J'avais délaissé le Punisher depuis un moment, mais la grosse déception qu'a été son incarnation dans la saison 2 de Daredevil m'a donné fortement envie de me replonger dans du bon Punisher. Celui des comics. Mais vers quoi se tourner quand on a lu tout l'excellent run de Garth Ennis (à part quelques histoires secondaires), qui a vraiment redéfini le personnage ?
J'avais testé Six hours to kill, un des premiers post-Ennis dont le pitch était intriguant. Et c'était vraiment inférieur.
Mais j'ai voulu donner sa chance à la nouvelle série Punisher MAX qui a suivi, qui semble plutôt appréciée.
Pour sa première histoire du Punisher, Jason Aaron se montre ambitieux, puisqu’il confronte Castle au Caïd. Je n’ai jamais lu jusque là d’histoire où le vigilante s’en prend au baron du crime, mais j’imagine qu’il a fallu trouver des raisons pour qu’ils co-existent, comme avec Daredevil. Dans Marvel Zombies vs Army of darkness, je voyais Castle simplement aller retrouver Wilson Fisk, et lui tirer une balle dans la tête. Et je me demandais simplement "pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt ?".
Et le pitch est plus ambitieux encore puisque l’auteur remanie la genèse du Caïd.
Plusieurs familles mafieuses se réunissent et, comme plusieurs fois déjà, veulent se débarrasser du Punisher une bonne fois pour toute. Et en attendant la venue d’un assassin qui pourra se mesurer à lui, ils cherchent à détourner d’eux l’attention du vigilante en le faisant courir après un boss des boss créé de toutes pièces. Le Kingpin.
Et c’est Wilson Fisk, garde du corps à la vie jusque là modeste, qui doit endosser le rôle.
On nous donne d’abord de lui l’image d’un homme de main imposant physiquement et très violent, pour laisser voir ensuite quelqu’un de beaucoup plus malin qu’on ne le pense, qui tire véritablement les ficelles.
C’est intelligent de jouer là-dessus, et on entrevoit déjà le Caïd tel qu’on le connaît, dont la sournoiserie repose sur les apparences.
Fisk a toutefois déjà été en prison, et a déjà fait de quoi se donner une réputation de dure à cuire. Il n’est pas infaillible, il a eu ses échecs, mais on voit qu’il est coriace et persévérant.
Ce que je trouve dommage par contre, c’est qu’on n’exploite pas mieux sa famille, dont il n’évoque l’affection pour eux que peu avant qu’ils ne soient en danger.
Fisk est le véritable personnage principal de cette histoire, et le Punisher est relégué au second plan. Mais il y a, dans le peu qu’on voit de lui, un moment qui renforce encore plus sa caractérisation. Un moment où il lutte pour sa vie, mais pour une unique raison : continuer à mener son combat, continuer à tuer. Et Jason Aaron suggère intelligemment qu’il a oublié les raisons de cette lutte.
L’auteur arrive aussi assez bien à injecter au milieu des situations sérieuses un humour grinçant, parfois bien trash et inventif.
Il y a un sens de l’absurde qui rappelle un peu les premiers Ennis ; par exemple il y a un tueur mennonite (c’est proche des amishs), qui ne se permet d’utiliser que des outils autorisés par sa religion.
En revanche, l’humour cède parfois à la vulgarité facile ; voir une vieille dire balls, fuck, … c’est considéré comme drôle.
Mais ce qui me plaît le moins dans cet album, c’est le dessin de Steve Dillon. C’est un illustrateur prolifique, que je retrouve souvent, mais je trouve généralement son style trop lisse. Dans les comics du Punisher, je préfère tellement les traits bruts, torturés, avec ces ombres et détails qui abiment les visages, ajoutent une noirceur au récit.
Dillon convient davantage aux histoires au ton plus léger, mais là justement il essaye de créer des ombres, il fait appel à cet effet très classique où les yeux du Punisher son obscurcis pour faire ressembler son visage à un crâne, mais ça ne marche vraiment pas avec son style.
Cet album est une bonne surprise malgré tout, et j’espère que ça reste au moins aussi bon dans les suivants de Jason Aaron.