J'avais déjà adoré Blast et sa plongée vers la noirceur de l'âme, mais Le Rapport de Brodeck, en tout cas le tome 1, pas encore lu le 2nd, est encore plus noir. Je n'ai pas lu le livre de Claudel, donc difficile de parler de la façon avec laquelle il est restitué, je me concentrerai ici sur la BD en tant que telle.
Un village coupé du monde par la neige, au lendemain de la guerre, un huis clos glaçant où seuls les natifs de la région ont leur place, des êtres brisés par des années de souffrance, de privation et la méfiance vis-à-vis de ce qui vient de l'extérieur, la route n'est-elle pas celle empruntée par l'ennemi venu détruire et piller ? Dès le début, les premiers traits de visages angoissants et l'ambiance hivernale posent le décors.
Plus le livre avance plus on entre dans la vie des principaux personnages et leurs tourments. Le meurtre de l'étranger n'est "que le prétexte" pour décrire une société repliée sur elle-même et explorer les sentiments, la peur, la souffrance, l'esprit de revanche, des protagonistes. Entre ceux qui sont passés au travers de la guerre par leur activité et ceux qui ont au contraire connu les pires souffrances, parfois jusqu'à en perdre leur humanité au prix de la survie (Brodeck), le récit est passionnant.
Un trait de crayon magnifique qui pose à lui seul l'ambiance et l'histoire et des textes de très grande qualité. L'ouvrage est long mais à aucun moment on ne s'égare ni on ne s'ennuie.
Bref, un très beau livre, j'ai hâte de lire le 2nd mais également l'oeuvre qui a servi de support à cette très bonne BD.