Lune l'envers
6.5
Lune l'envers

BD franco-belge de Blutch (2014)

Si les récompenses artistiques permettent de rendre hommage à des auteurs accomplis, elles peuvent être aussi déstabilisantes pour ces derniers. En effet, comment ne pas avoir peur de décevoir après s’être fait décerner la Palme d’Or ou le Grand Prix du festival d’Angoulême ? Du coup, à trop réfléchir sur leur démarche, ces artistes tout juste glorifiés peuvent se retrouver dans une impasse. Ce fut le cas de Zep avec « Une histoire d’homme » en 2013, œuvre moins profonde que nombriliste. Avec « Lune l’envers » paru en janvier 2014, Blutch serait-il atteint de la même malédiction ?


Scénario : Dans un univers résolument détraqué et surréaliste, la série de bande dessinée « Le Nouveau Nouveau Testament » est devenu un véritable phénomène de société. Seulement voilà, son auteur est en panne d’inspiration, en plus d’avoir quelques peines de cœur. Reste à lui trouver un digne successeur. Un scénario qui mélange pêle-mêle l'aliénation au travail, l'absurdité du quotidien, le doute existentiel, la vieillesse, le capitalisme artistique et autres joyeusetés...


Dessin : Un trait particulièrement soigné et élégant, aussi bien dans la gestuelle de ses personnages que dans ses décors fantasmagoriques et souvent inventés de toute pièce.


Pour : Une mise en couleur osant des teintes inattendues et qui permet une lisibilité optimale même dans les cases les plus chargées.


Contre : Des personnages tous superficiels, un univers grotesque qui s’apparente à « L’Ecume des jours » sans la moindre once d’émotion (le comble !) un vieillissement des personnages intentionnellement incohérent… Tout ceci n'a même pas de sens dans l’esprit de Blutch, qui confesse : "Mon opinion au sujet des personnages et de leurs actes est confuse". Autant dire que ça l'est d'autant plus dans celui du lecteur.


Pour conclure : A trop vouloir intellectualiser son propos, Blutch nous sert un récit qui manque cruellement d’intérêt, à moins de surinterpréter chacun de ses éléments. L’auteur semble donc vouloir adapter le concept élitiste et fumeux de certaines œuvres d’art contemporain à la bande dessinée. En matière d’abstraction et de surréalisme, n’est pas Frederik Peeters qui veut…

Marius_Jouanny
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le 25 mai 2015

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Marius Jouanny

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