Narcissique
Ce tome fait suite à Black Science Tome 4 (épisodes 17 à 21) qu'il faut avoir lu avant. Il faut impérativement avoir commencé par le premier tome de cette série qui en compte 9. Il comprend les...
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le 26 sept. 2019
Comics de Rick Remender, Matteo Scalera et Moreno Dinisio (2016)
Ce tome fait suite à Black Science Tome 4 (épisodes 17 à 21) qu'il faut avoir lu avant. Il faut impérativement avoir commencé par le premier tome de cette série qui en compte 9. Il comprend les épisodes 22 à 25, initialement parus en 2016, écrits par Rick Remender, dessinés et encrés par Matteo Scalera et mis en couleurs par Moreno Dinisio. Il comprend les couvertures originales de Scalera ainsi que 2 pages encrées, avant la mise en couleur.
Sur une autre Terre, pour la première fois depuis un millénaire, les 3 éternides sont réunies pour former l'omnimide, dévoreuse de ténèbres. Grâce à l'assemblage de ce symbole, les 3 clans de Tarana vont pouvoir mettre un terme à des éons de guerre et de division. La princesse Tia est remerciée par Vontta qui estime que c'est grâce à elle que les éternides ont pu être retrouvées et réunies. Il se produit soudainement un grand éclat de lumière, et un vaisseau percute les 3 éternides, les détruisant irrémédiablement. Alors que Vontta constate la perte des pierres, Grant McKay émerge du vaisseau, se disant qu'il faudra qu'il maîtrise mieux l'atterrissage pour la prochaine fois. Kor, un garde royal, attaque McKay et le maîtrise rapidement, tout en se mettant à l'étrangler. La princesse Pia intervient, et Grant McKay est conduit dans un cachot. Pia échange alors quelques mots avec son père, lui expliquant ce qu'il vient de causer : la reprise probable des hostilités entre les 3 clans, réduisant ainsi à néant des années de patientes négociations.
Pendant que Grant McKay se rend compte qu'il va devoir s'expliquer de cette destruction avec les autres prisonniers partageant sa cellule, Tia McKay explique au prince Kor qui est Grant McKay. Elle en dresse un portrait peu flatteur : un individu égoïste, chérissant son adolescence, bourreau de travail à la limite de la dépendance, un père qui ne s'est pas occupé de sa famille, un narcissique au dernier degré. Kor accepte ses explications, tout en indiquant que son père devra s'expliquer lors du banquet prévu le soir même et que le sort des clans de Tarana repose entièrement sur son caractère. Tia n'est pas optimiste. Le soir venu, le prince Kor accueille les différentes délégations dont Morosa, la reine des Montagnes Rouges, personnalité très susceptible. Au cours du repas, Grant McKay fait son entrée et est placé à côté de la reine Morosa. Par mégarde, il boit dans son verre, une liqueur peut-être puissante. Ça ne rate pas : quand vient son tour de parler, il est pompette, et sort des phrases peu diplomates. Il finit par renverser le verre de Morosa dans son décolleté, qu'il essaye ensuite d'essuyer en manipulant son opulente poitrine de manière très cavalière. Après cette série de faux-pas, il prend la décision d'aller chercher par lui-même le cœur Bœuf, détenu par Doxta, la sorcière maudite, seul symbole capable de faire revenir les délégués autour de la table des négociations.
En entamant ce tome, le lecteur sait qu'il part avec une longueur d'avance, lui permettant d'anticiper pour partie ce qui va se passer : Grant Mckay continue de se rendre d'un monde à l'autre pour retrouver les membres de son équipe qui ont été éparpillés par le dernier déclenchement du Pilier. Il se rend également compte qu'il connait tous les principaux personnages et qu'il n'a qu'à faire connaissance avec 2 nouveaux sur le monde de Tarana. Comme d'habitude, Matteo Scalera donne aux personnages une apparence marquée : la reine Morosa avec sa peau violette et sa poitrine gonflée à l'hélium, le prince Kor avec sa peau verte et ses cheveux argentés. Les difficultés initiales pour se retrouver dans la distribution initiale sont derrière lui, et il reconnait avec la même aisance les autres personnages déjà rencontrés, attestant à nouveau de la capacité de l'artiste à leur donner une personnalité visuelle mémorable. Effectivement le début de ce tome correspond au séjour sur une autre planète, et aux retrouvailles avec Pia, la fille de Grant McKay, qui semble avoir bien supporté la séparation forcée, et même trouvé une place dans cette société, où elle apporte quelque chose, qu'elle participe à améliorer. Comme dans la première moitié du tome précédent, le tome débute par un approfondissement de la personnalité de Grant McKay.
