Edgar P. Jacob nous servit huit histoires en trente-et-un ans. Depuis que des financiers ont repris les choses en main, les tacherons de service ont livré dix aventures en dix ans, de là à penser que Monsieur Jacob se la coulait douce. Le gain en quantité se solda d’un affaissement de la qualité. Le cahier des charges imposait un dessin d’un classicisme tout britannique. Mais, s’il est aisé de recruter des dessinateurs sur concours, il est plus difficile de dénicher des scénaristes de talent, bridés par l’obligation de se fonder dans la trame originelle.
André Juillard fait le job, ses personnages manquent de souplesse, mais les découpages sont dynamiques, les décors et les jeux de lumière soignés. Le scénario d’Yves Sente renoue habilement avec la gentry britannique découverte dans le (plus faible) Serment des cinq lords. Il n’est question que de lord, conte et marquis, de généalogie, d’ancêtres et d’honneur. Ces hauts et puissants seigneurs dédaignent l’agent, mais vivent comme des milords.
Blake retenu à Londres, l’affaire repose sur les solides épaules de Mortimer. Oubliez le fantastique et la science-fiction, Sente a puisé son inspiration dans Agatha Christie et Shakespeare. Notre professeur ayant perdu son latin, le mérite de la résolution de l’énigme reviendra à la délicieuse Elisabeth McKenzie, fille de sa vieille amie Sarah Summerton. Le bougon Mortimer se découvre paternel. Les temps changent. Tout sauf Olrik, toujours fidèle au poste, mais dans un rôle nouveau et bienvenu.
Que penser de cet album ? Si vous adorez Blake et Mortimer (même sans Blake) ou si vous appréciez les énigmes et les chasses au trésor, foncez. Sinon, passez outre.