Palme d'or de l'orignialité !
1971. Vic Vidéo et Pol Pitron, tous deux techniciens pour une chaîne TV, aperçoivent une ombre qui s’introduit de nuit sur un chantier désert. Cambriolage ? Voilà que Yoko Tsuno fait irruption dans la vie des deux compères. Avec cette électronicienne japonaise, ils s’embarquent pour un reportage en spéléologie vers les nappes phréatiques ... jusqu’à débouler dans le monde caché des Vinéens.
Le Trio de l’Etrange, c’est avant tout un album remarquablement bien ficelé : l’héroïne n’apparaît pas à la première case, elle n’est révélée qu’au bout de plusieurs pages. D’abord membre secondaire du trio, Yoko s’affirme au fil des péripéties comme un personnage essentiel, jusqu’à terminer l’aventure seule. Pour l’anecdote, c’est exactement le même cheminement qu’avait suivi Roger Leloup au moment de créer la série : prévoyant d’abord un trio de personnages principaux, il finit par s’attacher à Yoko à un tel point qu’il lui donna la priorité, et baptisa l’album du nom de la jeune héroïne.
Mais le succès de Yoko Tsuno, c’est surtout cet univers foisonnant et complexe : Vinéa, la planète perdue, et ses rescapés. Vaisseaux à propulsion magnétique, rayon calorique et super-ordinateur occupant toute une caverne : cet univers fleure bon le futur tel qu’on l’imaginait il y a quelques décennies ! Les décors de Roger Leloup sont captivants et très travaillés, le temps leur a d’ailleurs donné un surplus de charme. Khâny, Poky, et tous ces êtres bleus, deviendront l’un des piliers de la saga Yoko Tsuno, à une époque où les extraterrestres sont encore assez rares dans la fiction.
Premier album oblige, il y a des hésitations. Roger Leloup s’était aguerri pour dessiner les décors en travaillant dans l’ombre de Hergé (les trains et les avions dans Tintin, c’est lui !), mais ses personnages sont un peu moins assurés. Pourtant Yoko a déjà tout son caractère bien trempé, et Vic et Pol ont également une personnalité bien travaillée. On regrettera une ou deux petites facilités de narration, comme lorsque Yoko empêche le super-ordinateur d’accéder à son esprit grâce ... au yoga.
Des héros attachants, un univers fouillé, des décors somptueux : à l’inverse de pas mal de BD, Yoko Tsuno part tout de suite du bon pied !