Il ne s'agit pas pour Grant McKay de s'allonger sur un divan et de se confier, ou pour un personnage de le faire parler et d'analyser ses propos. Les auteurs ont conservé la même forme pour leur récit, c’est-à-dire une aventure haute en couleurs dans une branche de la science-fiction. Grant McKay se retrouve sur une planète exotique. Matteo Scalera montre les 3 pyramides (éternides) qui s'assemblent pour former un symbole, l'urbanisme de la place qui accueille la foule venue assister à la réunion des éternides, les caractéristiques des 2 races humanoïdes, ainsi que leurs tenues, la table du banquet avec ses mets et ses boissons, l'aménagement de la chambre de princesse de Pia, la cabane de la sympathique paysanne au milieu de la forêt, les différentes tenues de Pia, etc. De son côté le scénariste a concocté une quête (retrouver le cœur Bœuf détenu par une sorcière), comme une sorte de conte. Le lecteur découvre bien une histoire divertissante, avec des réactions amusantes de Grant McKay qui gaffe régulièrement, tout aussi amusantes de Pia McKay qui fait montre d'un caractère bien trempé, et d'une forme de résignation quant au fait que les interventions de son père ne font qu'empirer la situation. Il s'agit vraiment d'un conte dans lequel le caractère des uns et des autres est éprouvé par le biais de situations fantastiques.
Son père ayant surgi de nulle part, Pia McKay se retrouve tout naturellement à expliquer au prince Kor, son fiancé, d'où vient son père, et quel genre d'individu il est. Elle le dépeint à partir de son expérience personnelle, de sa position de fille. Elle a vu un individu qui se réfugie dans le travail au point de négliger sa famille et ses enfants. Elle a fait l'expérience de son absence, voyant un individu entièrement absorbé par ses objectifs, incapable de faire preuve d'attention pour ses proches, comme s'ils n'étaient que des seconds rôles, ou plutôt des figurants sans importance dans sa vie, sans réelle personnalité. Or après les épreuves vécues dans le tome précédent, Grant McKay n'a plus qu'une seule idée en tête : laisser les mondes qu'il visite en meilleur état que quand il y est arrivé, leur apporter quelque chose de positif, pour espérer mériter une rédemption. Le scénariste fait en sorte de montrer que cette volonté l'amène à agir de manière égoïste, par exemple en mettant en danger le cheval qu'il a volé au prince Kor. Sa fille le rattrape sur le chemin et le met devant les faits : il n'a aucun espoir de parvenir à récupérer le cœur Bœuf par lui-même, étant moins puissant que le prince Kor. Elle fait apparaître que son comportement est à la fois irresponsable et puéril : ce n'est pas parce qu'il a un pistolet laser qu'il s'en sortira mieux face à la sorcière et il n'a même pas songé aux conséquences d'une éventuelle défaite, aux conséquences de sa mort. À nouveau il se conduit égoïstement, mettant en danger sa vie, celle de son cheval, sans réfléchir. Cette discussion ne dure qu'une page, et bénéficie d'une mise en scène vivante, au milieu de la cabane de la paysanne, le dessinateur continuant de représenter son aménagement en fond de case.
Toutes les bonnes choses ont une fin et les mauvaises aussi (parfois) et Grant McKay ayant été au bout de son action, ayant payé le prix de ses actes, il vient le temps pour lui de repartir vers une autre destination. Rick Remender surprend le lecteur en emmenant dans son récit dans une direction qu'il n'avait pas prévue comme arrivant aussi rapidement. Pour autant, il comprend tout de suite les enjeux et les difficultés. À nouveau, Matteo Scalera est en pleine forme, et s'investit pour représenter les différents environnements tout du long, sans se reposer sur Moreno Dinisio pour remplir les fonds de case. Ce dernier commence à trouver son propre équilibre, se différenciant d'une mise en couleurs à la Dean White en moins bien, en particulier en se montrant plus minutieux. Le lecteur en a plusieurs exemples dans ces épisodes. C'est patent pour une vue d'extérieur d'une villa surplombant la ville, avec une mise en couleurs précise, faisant ressortir chaque surface, tout en présentant une cohérence chromatique. Ce deuxième mouvement du tome s'avère tout aussi riche en rebondissement que le premier, même s'il n'a pas la forme d'un conte. Le lecteur retrouve des personnages de tomes précédents, et voit se dessiner une autre utilisation du Pilier pour un objectif dont les risques sont visiblement sans commune mesure avec ceux générés par l'utilisation qu'en fait Grant McKay. Dans le même temps, le suspense psychologique ne faiblit pas. Pia McKay doit à nouveau se positionner par rapport aux actions de son père, mais dans un contexte très différent. La problématique des liens familiaux est à nouveau explorée, là aussi dans une configuration différente. Un autre des principaux personnages encore vivants doit lui aussi reconsidérer son positionnement par rapport à Grant McKay et agir en conséquence, pas vraiment de la manière dont l'anticipait le lecteur.
Rick Remender, Matteo Scalera et Moreno Dinisio sont dans une forme éblouissante pour la suite des mésaventures (et le mot est faible) de Grant McKay. Le scénariste martyrise son personnage, montrant ses failles et ses faiblesses, ainsi que ses défauts et ses tares, en tirant la première moitié du récit vers un conte, et la deuxième vers un mélodrame. Matteo Scalera a disposé du temps nécessaire pour soigner ses planches, à la fois sur le plan des descriptions, à la fois pour les séquences d'action. Moreno Dinisio a trouvé la bonne manière de complémenter les dessins à sa façon. Le tout se lit d'une traite avec facilité, pour un divertissement de haut vol et un drame poignant.
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le 26 sept. 2019
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