Depuis plus de 20 ans, un nouveau pionnier de la bande dessinée chamboule les codes du neuvième art avec subtilité et humour : Marc-Antoine Mathieu. Sa série "Julius Corentin Acquefacques, prisonnier des rêves" se retrouve donc avec un concept novateur différent dans chaque épisode, mais avec le même personnage principal. Après 9 ans sans nouvel opus le sixième album de cette série est donc sortie l'année dernière : Le décalage. Mais l'imprimeur l'aurait-il mal assemblée ? Non, parce que la couverture est visiblement numérotée comme la septième page...
Scénario : Imaginez que le personnage principal d'une histoire, ici notre fameux Julius, disparaisse dés les premières pages et devienne invisible aux yeux de tous. Dès lors, les personnages secondaires, qui étaient censés aider Julius dans sa nouvelle aventure, vont devoir partir à sa recherche dans le Rien. S'ensuit une flopée de rebondissements surréalistes et de situations cocasses, le tout saupoudré d'humour. Du pur Marc-Antoine Mathieu, en somme.
Dessin : Un noir et blanc d'une élégance rare, avec des personnages aux visages réellement atypiques. D'ailleurs, si les décors sont souvent vides, c'est pour mieux servir le récit et donner une sensation d'oppression lorsqu'ils sont omniprésents. Bien vu.
Pour : Mathieu n'oublie pas de renouveler le concept en cours d'album avec quelques idées géniales, comme l'édifice géant se révélant être une case de BD ou un concept déjà expérimenté auparavant mais toujours aussi efficace : celui des bulles superposables pour en créer d'autres. Si vous n'avez pas compris, lisez l'album.
Contre : Un ou deux passages un peu longuets, où l'on a l'impression que l'intrigue fait du sur-place. C'est sûrement voulu, mais tout de même un peu gênant.
Pour conclure : À force de s'affranchir des limites du récit en bande dessinée, on pourrait craindre que le travail de Marc-Antoine Mathieu ne trouve ses limites. Mais il n'en est rien, et ce dernier finit toujours par nous surprendre au moment où l'on s'y attend le moins.