La Vie de Palais
6.3
La Vie de Palais

BD franco-belge de Richard Malka et Catherine Meurisse (2014)

La présentation atypique de cet album révèle le projet des auteurs : instruire en amusant. En effet, l'oeuvre est à deux voix : de nombreuses pages (de gauche) narrent sans illustration les divers aspects de la vie d'avocat, leurs us, coutumes, problèmes et activités. Ces pages alternent avec une ou trois planches de bandes dessinées (Catherine Meurisse est aux crayons), qui racontent les mésaventures de Jessica Chaillette, avocate standard, en grossissant le trait pour mieux suggérer ses sentiments, ses émotions, ses ambitions et ses difficultés.

Les deux voix utilisent amplement l'humour pour faire passer des réalités juridiques pas forcément excitantes à la base. Richard Malka, le scénariste, est avocat, et sait de quoi il parle : il corrige le laxisme du vocabulaire relatif à la vie judiciaire, laxisme d'usage dans le grand public, oppose l'idéologie "sécuritaire-enfermante" à l'idéologie "laxiste-réinsérante", avec une nette préférence pour cette dernière, y a pas photo là-dessus; il présente les problèmes techniques, vestimentaires, quelques anecdotes piquantes, redéfinit la notion de harcèlement et ses abus populaciers, nous entretient du sens moral des avocats, de l'aide judiciaire, de la relation des prévenus avec l'avocat et le juge (relation souvent délirante, vu que les prévenus se font une idée du système judiciaire dans les feuilletons télévisés US...), des cabinets d'avocats, de la présomption d'innocence...

Catherine Meurisse ofre, en contrepoint, des planches dessinées aux traits et aux décors vite tracés, style dessins de presse, quelque part entre Claire Brétécher, Reiser, Gérard Lauzier, Jean-Jacques Sempé, voire Gerald Scarfe.

Jessica Chaillette est une brave fille surmenée, qui ne peut se détendre en soirée sans que quelqu'un lui demande des conseils juridiques, qui est payée au lance-pierres lors des commissions d'office ou des cas d'aide juridictionnelle, qui n'a pas envie d'avoir des gosses, trop occupée qu'elle est par son métier, qui a des problèmes pour contenter ses clients (même en gagnant les procès), qui est une femme (donc en contact avec des obsédés, et pas seulement les prévenus).

Un album à la fois drôle et instructif, même si on ne partage pas toutes les vues des auteurs sur la manière dont la Justice devrait fonctionner.
khorsabad
7
Écrit par

Créée

le 6 nov. 2014

Critique lue 400 fois

1 j'aime

khorsabad

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