Le 16 octobre 1793, Charles-Henri Sanson exécute Marie-Antoinette. Elle n'a pas encore 38 ans. Mariée l'année de ses 15 ans à Louis-Auguste de France, futur Louis XVI, elle aura passé la majorité de son existence loin de l’Autriche qui l’a vu naître. Son mariage est arrangé : il est là pour sceller la réconciliation entre la France et l’Autriche. Aussi les futurs époux se rencontrent-ils pour la première fois lorsque Maire-Antoinette arrive en France. Ce ne fut pas comme une apparition. Aux yeux de Louis-Auguste, son épouse est « maigrichonne » ; pour elle, son mari est grand comme « une asperge », elle a du mal à voir son visage et craint de se faire un torticolis…
Pas de temps à perdre pour autant : la jeune fille doit devenir femme et apprendre comment un membre de la famille royale se comporte et parle. Cette socialisation ne se fera pas sans heurts. Elle ne comprend pas le monde qui l’entoure. Tout est différent de ce à quoi elle était habituée en Autriche. Pour autant, Marie-Antoinette ne baisse pas les bras et saura bousculer le protocole, les règles et autres coutumes en vigueur. Cela n’ira pas sans quelques maladresses et paroles qui ne pourront que la rendre sympathique aux lecteurs.
Comme le titre de l’œuvre l’indique, nous ne voyons qu’une petite partie de la vie de la future Reine de France : son arrivée et ses débuts aux côtés de son époux. La construction de leur relation est le fil rouge de ce manga, le dauphin de France se révélant peu à peu être un partenaire privilégié pour ouvrir les yeux de la jeune dauphine sur le « tout Versailles ».
Si Marie-Antoinette - La jeunesse d'une reine se garde de critiquer la royauté et la noblesse, le manga contient malgré tout quelques éléments critiques entre le mépris affiché pour les gens du peuple (mépris que cristallise Madame du Barry), une vie à Versailles coupée de ce qui se passe ailleurs (c’est le règne de l’entre-soi, le peuple de France semble bien loin) et des finances royales en mauvais état mais qui ne semblent guère tracasser Louis XV (en ce temps-là les règles budgétaires et les agences de notation n’étaient pas).
Alors que Marie-Antoinette peut être croisée dans nombre de films, ouvrages, tableaux, bandes dessinées… Marie-Antoinette – La jeunesse d’une reine n’est pas une fiction de plus où le personnage apparaît, une banale biographie. D’abord parce qu’un soin tout particulier a été accordé aux fondements historiques du récit : le manga a été supervisé par le conservateur général du patrimoine des musées du Château de Versailles, Alexandre Maral ; les libertés prises sont évoquées en fin d’ouvrage, où figure aussi une bibliographie ainsi que plusieurs photographies et images de Versailles et de la famille royale.
Ensuite, parce qu’il s’agit d’une réalisation de Fuyumi Soryo, que l’on reconnaît à travers le trait des personnages, et l’importance accordée à l’architecture et aux tableaux que l’on peut apercevoir. Elle n’a rien perdu de ce qu’elle nous montre ailleurs avec César Borgia. Le récit et le dessin se mêlent pour nous offrir un vrai moment de plaisir lorsque nous parcourons les pages. Un ouvrage réussi dans le fond comme dans la forme à côté duquel il serait dommage de passer.
Version longue et illustrée de cet avis à retrouver par là.