Mi-rage, mi-dérision
A la toute fin de Mirages, succédant à l’histoire vindicative d’Agorn, aux aventures exotico-érotiques d’Yrris (1975), et à l’illustration du Necromicon de Lovecraft (1964), se trouve « 4 pages...
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le 3 janv. 2017
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A la toute fin de Mirages, succédant à l’histoire vindicative d’Agorn, aux aventures exotico-érotiques d’Yrris (1975), et à l’illustration du Necromicon de Lovecraft (1964), se trouve « 4 pages d’énergie pure » scénarisé par Gotlib (Fluide Glacial 1977). Ces quatre petites planches, en apparence banales, mais qui se révèlent pourtant le meilleur portrait de Druillet existant.
http://bdzoom.com/wp-content/uploads/2012/02/Fluide-Glacial-n%C2%B020-p.2.jpg
En effet, Gotlib représente Druillet vêtu d’une longue cape semblable à des ailes, un paratonnerre sur la tête et une cigarette en bouche. Pour le dessinateur de Fluide Glacial, Druillet c’est un magicien burlesque, un dessinateur inspiré et excentrique.
A la question « Sans ça, tu travailles à la plume ou au pinceau ? », Druillet répond : « A l’énergie pure ».
http://www.9emeart.fr/uploads/images_files/Druillet5.jpg
Cette phrase, est pour moi parfaitement symptomatique du style de Druillet. Son trait est avant tout un trait d’énergie, comme un éclair de violence qui vient libérer le dessin de la gangue qu’était la case. Le dessin n’est plus enfermé dans un petit bloc, il explose et s’empare de la planche, écrasant le texte comme le lecteur.
Les longs visages de ses personnages semblent eux-mêmes comme témoigner de cette énergie qui les traverse. Ils sont très souvent représentés dans des hurlements muets, comme s’ils tentaient de nous transmettre toute la violence de ce qui les habite.
http://www.bedetheque.com/media/Couvertures/Druillet_Yragael_01.jpg
Mais ce qu’a parfaitement saisi Gotlib, c’est surtout cette pointe d’humour acide qui traverse les œuvres de Druillet. Dans « 4 pages d’énergie pure », la colère du personnage hurlant trouve en fait son origine dans une diarrhée colossale. Le cri des personnages de Druillet ne témoigne donc pas d’un désir de libération, il est la libération elle-même, aussi triviale qu’elle soit. Et ce mince équilibre de rage et de dérision, Mirages l’incarne parfaitement; aussi bien empli d’aventures épiques et ultra-violentes (« Agorn va et tue »), que d’absurdes et de triviales (« Sables l’écho des savanes »).
Si Philippe Druillet ne jouit certes pas de la popularité de Moebiu, il demeure à mes yeux celui qui a initié un virage dans la bande dessinée française (des années 70/80), particulièrement de SF. C'est lui qui a poussé à la fondation de Métal Hurlant, lui qui a amorcé l'éclatement de la sacro-sainte case, lui encore qui a porté une esthétique à mi-chemin du psychédélique et de la science fiction. Le trait de Druillet est un big-bang, à la fois destructeur et créateur, une expansion quasi-cosmique et profondément libre.
http://yogvolo2.free.fr/forum/druillet01.jpg
Druillet n’est pas mort, vive Druillet !
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le 3 janv. 2017
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