C'est une bien étrange période pour la série, puisque la succession de Fournier va s'avérer mouvementée.
D'un coté, Dupuis, et certains décideurs du journal veulent imposer Nic Broca, un inconnu dans le genre qui s'est avant tout illustré dans le domaine de l'animation (et dont le succès principal sera Les Snorkys) auquel on adjoint Raoul Cauvin au scénario, qui peut déjà se targuer d'une solide réputation avec des séries comme Les Tuniques Bleues, ou Sammy et qui s'illustrera également dans bon nombre de séries humoristiques plus ou moins réussies telles que: L'Agent 212, Cédric, Les Femmes en blanc, Cupidon, Pierre Tombal ou Les Psys entre autres.
De l'autre, on a le rédacteur en chef du journal de Spirou de l'époque Alain De Kuyssche qui ne l'entend pas de cette oreille et veut imposer deux petits jeunes sur la série phare du journal: Philippe Vandevelde, dit Philippe Tome et Jean-Richard Geurts dit Janry.
Ce bras de fer qui s'engage pour la succession de Fournier va donc entrainer l'existence simultanée de différentes histoires de nos héros.
Les deux équipes ne partent pas avec les même armes, et cela va expliquer pas mal de choses concernant l'écart de qualité entre les albums des uns et des autres.
Nic et Cauvin ont pour directive de ne pas utiliser l'univers créé par Franquin et Fournier, et de ne pas utiliser des personnages comme Champignac, Zorglub, etc. Dupuis a envie de revenir à des aventures de Spirou et Fantasio qui s'éloignent du coté politique ou hautement fantaisiste qui avait été amené par les deux auteurs precedents de la série..
Tome et Janry, eux, ont les coudées franches et sont parfaitement libres de s'inscrire dans la continuité de l'univers développé par Franquin et Fournier ainsi que de réutiliser tous les personnages comme bon leur semble.
Forcément, les trois albums de Nic et Cauvin souffriront de ces directives arbitraires, et s'ils sont considérés, à juste titre, comme les plus mauvais albums de la série par de nombreux afficionados du groom recyclé en journaliste et de son ami, on peut tout de même leur trouver des circonstances atténuantes.
Et donc, la ceinture du grand froid, ça vaut quoi?
Et bien, c'est pas terrible. Un scénario pas très emballant ni très original, assez linéaire et pour tout dire plat. On aura connu Cauvin plus inspiré.
Si de son coté Nic fait ce qu'il peut, il faut avouer que son dessin parait assez pauvre en comparaison de ses prédécesseurs, particulièrement au niveau des décors et arrière-plans. Par moment même Spirou est un peu raté.
La Ceinture du grand froid se situe donc en terme de qualité dans le fin fond des albums de la série, mais on peut néanmoins trouver quelques circonstances atténuantes à Nic et Cauvin, qui, si elles n'excusent pas le niveau faible de l'album, peuvent tout de même expliquer certaines de ses bizarreries comme la volonté de se couper de l'univers aussi foisonnant que passionnant développé par Franquin et Fournier avant eux.