Milo Manara s'attaque à cette grande figure de la peinture italienne qu'est Le Caravage. Bien connu pour ses bandes dessinées érotiques, il nous fait partager sa passion pour les femmes, très présentes dans cette biographie, et la peinture. On y suit un homme, fasciné par ce qui l'entoure, en rupture avec les conventions de l'époque, adepte du clair-obscur et d'un réalisme brut. Mais Caravage est aussi quelqu'un d'impulsif, qui a eu une vie tumultueuse, entre des démêlés avec la justice pontificale et une épée un peu trop leste dans la main du peintre.
Si l'on ne devait juger que le dessin, alors, rien à redire, c'est tout simplement remarquable. Les détails qu'il donne à la ville de Rome et à ses personnages, qu'ils soient nus ou habillés, est d'une grande justesse. Le trait est soigné et très propre. Le choix des couleurs, que les scènes se déroulent de nuit ou de jour, font bien ressortir l’atmosphère d'oppression qu'avait la ville à la fin du 16ème siècle. Mais on doit aussi prendre en compte le scénario, et là, ça coince un peu.
Comme beaucoup d'artistes, la vie du Caravage est vaste, bien qu'elle fut si courte. Mais là, le rythme est rapide, même un peu trop. On enchaîne les scènes assez platement sans rentrer réellement dans la vie de ce peintre si déroutant. L'auteur nous donne l'impression de voir un biopic musical où on enchaîne les tubes sans creuser l'histoire de l'artiste et ce qu'il a apporté à ses œuvres. C'est la même chose pour cette biographie. On enchaîne les tableaux sans aller réellement au fond des choses. Qu'en est-il des modèles masculins qu'il affectionnait tant ? De la relation qu'il avait avec ses compagnons, la relation avec l'Eglise? Dommage que ce soit un peu trop survolé. Sinon, la biographie reste de facture assez classique mettant un point important sur le sort des prostitués à cette époque car il s'en est servi de modèle pour faire la figure de la Vierge.
Si on enlève la pompeuse introduction qui veut rendre l'histoire que l'on va lire d'une grande crédibilité, l'ensemble se lit avec plaisir malgré la forme assez classique qu'à cette première partie de la vie du peintre. La beauté et la finesse du trait de Manara rattrape l'histoire en nous faisant découvrir Rome et ses habitants sous un nouveau jour. Les filles sont toujours aussi belles et la peinture l'est tout autant.