Le premier André Juillard-Yves Sente de toute la série, le second au scénario, l'autre au dessin.


Pour ce qui est du visuel de Juillard, en ce qui concerne les décors, il n'y a aucun problème, c'est aussi précis et détaillé que pouvait l'être un Jacobs, par contre, j'ai trouvé que les visages manquaient de finesse dans les traits, ce qui fait que l'expressivité des personnages n'est pas rendue au mieux.


Pour ce qui est du scénario de Sente, dans les trente premières pages, la partie se déroulant principalement en URSS, j'avais le bon espoir d'un sommet.


En effet, jamais la BD n'avait été aussi précis dans le contexte historique, à savoir 1957, un des pics de la période pendant laquelle les deux plus grandes puissances mondiales s'affrontaient plus que jamais dans la conquête spatiale. Rarement, un méchant, à savoir un scientifique fou, nostalgique du temps de Staline, ne m'a paru aussi détestable. Et il y a un personnage féminin fort, à travers la brillante Nastasia Wardynska (d'ailleurs, il y aura deux autres femmes ayant un rôle important pour l'intrigue, à croire qu'il essayait de rattraper le plus vite possible la quasi-absence du beau sexe chez Jacobs, mais cela est très loin d'être déplaisant !).


En outre, le fait que cela se passe en "territoire ennemi" renforce l'angoisse, sans parler que les rebondissements s'enchaînent avec autant de fluidité et de rapidité que des poupées russes s'enfilent les unes dans les autres.


Une fois revenu dans la Perfide Albion, cela fait considérablement plouf. Non pas parce qu'on est revenu dans un lieu plus rassurant, les ennemis étant toujours là et aussi redoutables ailleurs que chez eux. Non pas parce que l'intrigue dans les grandes lignes n'est pas intéressante. Au contraire, l'originalité de la figure du scientifique fou ici (ce qui la distingue de celles que l'on croise dans La Marque jaune, S.O.S. Météores et Le Piège diabolique !), c'est qu'il utilise la bactériologie comme arme de destruction. Niveau angoisse, c'est l'idéal, c'est l'argument scénaristique rêvé. Non, le problème ici, c'est que Sente révèle le comment de la contamination beaucoup trop tôt.


Cela a deux conséquences très dommageables. Primo, quand on sait d'où vient exactement la menace, elle devient bien moins terrifiante. Secundo, cette erreur prive le lecteur de la possibilité du plaisir de deviner par lui-même (juste avec l'aide de quelques indices discrètement disséminés !) ou de celui d'être étonné, choqué, s'il ne parvient pas à trouver, avant les personnages. La méthode de contagion était bien imaginée (et profondément cynique !) en plus, quel gâchis !


La Machination Voronov avait tout pour faire un bon cru, mais à cause d'une simple décision scénaristique stupide, on a une belle déception.

Plume231
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le 12 mars 2021

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