Le septième album de Spirou et Fantasio est une réussite totale qui démontre qu'André Franquin maîtrise complètement son univers désormais.
Le casting de Le Dictateur et le Champignon est constitué de bon nombre des personnages introduits dans des album précédent, ce qui permet de donner à l'ensemble des albums à travers cette continuité une cohérence interne, une mythologie à l'univers.
On y retrouve le comte de Champignac, le marsupilami, Secotine, et Zantafio en grand méchant de l'histoire.
Les caractères de chaque protagoniste s'affirment de plus en plus. Fantasio s'emporte vite et crie fort, Champignac se confirme dans son rôle de savant lunaire et inventif ne réfléchissant pas aux conséquences de ses inventions, mais néanmoins tourné résolument vers une science humaniste , le caractère du marsupilami s'affirme et démontre son côté farceur autant que ses colères noires, et même Spirou devient autre chose que le gentil boyscout de service.
Le début de l'album est un enchainement sans faille de gags visuels très réussis dans lesquels on sent que Franquin se fait plaisir en semant le chaos dans l'univers trop sage du village de Champignac. Ce Chaos provoqué par le marsupilami et le metomol ressemble d'ailleurs dans sa construction aux futurs gags qu'on trouvera chez Gaston. Franquin s'amuse avec les déformations du métal sous l'effet du metomol de Champignac et en profite pour démonter les discours politiques creux avec une illustration visuelle saisissante.
La seconde partie de l'album qui en constitue le cœur sera une vengeance symbolique à l'encontre de ce que Franquin déteste, et on le sentirait presque énervé, voire un poil sadique comme dans ses futures Idées Noires par moment. Il y flingue les révolutionnaires de pacotilles uniquement assoiffé de pouvoir, et la guerre imbécile toujours déclenchée sous des prétextes fallacieux.
André prendra un malin plaisir à exprimer son profond pacifisme en faisant fondre, voire à exploser toutes les armes semant la destruction à grand coups de crayons, qu'on imagine rageurs.
La qualité du dessin de Franquin n'est plus à vanter, et on se plait à regarder en détail chaque planche et chaque case avec rien de moins que de l'admiration, ainsi qu'un sourire permanent accroché au coin des lèvres.
Tout cela fait de Le Dictateur et le Champignon un des cinq meilleurs albums des aventures de Spirou et Fantasio de l'ère Franquin, et un régal qu'on peut lire et relire sans jamais s'en lasser.