Dieu a dit "Tu éviteras de faire chier un type qui braque du calibre 44 sur toi".

La vie d'un croque-mort dans l'Amérique de l'ouest n'est pas toujours facile. Malgré la croissance constante du marché, côtoyer les morts vous éloigne peu à peu des préoccupations des vivants. Pire, devenir croque-mort c'est comme se maudire soi-même et mettre fin à toute possibilité de nouer des relations avec les autres. Ça tombe bien, Jonas Crow ne cherche pas à se faire des amis et aime sa solitude. Depuis un petit bout de temps, Il sillonne l’Amérique de l'ouest à bord de son corbillard à la recherche de cadavres à enterrer...et en cette période propice à la fièvre de l'or, les cadavres sont légion.
Mais voilà qu'après avoir répondu à une annonce d'un certain Joe Cusco, Jonas se retrouve mêler à une affaire délicate dont il s'en serait bien passé.

Les amateurs de whisky et de l’Amérique sauvage sont aux anges.
Après une très longue période de disette, le western revient en force sur la scène franco-belge. Que ce soit à travers d'excellents one-shot comme "Buffalo Runner" ou "Rouge comme la neige" ou de nouvelles séries comme "Frenchman" et "Texas Cowboy", le western renaît enfin de ses cendres pour nous proposer des histoires de qualité.
Undertaker, la nouvelle collaboration de Xavier Dorison et Ralph Meyer après le sympathique Asgard, nous offre une histoire de western classique, mais à l'efficacité redoutable.

Dans cette histoire, se déroulant au cœur de l'anarchique XIXe américain, nous suivons donc les pas d'un croque-mort du nom de Jonas Crow, une sorte de Blueberry cynique et désabusé, toujours flanqué de son vautour de compagnie, qui à une faucheuse tendance à collecter les problèmes.
Un personnage classique mais nuancé qui derrière une carapace de misanthrope sans scrupules cache un esprit légèrement humaniste (pas trop non plus). L’intérêt principal de la bd réside dans ce personnage singulier aux répliques cinglantes et aux sermons religieux originaux. Si sa psychologie reste peu développée et sa caractérisation quelque peu conventionnelle, cela n’empêche pas de rendre le personnage attachant et charismatique.

Les autres personnages sont également plutôt bons avec une femme du nom de Rose ayant un passif obscur et une volonté inébranlable, un shérif aux allures de gangster, un femme de chambre asiatique à tendance sociopathe et des mineurs sans le sous en pleine révolte populaire. Parmi tous ces personnages, difficile de trouver un réel méchant autre que le mort du début de l'aventure : Joe Cusco.
En effet, ce dernier est mort en avalant son or et a contraint son employé, Rose, de l'enterrer aux coordonnées indiquées sinon il fera tuer un homme.
La situation cataclysmique découle entièrement de ses choix et il est difficile d'en vouloir aux mineurs qui se sentent négligés par leur ancien employeur.
Cusco, même mort, incarne à lui seul toute la cruauté et l'injustice de l'ouest américain. Il incarne un rêvé de conquête, de fortune et de gloire qui s'est muté en cauchemar des plus malveillants. Undertaker parle de la soif de l'or et de la corruption de la morale par ce dernier. Et quoi de mieux qu'un ancien prospecteur solitaire devenu un chef d'entreprise monstrueux égocentrique et amoral pour parler de ça ?
Faire d'un mort, l'antagoniste principal du récit est un choix assez culotté mais cela marche plutôt bien.

Pour la partie graphique, Ralph Meyer s'inspire clairement du travail de Giraud sur Blueberry. Un style poussiéreux, sale mais agréable à l’œil et aux personnages à la dégaine dynamique. Ralph Meyer se distingue néanmoins grâce à son style épuré et fluide et ses personnages aux visages incroyablement vivants.
La mise en scène, quasi-cinématographique ne souffre d’aucun défaut et la colorisation est parfaite avec une très bonne gestion des ombres.

Si un mot devait résumer Undertaker ce serait classique.
Le nouveau bébé de Xavier Dorison et Ralph Meyer ne fait pas dans l'originalité : les codes du western sont respectés (quoique détournés à certains moments), l'intrigue s'avère plutôt simple et l'atmosphère s'inspire largement d'un Blueberry qui lui-même s'inspirait du cinéma des années 50-60. Mais voilà : classique n'est pas nécessairement synonyme de mauvais.
Avec ses personnages aux caractères délectables, ses dialogues biens écrits, son dessin de qualité, sa mise en scène exemplaire et son rythme soutenu, Undertaker se révèle être un vibrant hommage au monde du western tout en étant une nouvelle série d'aventure et d'action extrêmement prometteuse sur le long terme.

Pas un coup de cœur mais presque !!! Vivement le tome 2 !
Asarkias
8
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le 17 mars 2015

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Asarkias

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