Comme dans le Tome 1, le souci pédagogique de décrire les horreurs infligées aux Juifs pendant la Deuxième Guerre Mondiale prévaut abusivement sur le charme de l'intrigue et la valorisation des éléments fictifs. Simon, petit Juif persécuté, connaît toujours la fuite, le dénuement; il tombe par hasard sur un micro-groupe de résistants, participe à des actes de résistance, finit par se faire pincer et envoyer à Auschwitz, rien de moins. Dans ce cadre, on pouvait craindre une explosion horrifiante d'atrocités en tout genre, mais les auteurs ont le bon goût de ne pas trop en rajouter, tout en présentant certains aspects de cette machine de mort physique et mentale : trains bondés, sans chauffage, sans nourriture, sans boisson, pyjama à rayures perpétuel, la faim, la maladie, les pendaisons à tout propos, les dortoirs-étagères, l'infirmerie-piège, les exécutions sommaires...


Le goût de Simon pour les oiseaux, toujours aussi mal expliqué et mal mis en scène, est ressenti par le lecteur comme un artifice plaqué sur le récit pour conférer quelque personnalité au jeune héros. En effet, son amour pour les volatiles est supposé lui servir dans plusieurs circonstances : aider les résistants (par pigeons voyageurs), échapper à un sort trop dur à Auschwitz (en chouchoutant les rapaces de la volière d'un gradé nazi). Les apparitions de la "Dame Blanche" (chouette effraie censée porter malheur et prédire l'avenir) sont toujours aussi dénuées d'intérêt; les prédictions de l'oiseau sont de simples redondances des malheurs déjà vécus par Simon.


Même Ada, la petite fille russe connue dans le train pour Auschwitz - et appelée à prendre une grande place dans la vie de Simon - n'échange avec Simon que le strict minimum de paroles et de gestes pour donner à penser à un sentiment naissant : le petit couple est immédiatement disjoint à l'arrivée, ne communique plus pendant au moins deux ans, et voilà, on les retrouve à la fin... Tout ceci est assez sec et ne suggère nulle part ce trouble délicieux qui préside au rapprochement amoureux.


Par ailleurs, si Simon, malgré son âge, est tiré d'affaire par un copain qui prétend que Simon a plus de seize ans (ce qui le case dans la fournée des travailleurs, et non pas dans celle des bouches inutiles voués à une exécution rapide), Ada, qui visiblement n'a bénéficié de cette astuce, et qui n'a certes pas encore seize ans, s'en tire quand même dans ce septième cercle de l'enfer, on ne comprend pas comment...


Les couleurs et les lumières, presque toujours cassées, assombries, crépusculaires ou nocturnes, rajoutent de la tristesse à l'ensemble du récit.


Tout cela manque de séduction, parfois un peu de logique. Il reste la valeur documentaire, pour ceux qui se laisseraient guider jusqu'au bout de cette nuit.

khorsabad
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le 20 juin 2015

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