Un décor superbe - l'Aubrac - et une atmosphère indéniable, qui doivent beaucoup au dessin de l'auteur, servent de cadre à l'intrigue basée sur un fait divers banal et sordide (exposé en ouverture). L'épigraphe en page de garde reconnaît sa dette envers 'La Peur' de Maupassant dont Christophe Bec propose ici une relecture libre. La Bête du Gévaudan, et 'Le Chien des Baskerville' de Conan Doyle, sont également convoqués et forment l'horizon élargi de ce récit qui indique peut-être d'emblée ses clés : le légendaire finalement dégradé en affaire sous le regard du naïf de passage.
Pourtant, les évidentes qualités graphiques des 'Tourbières noires' sont déployées en vain tant l'imaginaire est dégradé et la trame narrative compliquée d'accessoires embarrassants : sur les personnages féminins, véhicules d'un érotisme benêt, sont plaqués les fantasmes misogynes d'un fou... Grenouilles ou crapauds des tourbières chantent, mais si faiblement que la référence à cette autre nouvelle de Maupassant, 'Sur l'eau', semble accessoire et bien affadie, et lorsque ces batraciens introduisent enfin le fantastique, Christophe Bec est très loin des moyens subtils déployés par l'écrivain. Enfin, l'accumulation de clichés horrifiques, la multiplication des ressorts narratifs (personnages associés à des animaux, récit secondaire sous la forme d'un conte, confession finale), nuisent à la simplicité d'un projet où la peur et le fantastique s'épuisent et le lecteur se lasse. À cette lecture libre du conte de Maupassant manque finalement la tenue.
Quelqu'un chez Glénat a-t-til vraiment lu ce scénario de Christophe Bec ?