Nous ne présentons plus Howard Philips Lovecraft et son Mythe de Cthulhu, pierre angulaire d’une œuvre ayant durablement influencé le genre horrifique. Pas loin d’un siècle plus tard, Gou Tanabe découvrait les écrits de l’auteur américain à la faveur d’une « passe difficile », la nature dépressive des nouvelles y faisant diablement écho : depuis lors, le mangaka s’est essayé au délicat exercice de l’adaptation, dont la plus emblématique serait l’inévitable L’Appel de Cthulhu.


Faute d’avoir lu le bouquin originel, le manga devait ainsi supporter le poids de la découverte, quoique nos attentes fussent davantage curieuses que grandes. Précédé de son immense réputation, L’Appel de Cthulhu en paie fatalement une surprise moindre, mais là n’est pas vraiment la question : de fait, le caractère anti-spectaculaire du récit, du moins dans l’essentiel de sa construction patiente, sert avant tout une atmosphère poisseuse et un grand final doublement crispant.


Nous y suivons de fait Francis Wayland Thurston, lequel s’improvise détective à la suite du trépas douteux de son grand-oncle : en rassemblant les pièces d’un puzzle épars, l’anthropologue va mettre au jour, comme ses malheureux prédécesseurs, l’existence du culte de Cthulhu. Gou Tanabe semblant reprendre scrupuleusement la trame de la nouvelle, c’est néanmoins du côté de la mise en forme que le challenge se posait : récit d’ambiances et horreurs de bon aloi, comment retranscrire graphiquement l’indicible ?


Ici, le trait du mangaka nous enjoint à l’éloge comme à la réticence : d’un côté, son style austère et froid colle à merveille à l’imagerie de L’Appel de Cthulhu, et il faut bien reconnaître que le bougre sait y faire pour illustrer l’innommable, l’improbable et l’épouvantable. De l’autre, les différents protagonistes ne sont guère différenciables, la raideur du trait les desservant au même titre qu’elle exacerbe une terreur grimpante. Bilan contrasté donc !


Pour autant, l’essentiel est assuré : L’Appel de Cthulhu compose une lecture suffisamment déstabilisante, nimbée d’un respect patent pour son illustre modèle.


NiERONiMO
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le 27 août 2022

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