Warcraft, l’une des licences les plus juteuses du monde du jeu vidéo a enfin le droit à son adaptation au cinéma après des années d’errances, d’espoirs brisés et de fantasmes entretenus par une attente des plus palpables. Une arlésienne légendaire qui se matérialise comme par magie devant nos yeux.
Avant de commencer, il faut l’avouer, je ne suis pas un grand amateur de la série Warcraft.
Je baigne depuis longtemps dans la culture de l’imaginaire mais je n’ai jamais été vraiment attiré par cet univers, lui préférant en terme d’ambiance et d’esthétique celui de Warhammer (le grand perdant de la guerre).
Pourtant j’attendais ce film. Tout d’abord parce que j’apprécie le réalisateur Duncan Jones et après ses fantastiques Moon et Source Code, j'avais hâte de le voir ouvrer sur une grosse production.
Ensuite parce que la fantasy au cinéma est un peu morte depuis Le Seigneur Des Anneaux et l'arrivée d'un tel film pouvait potentiellement relancer le genre au sein d'une industrie Hollywoodienne gangrenée par les super-héros.
Et enfin car je suis un passionné de jeu vidéo et que Warcraft pouvait se révélé être le premier film réussi et un minimum ambitieux issu du monde vidéoludique, comme un moyen de montrer au grand public, que le jeu est tout à fait capable de créer des univers vastes et cohérents au même titre qu'un livre.
Sauf que le film n’a finalement répondu à aucune de mes attentes ni même aux plus basiques (passer un bon moment).
Warcraft dépeint le premier conflit entre les peuplades humaines d’Azeroth et la Horde Orc issue d’un autre monde. Nous avons donc théoriquement affaire à un film de guerre, un film barbare et sauvage où les gentils humains blanc et soyeux de Hurlevent vont se faire défenestrés à la chaine par la terrible menace des orcs.
Sur le papier, le film s’annonçait épique en plus d’être original avec la confrontation des points de vue de chaque faction. Dans les faits, le film peine à captiver, que ce soit par son scénario, ses personnages, sa technique ou sa mise en scène.
Pour commencer, la narration est décousue, le rythme est ambivalent et l'ensemble souffre clairement de variations de ton trop marquées.
On passe régulièrement d’une situation critique à une petite conversation comique d’un instant à l’autre sans aucun temps-mort.
Ces changements de points de vue soudains peinent à offrir au film une certaine homogénéité dans sa structure.
Du coup, les enjeux sont constamment désamorcés par le montage et le changement de contexte entre chaque transition se fait avec violence. Globalement, le film est monté avec les pieds et n’est absolument pas fluide. Je ne parle même pas de l’omniprésence des ellipses qui nous empêche d’avoir un petit moment de répit, de détente un minimum contemplatif pour profiter de la richesse du monde d'Azeroth.
Ce rythme très étrange entre lenteur et chiantise se greffe à un scénario des moins palpitants où L’aspect guerrier du conflit est totalement éclipsé par celui de la négociation et des relations entre personnages. Habituellement je n’ai rien contre mais le problème, c’est que dans ce cas de figure, ce n’est pas bon.
Les dialogues sont creux, insipides et écrits à la truelle, la caractérisation des personnages est mauvaise pour ne pas dire pitoyable.
Entre le Roi sorti d'une publicité colgate, le magicien stagiaire aux compétences très fluctuantes, Ragnar Lothbrock en mode cheveux long et orcophile déviant et les orcs eux-mêmes pas fichus de savoir ce qu’ils veulent pendant plus de 15 secondes…la galerie de personnages se paye le luxe d’être affligeante de banalité en plus de manquer cruellement de dimension et surtout, de caractère ! Pendant tout le film j'avais cette désagréable impression de voir que les personnages n'étaient que des figurants incapables de présenter le moindre relief.
Les psychologies sont généralement mal travaillées avec des retournements de veste WTF, des amitiés qui se forgent en 2 jours et une romance aberrante qui n’apporte absolument rien au film. Le fait de voir une belle brochette d’acteurs en mode « pilote automatique » n’aide pas non plus.
L’intrigue en elle-même est Cousue de fil blanc, avec des péripéties médiocres et sans originalités et une exploitation du lore de l’univers indigente qui ne fait pas honneur au travail de Blizzard.*
Hurlevent ? Elle se résume au palais et aux cahots. La région ? Une parcelle de forêt et deux-trois villages.
N’espérez pas que l'on vous explique les tenants et aboutissants de l'univers car tout est survolé, rien n’a de profondeur et de ce fait, il s’en dégage un aspect « factice » envahissant.
En parlant de factice l’aspect graphique est raté.
Concrètement j’ai la désagréable sensation d’avoir été passé à tabac visuellement pendant plus de 2 heures. Oui les orcs sont plutôt bien fait mais en dehors de cette belle performance, le film souffre d’un trop-plein d’effet visuels, chaque scène du film suinte et dégouline de CGI et ce n’est ni joli, ni agréable à regarder.
Les incrustations sont mal faites, les couleurs sont criardes et à de nombreuses reprises j’avais la désagréable sensation de regarder une cinématique de jeux vidéo…ce qui n’est jamais bon signe pour un film.
Rajoutez à cela, une direction artistique fanatique qui respecte trop le matériau d’origine et vous avez un florilège d'armures et des épées en plastiques abominables, des zoreilles d’elfes à la finition cauchemardesque et des robes où le terme élégance a été banni à tout jamais.
Warcraft ne se démarque en rien.
incapable de se montrer comme un divertissement honnête, il accumule les poncifs et les erreurs de direction artistique à une vitesse ahurissante.
Oui, il est sans doute plaisant pour le fan de voir son univers prendre vie grâce à la magie du cinéma mais mis à part ça, il ne propose rien de très passionnant.
Pourtant les idées ne manquent pas : la confrontation entre les deux peuples, la notion de « survie » en temps de guerre médiévale, la corruption des idoles, mais le rythme est lent et plat, la réalisation fade et sans génie, le scénario paresseux, les personnages inconsistants et les enjeux effroyablement artificiels.
Un film médiocre, autant sur le fond que sur la forme et c’est vraiment regrettable.