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Une dystopie sous stéroïdes qui titille l'œil mais laisse l'esprit en plan

Avec L'Anomalie, premier tome de Megalex (1999), Alejandro Jodorowsky et Fred Beltran nous propulsent dans une dystopie où tout est démesuré : les décors, les personnages, et même les ambitions. Malheureusement, si la direction artistique vous en met plein les yeux, le scénario vous laisse parfois avec un air de "c’est tout ?". Bienvenue dans une mégapole où la profondeur des idées a du mal à suivre l’exubérance visuelle.


L’histoire commence à Megalex, une ville-planète où le gigantisme est la norme, la nature est un souvenir, et les citoyens vivent sous le joug d’un système oppressant. Au milieu de cette folie architecturale et cybernétique, une anomalie émerge : un clone difforme qui refuse de rentrer dans le moule. Sur le papier, ça a tout pour être une exploration fascinante de la lutte contre l’uniformité, mais dans les faits, le récit reste en surface, enchaînant les scènes spectaculaires sans toujours construire une intrigue convaincante.


Graphiquement, Fred Beltran livre une performance qui mérite des applaudissements. Les décors sont impressionnants, les textures numériques sont futuristes, et chaque case ressemble à une fresque issue d’un rêve fiévreux. Mais ce style ultra-polish peut aussi sembler froid et impersonnel, comme si l’esthétique prenait le pas sur la narration. C’est beau, certes, mais parfois au détriment de l’émotion.


Du côté du scénario, Jodorowsky, fidèle à lui-même, injecte une dose de philosophie et de symbolisme, mais cela ressemble plus à des éclats qu’à un véritable fil conducteur. Les thématiques de rébellion et de quête d’identité sont présentes, mais elles peinent à vraiment décoller. On attend le moment où l’histoire nous saisit à la gorge, mais il ne vient jamais. On reste spectateur d’un univers impressionnant, mais étrangement creux.


Les personnages, quant à eux, sont aussi exagérés que les décors : le clone "anomalie" est intéressant en théorie, mais manque de profondeur pour vraiment captiver. Les figures d’autorité, elles, sont des caricatures dystopiques classiques : froides, impitoyables, et un peu interchangeables. On sent qu’il y avait matière à creuser, mais le récit semble trop pressé de passer à la prochaine scène visuellement frappante.


En résumé, L’Anomalie est un festin visuel qui manque de substance pour vraiment rassasier. Jodorowsky et Beltran nous offrent une dystopie qui brille par son esthétique mais qui trébuche sur le plan narratif. Une œuvre qui impressionne par son ambition, mais qui donne parfois l’impression de visiter un musée d’art futuriste où les étiquettes explicatives manquent. Un premier tome qui fascine autant qu’il frustre, en espérant que les tomes suivants donnent un peu plus de chair à cet univers.

CinephageAiguise
6

Créée

le 13 déc. 2024

Critique lue 1 fois

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