Du reboot par ici, du reboot par là ... Conan n'échappe pas à cette vague endiablée de relance de licences éprouvées et le monde la BD est heureux de retrouver le fils de Crom à travers cette nouvelle approche du cultissime héros de pulp.
Brian Wood s'est vu confier la lourde tâche de donner un peu de peps et de modernité au Conan des éditions Marvel et autres Dark Horse Comics. Cette dernière boîte dispose à présent de l'exclusivité sur le guerrier et s'est lancé dans une belle collection depuis 2003. Cette nouvelle approche se veut moins classique, plus moderne pour aller chercher un nouveau public. Nulle doute que les fans des graphismes plus traditionnels risquent d'être choqués car oui, que ce soit sous la patte graphique de Becky Cloonan et James Harren, notre Conan est bien différent de nos vieux canons.
Le scénario est une adaptation d'une nouvelle fameuse d'Howard, La Reine de la Côte Noire. c'est un texte que j'aime beaucoup car Conan, encore jeune mais déjà fin bretteur, est subjugué par une femme mystérieuse, à moins que ce ne soit l'inverse ... ou plus certainement les deux. Passion dévorante, fureur et pulsions sexuelles à leur paroxysme, cette aventure haute en couleur font de Conan le jouet d'une pirate écumant les côtes de Kush. L'adaptation est bonne, fidèle et innovante. On ne s'ennuie pas un instant ; même la rencontre initiale proche d'un délire de Kurtz a quelque chose d'assez enivrant et on sombre petit à petit dans cette passion sauvage. Pas du tout gênée donc par la mise en place.
Plus que l'histoire, c'est bien le design qui peut poser problème. L'approche très moderne, presque simpliste proposé par Becky Cloonan, passe ma fois assez bien. C'est efficace et certaines planches sont même très belles, comme ces trop rares pleines pages. La décision est faite avec le traitement de Bêlit. Elle est belle, sensuelle à l'image de la scène d'amour tout en finesse. Là où un Marini balance verges dressées et seins en veux-tu en voilà, ici tout est suggéré, les courbes dessinées mais jamais totalement montrées et le résultat est plus percutant. La seconde partie de l'aventure reprend le même design mais James Harren a un patte très différente. Bêlit est nettement moins belle, Conan nettement moins lisse. L'ensemble peut rebuter mais j'ai trouvé ce dessin plus dynamique et la séquence finale est autrement plus sauvage et violente que le combat naval de Conan.
Au final un reboot agréable qui va chercher de nouveaux lecteurs. On pourrait reprocher ce fan service pour "djeunes", le côté "émo", mais je n'ai rien trouvé de choquant. Et puis de toute façon, je n'ai jamais été hardcore : je suis fan mais ouvert et pas vraiment du genre à partir en croisade pour sauvegarder ce qui serait "l'âme irréductible que seul les vrais fans comprennent". Parce que cette âme, croyez moi, Crom, du haut de sa montagne, il s'en tape les roubignoles. Du coup je pousse le 7 qui s'imposait en 8, militant. Oui, on a le droit de revisiter les comics des années 70.