à un scénar révolutionnaire mais tout se tient et on est vite pris dans l'intrigue et les perso.
C'est vrai qu'ils sont grands !
En réaction à la tendances à la vague d'histoires sombres et pessimistes (le fameux "grim and gritty") parues dans les années 80, cette histoire vise à rendre aux super héros leur statut de mythe.
Ils vivent à l'écart des hommes et ont abandonné leur rôle de protecteurs. Ils ont été oubliés par la population et n'ont plus d'influence sur le déroulement du monde. Leur retour en fait à nouveau des demi-dieux, fixant leurs propres lois et dirigeant les choses sans concertation avec les humains. Alex Ross les peint d'ailleurs souvent dans des attitudes très graves, fixés dans leur mouvement comme des statues de dieux grecs. Cette rigidité ne nuit pas à la lecture et ajoute au contraire à l'ambiance « sur-humaine » de l'histoire.
Les dix commandements du comic
Toute l'œuvre est traversée de références à la Bible et plus particulièrement l'Apocalypse selon St Jean. En voici quelques uns mais j'en ai sans doute ratés : Le titre, tout d'abord, pourrait se traduire plus ou moins littéralement par « Que ton reigne vienne » mais l'expression est plus généralement utilisée aux USA pour parler de la fin des temps/du monde. Un certain nombre de citations sont tirées directement de la Bible, à commencer par celles de la première page. Les personnages du pasteur et du Spectre ont clairement pour rôle de tenir le Jugement Dernier... Bref, si vous avez un minimum de background dans ce domaine vous apprécierez encore plus le récit.
Dis papa, Superman il est gentil ou il est méchant ?
On reproche souvent au personnage de Superman d'être unidimensionnel, de tenir le rôle du gentil coûte que coûte quitte à passer pour un benêt. Ici, un peu comme dans « Superman : Red Son » de Mark Millar, il pousse jusqu'au bout son rôle de justicier, au risque de basculer dans le fascisme primaire. Ça donne de l'épaisseur au personnage et ça fera plaisir aux allergiques aux bons sentiments.
En un peu plus de 200 pages, « Kingdome come » nous livre une histoire tendue, servie par un graphisme d'une qualité rare. Un must pour moi.
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