Voilà, le contenu de ce livre tient en une phrase.
J'espérais que ce serait beaucoup de choses vues sur l'enfance de Sfar en tant que Juif niçois, fils d'un avocat pied noir qui devint une figure politique locale honnie de l'extrême-droite.
Hélas il y a beaucoup de nombrilisme. Sfar fait des va-et-vient entre présent et passé pour nous parler de son covid, de ses frustrations, avec un discours pessimiste en diable : je ne crois pas dans le recours à la violence, mais je ne crois pas non plus dans les institutions pour protéger les personnes, ni même dans la littérature pour rendre les gens meilleurs. Et il se met en scène, de manière assez pédante, en train de dialoguer avec des figures dont il dit qu'elles l'inspirent : Joseph Kessel, son père, Abba Kovmer. Et d'énumérer aussi, comme autant d'arguments d'autorité, les membres du tout-Paris avec qui il discute ou dont il garde des souvenirs : Yslaire, Wolinski etc...
Evidemment, les reconstructions de souvenir dramatisées, frappées au coin de bons mots, sont sujettes à caution, et évoquent davantage ce qu'on aurait aimé que le passé soit plutôt que ce qu'il fut vraiment. Et c'est ce qui fait que cet album, qui ne détaille même pas tant que ça ce que fut l'éducation religieuse d'un jeune Juif dans les années 1980, relève plus de la thérapie personnelle que du désir de partager quelque chose.
Ce qui me frappe, c'est que Sfar ne discourt plus guère qu'avec lui-même. Autrefois c'était un conteur. Maintenant c'est un essayiste, dont le message est somme toute amer et peu constructif. Triste.