Guerre asymétrique
Ce tome fait suite à DMZ tome 6 (épisodes 29 à 34) qu'il vaut mieux avoir lu avant. Il comprend les épisodes 35 à 41, initialement parus en 2009, écrits par Brian Wood. Les couvertures ont été...
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le 22 août 2020
Ce tome fait suite à DMZ tome 6 (épisodes 29 à 34) qu'il vaut mieux avoir lu avant. Il comprend les épisodes 35 à 41, initialement parus en 2009, écrits par Brian Wood. Les couvertures ont été réalisées par John Paul Leon, la mise en couleurs par Jeromy Cox.
Épisodes 35 & 36 : dessins et encrage de Kristian Donaldson. Cette fois-ci, Matty Roth va effectuer un reportage sur Staten Island : il a pris place à bord d'un canot pneumatique militaire qui l'emmène de nuit sur l'île où est affectée une garnison de l'armée des États-Unis. À bord du canot, un soldat dirige l'embarcation, un autre a perdu connaissance et s'est vomi dessus. Le premier indique que le canot a été baptisé George W. Bush. Une fois débarqué à Staten Island, Roth se demande ce qu'il va y trouver : il s'agit en effet d'un territoire avec une forte concentration de soldats inexpérimentés et d'armes à feu. Il entend une sono de boîte de nuit : des soldats sont en train de s'éclater dans un bar avec un DJ. Il voit d'autres soldats en tenue décontractée, s'amuser à tirer en l'air, d'autres défoncés allongés par terre sur une couverture, d'autres faire l'amour, d'autres parier sur un match de combat à main nue. Que se passe-t-il sur Staten Island ?
Le scénariste continue de transposer des situations réelles de guerre, à l'environnement très particulier de cette guerre civile sur le sol américain, en plein Manhattan. Bien évidemment, il y a des troupes stationnées de part et d'autre de la zone démilitarisée, pour pouvoir intervenir au cas où, mais surtout pour pouvoir surveiller le camp militaire de l'autre armée. Wood a conçu une intrigue très surprenante : Matty Roth ne découvre pas du tout ce à quoi il s'attend. L'esprit de détente semble incompatible avec la mission prioritaire de surveiller l'ennemi. Qui plus est, il se produit un vol dans la base, d'un objet au fort potentiel de destruction. Du coup, l'ambiance change du tout au tout quand le commandant de la base décide de rétablir une discipline teintée de paranoïa. Donaldson avait déjà illustré les épisodes 11 & 20, le lecteur est donc déjà habitué aux particularités de ses dessins. Ceux-ci sont plus doux et moins détaillés que ceux de Burchielli, pour autant, il retranscrive bien les lieux, les comportements des soldats, l'irréalité de la situation initiale, la dangerosité du comportement imprévisible du commandant de la base. Le lecteur ressent bien la déstabilisation de Matty Roth, l'instabilité de la situation qui peut dégénérer d'un instant à l'autre. D'un côté, il s'agit d'une parenthèse dans l'intrigue globale : de l'autre c'est une illustration déconcertante de la manière dont des êtres humains peuvent trouver une plage de liberté et de bon sens là où il n'y en a aucune a priori.
Épisodes 37 à 40 : dessins et encrage de Riccardo Burchielli. Un taxi s'arrête à un point de contrôle pour accéder au nord de Manhattan. Le garde armé se montre tatillon, jusqu'à ce qu'il reconnaisse le passager : Matty Roth. Ce dernier est rentré chez lui il y a quelques jours pour s'apercevoir que Zee Hernandez est partie, en laissant ses armes à feu dans les toilettes. Parco Delgado a commencé à prendre son administration en main, et il a exigé le retrait de toutes les troupes armées de Manhattan, à commencer par les mercenaires de l'entreprise Trustwell. Zee Hernandez est sortie de la zone démilitarisée, juste avant que Delgado ne fasse fermer les frontières. Matty Roth n'est pas content : il n'arrive pas à avoir un rendez-vous avec Parco Delgado en personne, et il constate des brutalités policières perpétrées par le service d'ordre de Delgado. Ce dernier continue de louer les services de directrice de communication politique de Madeleine Mastro, la mère de Matty. Finalement, le rendez-vous a lieu : Delgado assure à Matty qu'il fait toujours partie de ses conseillers de premier rang. Il a une mission à lui confier : mettre la main sur l'or de Chinatown. Il sait que Matty entretient de bonnes relations avec Wilson, le chef de la triade qui gère ce quartier de Manhattan.
