Un futur inquiétant mais passionant!
Quel plaisir de découvrir qu’Urban nous propose un nouvel ouvrage signé des mains du maître Jack Kirby ! Après les deux volumes (passionnants) de Kamandi et avant l’arrivée en janvier du Quatrième Monde (tant attendu), nous avons le droit aujourd’hui à O.M.A.C. (One Man Army Corps) (beaucoup mieux que l’horrible Organisme Métamorphosé en Armée Condensée…).
Petit employé de bureau sans importance, Otto Ordinaire devient le champion de l’Agence Globale pour la Paix lorsqu’il est modifié en O.M.A.C. :
ORGANISME MÉTAMORPHOSÉ en ARMÉE CONDENSÉE, guerrier redoutable et dernier espoir d’un futur déshumanisé.
(Contient : OMAC by JACK KIRBY)
A l’instar de Kamandi, Jack Kirby nous offre avec O.M.A.C., une nouvelle plongée dans le futur. Et bien que toujours aussi pessimiste, l’auteur a toujours assurer que les mondes de Kamandi et celui d’Otto Ordinaire n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Les spécialistes n’en sont pas aussi sûrs, mais cela est un autre sujet.
Nous sommes donc dans un futur à la technologie a pris, quasiment, le dessus sur l’humain. Mais malgré toutes ces innovations, tout ce progrès technologique, le mal est toujours là et continue de ronger les hommes et la planète. Pour combattre le crime, le monde possède l’Agence Planétaire de la Paix (ou l’A.P.P.), où les hommes qui la composent sont tous masqués afin de ne pas dévoiler leurs origines et ainsi pouvoir représenter toutes les nations. Et la dernière trouvaille de l’A.P.P. pour combattre le crime, c’est l’Œil, un formidable satellite capable de transformer l’humain le plus médiocre, le plus insignifiant en véritable machine de guerre, en O.M.A.C. !
Le faible Otto Ordinaire se voit être choisi pour devenir O.M.A.C., grâce à l’Œil, il devient un être quasiment sans limite, grâce au soutien de l’œil depuis l’espace. Une force inouïe, une résistance hors du commun, une véritable armée (tanks inclus) en un seul homme. Mais malheureusement, la personnalité d’Otto est, elle, complètement mise en sommeil.
A travers huit épisodes, Jack Kirby nous fait découvrir un monde où la technologie est très avancée, où elle rend la vie tellement confortable, mais à chaque fois, Jack Kirby réussi à retourner cela pour montrer le danger que cette technologie représente. Véritable visionnaire, sorte de Léonard de Vinci des temps modernes, le génial scénariste s’amuse à imaginer un futur où les femmes se monteront en kit, où l’on pourra changer de corps lorsque l’on sera trop vieux, où les satellites pourront nous transformer en Superman. Mais comme pour tout, ces idées, ces inventions ne sont pas l’apanage des gens de bien, les criminels aussi y auront accès.
O.M.A.C. va donc affronter des criminels, de vrais méchants qui ne reculent devant rien pour accomplir leurs méfaits. Et Jack Kirby va, très souvent, faire le lien entre ces ennemis implacables et Hitler et ses nazis ! Et les références à ce mal absolu sont assez fréquentes et surtout non dissimulées. Et quand on connaît le passé de Kirby (fait qu’il soit juif, et qu’il est participé, en Europe, à la guerre contre le nazisme) cela à encore plus d’impact. Mais cela montre à quel point l’A.P.P. créée par Kirby s’apparente au bien absolu selon l’auteur, vu qu’elle s’oppose au mal. Etonnant, car au premier coup d’œil, l’A.P.P. fait plus penser à une force policière ultra intrusive et ayant un regard sur tout. (Qui a dit que cela fait penser à ce vers quoi on tend actuellement ?)
Mais cela est à l’image de toute la courte série de Kirby. Sa vision du futur est terriblement pessimiste. Chacune de ses idées, chacune de ses inventions est systématiquement retournée et l’on n’en retient que le côté néfaste. C’est tout aussi vrai pour O.M.A.C. ! Lors du dernier chapitre, le pauvre Otto retrouve le contrôle de son corps et n’a aucun souvenir de ce qui lui est arrivé, n’étant devenu qu’une simple enveloppe pour O.M.A.C., et il n’y a qu’à voir l’Œil qui parle d’O.M.A.C. comme étant une chose, une cible et non un homme. Et on est en droit de se demander si Kirby avait vraiment tort dans sa vision futuriste de notre monde. Certes nous ne sommes pas au point que le scénariste craignait, mais force est de constater que notre monde est devenu, grâce à la technologie, un véritable refuge d’assistés, où la technologie est devenue l’attrait principal d’une grande majorité. Il suffit d’aller dans un restaurant et de voir le nombre de personnes sans vie sociale, cloîtrées sur leur smartphone…
Si le scénario de Kirby est passionnant, bien que souvent loufoque, ses dessins le sont tout autant. Dans son style si caractéristique, tout en explosivité, en agressivité. Le style ne plaît pas à tous, malheureusement, mais plus on lit du Kirby et plus on tombe forcément amoureux de ses dessins ! Si ses personnages peuvent sembler agressifs, ils n’en demeurent pas moins riches en détails eu au niveau du design. Et que dire de ses décors, de ses explosions, de sa mise en page, le tout nous explosant au visage lors de ses doubles-pages inaugurales (comme dans Kamandi). On est d’autant plus ébahit lorsqu’on arrive à réaliser que ces dessins si vivants ont plus de quarante ans !
Bref, une nouvelle fois Kirby fait mouche ! A l’instar de Kamandi, le scénariste nous fait part des ses craintes pour le futur à travers son imagination ne connaissant aucune limite. Et si tout s’enchaîne à un rythme endiablé, si la fin nous laisse un goût amer dans la bouche de par la fin brutale de la série, si comme souvent le scénariste se permet quelques raccourcis un brin facile, O.M.A.C. est un véritable bijou à lire.
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