Retour à l'intrigue principale de la série : en fait le lecteur se rend compte que le scénariste a établi une continuité, un fil conducteur initié dans le tome précédent : le gouvernement provisoire avec l'élection de Parco Delgado. C'est du sérieux et Matty Roth voit l'occasion de continuer à faire un journalisme engagé, et plus seulement pour contrer ceux qui le manipulent et l'instrumentalisent. Dans le même temps, Wood sort du chapeau un McGuffin en provenance d'une histoire d'aventures du siècle passé : l'existence d'un trésor. Le lecteur n'est pas au bout de sa surprise, car l'auteur continue de plus belle avec deux rebondissements énormes. C'est vraiment surprenant et déstabilisant de se retrouver face à des rebondissements en provenance directe d'œuvres de divertissement, plutôt que de rester dans cette politique fiction si réaliste. D'un autre côté ça fonctionne bien parce que c'est en phase avec l'environnement de la série. Effectivement, cette idée d'un magot planqué quelque part est en phase avec des gardes de sécurité à la provenance douteuse, avec une cité dévastée, avec des énormes 4*4, avec un homme politique nouvellement élu qui a désespérément besoin de fonds pour faire vivre son mouvement. En fait une fois passé le moment de surprise, le lecteur se rend compte qu'il n'a pas besoin de faire un effort supplémentaire de suspension consentie de l'incrédulité : c'est cohérent avec le reste.
Le lecteur retrouve avec plaisir l'artiste en titre sur la série. Les personnages sont visuellement consistants. Matty Roth s'est laissé pousser la barbe et l'a conservée. Il a les traits du visage de plus en plus marqués, ce qui est cohérent avec les épreuves qu'il traverse et son investissement dans le maire, ce qui l'oblige à gérer un conflit psychique interne entre sa neutralité de journaliste, et son implication pour améliorer la situation des habitants de la zone démilitarisée. Parco Delgado reste un personnage doté d'un fort charisme, et d'une tenue vestimentaire originale. L'artiste s'amuse bien avec l'apparence de Wilson, en décalage avec la réalité de sa position dans Chinatown. Le commandant de la FSA est toujours aussi insupportable dans sa manière d'être, dans ses postures. C'est bien sûr un très grand plaisir de retrouver des personnages marquants du tome 1. Comme dans les tomes précédents, le personnage qui apparaît dans le plus de pages reste Manhattan elle-même. Le lecteur se retrouve à regarder le pont de Brooklyn par en-dessous dès la première page. Il regarde les façades d'immeubles que ce soit en marchant dans une rue, ou en les voyant à l'horizon depuis l'autre côté de la rivière. Il regarde comment les gardes de Delgado assurent un périmètre dans une voie non fréquentée, comment un chien sauvage erre dans la rue. Il lève la tête pour regarder un hélicoptère de surveillance passer dans le ciel. Il baisse la tête lorsqu'il y a une vue de dessus d'un quartier. Il lève à nouveau la tête pour regarder les hauts gratte-ciels qui dominent les êtres humains, les rendant minuscules et insignifiants. Il peut vraiment se projeter aux cotés de Matty Roth et des autres personnages dans cet environnement à nulle autre pareil.
Avec cette histoire, Brian Wood augmente la composante espionnage et mission secrète de son récit, sans que cela ne nuise à sa dimension politique. Les dessins sont toujours aussi immersifs et directs. L'intrigue réserve de nombreuses surprises, avec plus d'effets en provenance de l'industrie du divertissement, tels que des coups de théâtres qui prennent la forme de révélations. Le résultat est haletant, sans rien perdre de son regard pénétrant sur la nature humaine, sur le pouvoir, le capitalisme, la souffrance des êtres humains en temps de guerre.
Épisode 41 : dessins et encrage de Nikki Cook. Zee Hernandez a réussi à franchir le point de contrôle et à sortir de la zone démilitarisée pour se rendre au nord. Elle s'installe dans un immeuble encore en bon état où elle a trouvé un appartement inoccupé. Elle déroule son tapis de sol et son sac de couchage. Elle installe son réchaud et se fait chauffer un café. Elle contemple les feux dans le lointain qui atteste de combats. Au petit matin, les habitants de l'appartement au-dessus du sien reviennent : un groupe de 4 soldats de l'armée des États Libres, dont Martel, une jeune femme grièvement blessée à la jambe droite. En entendant ses hurlements de souffrance, Zee finit par monter, entrer dans l'appartement et s'occuper de la blessure de Martel.
Zee a été déçue par l'attitude de Matty Roth, par les choix qu'il a faits : s'engager pour soutenir Parco Delgado, accepter les avantages qui vont avec le fait de côtoyer le pouvoir, comme de pouvoir voyager en limousine. Elle décide donc de changer d'air. Pour autant elle ne peut pas laisser mourir quelqu'un sans lui apporter de l'aide. Brian Wood force un peu la main de son scénario avec la coïncidence bien pratique des soldats en infiltration qui logent juste au-dessus de l'appartement choisi par Zee. L'artiste dessine dans un registre descriptif et réaliste, sans les exagérations de Donaldson. Elle rend bien compte de l'environnement urbain, en reproduisant des rues de New York. Ses personnages sont un peu moins convaincants : des visages trop jeunes, des silhouettes aux postures manquant de naturel. Cet épisode permet à Burchielli d'avoir assez de temps pour travailler sur les suivants, et au scénariste de se focaliser sur un personnage secondaire, mais aussi le premier rôle féminin. Il la confronte d'une autre manière à la réalité d'une zone en situation de guerre civile, ce qui l'amène à reconsidérer l'engagement de Matty Roth sous un autre angle. Le lecteur voit bien qu'il s'agit pour Wood de développer ce personnage pour le positionner là où il le souhaite, mais dans le même temps c'est aussi une progression organique et Zee est toujours aussi attachante.
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le 22 août 2020
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