Métier de famille
Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il contient les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2014/2015, écrits par Steve Niles, dessinés, encrés et mis en couleurs par Damien...
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le 14 mars 2020
Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il contient les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2014/2015, écrits par Steve Niles, dessinés, encrés et mis en couleurs par Damien Worm, avec l'aide de Alyzia Zherno pour les couleurs de l'épisode 6, et avec un lettrage réalisé par Robbi Robbins & Shawn Lee.
À Gristelwood, une petite ville des États-Unis, Geoff Allan vient de sortir de l'herboristerie. Il voit sa mère monter dans une belle voiture de sport en compagnie d'un bel homme. Alors qu'il essaye en vain d'attirer son attention, il se fait héler par Phil, un camarade de classe qui commence à se montrer agressif envers lui en sous-entendant que ce type d'achat le classe d'office parmi les homosexuels, ce qui pour Phil constitue une insulte. Loin d'être intimidé, Geoff Allan le remet à sa place en sous-entendant qu'il sait très bien ce qui s'est passé lors de l'accident de voiture dans lequel Phil a été impliqué et qu'il a menti dans sa déposition. Pendant ce temps-là, le professeur Frederick Allan (le père de Geoff) termine son cours d'introduction sur les créatures surnaturelles en indiquant qu'elles sont tout autant d'actualité maintenant, qu'elles purent l'être dans la littérature passée. En sortant, il constate qu'il est attendu dans le couloir par Lucas, son ancien associé. Ce dernier lui propose d'aller prendre un verre, tout en lui demandant pourquoi il n'a pas profité des sommes gagnées lors de l'enquête sur la famille Harlow pour prendre sa retraite. Allan fait remarquer à Lucas que lui non plus n'a pas pris sa retraite.
Après avoir évoqué le bon vieux temps, Lucas lâche le morceau à Frederick Allan : il est également venu le voir parce qu'il a vu sa femme Deloris Allan prendre un verre en terrasse avec Merle Cope, et que celui-ci lui a subrepticement remis une clé dans sa main. Frederick Allan estime qu'une affaire extraconjugale aurait été moins alarmante. Ils se quittent en se serrant la main. De son côté, Vivian Allan est revenu à pied à la demeure familiale. Elle salue Saunders, la gouvernante, en entrant. Elle monte voir Son frère Geoff dans sa chambre. Il est tout excité en lui montrant un pentagramme tracé sur le sol. Il lui déclare avoir réussi : conjurer et faire apparaître un revenant. Vivian demande à en avoir la preuve ; son frère lui indique le placard de sa chambre. Elle l'ouvre et effectivement, il y a une revenante à l'intérieur. Ils estiment que cette réussite va leur permettre de convaincre leur père qu'ils sont prêts pour reprendre l'affaire familiale, lui succéder en tant que chasseurs de monstres.
En créant 30 days of Night avec Ben Templesmith en 2002, Steve Niles a entamé une prolifique carrière de scénariste de comics, spécialisé dans l'horreur. Il a par exemple créé un détective privé travaillant avec un goule dans Criminal Macabre également avec Ben Templesmith à qui a succédé Christopher Mitten. Il a également collaboré avec Bernie Wrightson pour Dead she said, The ghoul, Doc Macabre, regroupées dans The Monstrous Collection of Steve Niles and Bernie Wrightson. Il l'a aidé à réaliser Frankenstein Alive, Alive. S'il a déjà lu certaines de ces séries ou d'autres histoires écrites par Steve Niles, le lecteur sait à quoi s'attendre : une histoire directe et linéaire, racontée avec simplicité. Il est donc un peu surpris de voir que le scénariste prend son temps pour installer ses personnages, n'allant pas aussi directement au but qu'à son habitude. Il fait apparaître les 4 membres de la famille les uns après les autres, en évoquant le passé du père et de la mère par allusions légères. Frederick Allan est défini par une forme de nostalgie pour son passé, mais aussi un refus assumé de reprendre ses activités. Sa femme est définie par la suite avec un seul trait de caractère. Ses enfants ne bénéficient pas de beaucoup plus de caractéristiques. Le lecteur reconnaît bien là ce scénariste qui ne s'embarrasse pas de détails. Finalement, c'est Dante, leur premier ennemi dont l'histoire personnelle est la plus étoffée.
Steve Niles se focalise donc sur l'intrigue. Contrairement à son habitude, il sa narration est un peu moins linéaire, puisqu'il met en scène 5 personnages principaux, et un personnage secondaire important. La découverte de la situation se fait donc par les propos de ces différents personnages, et pas uniquement par un seul. En plus, il laisse planer un mystère quant à la motivation de Dante, son réel objectif, et la responsabilité que porte Frederick Allan dans son comportement. Au vu du court texte de quatrième de couverture et du premier épisode, le lecteur se dit qu'il va découvrir une histoire basée sur la chasse aux monstres, avec une fibre successorale pour les enfants souhaitant marcher dans les traces de papa. Il y a bien une demi-douzaine de monstres, mais il n'est pas vraiment question de les pourchasser, et la transmission des parents vers les enfants ne s'effectue pas comme annoncé. Le scénariste procède plutôt par petites touches en se faisant rencontrer les différents personnages progressivement, avec quelques informations à chaque fois, mais en nombre assez restreint. Cette manière de procéder laisse donc plus de latitude à l'artiste pour raconter l'histoire.
En découvrant la couverture et les premières pages, le lecteur se dit que Steve Niles a choisi Damien Worm pour la similitude de ses pages avec celles de Ben Templesmith. Il retrouve la même manière de dessiner des formes simplistes, parfois enfantines, le même intérêt limité pour les décors, et la même façon de construire des camaïeux à la texture un peu particulière pour remplir les fonds de case, ou plutôt pensés à l'échelle de la page pour immerger les cases dans une ambiance similaire. En y regardant de plus près, le lecteur observe des différences avec Templesmith. Pour commencer, la mise en couleurs n'est pas aussi sophistiquée. Les camaïeux sont plus uniformes avec moins de couches, et le plus souvent avec une approche plus naturaliste, en tout cas plus calquée sur les formes détourées, que pensée comme une couche venant se superposer aux dessins, sans s'astreindre à colorier dans les lignes. La narration visuelle s'en trouve moins expressionniste, et plus descriptive, tout en conservant cette sensation intense d'immersion dans une ambiance. De manière étrange, l'artiste peut changer de mode d'application des couleurs le temps d'une séquence ou d'une autre, sans raison narrative discernable. Il bascule d'un mode de représentation avec une apparence de photographie fortement altérée, à des dessins plus classiques avec des forme détourées à l'encre et des couleurs plus sages, plutôt que des textures.
Dans le même ordre d'idées, les personnages ne donnent pas l'impression d'avoir été rapidement gribouillés par un enfant de 5 ans (le tour de force de Ben Templesmith étant de donner vie à de telles représentations de personnages). Damien Worm représente ses personnages, avec des traits de contours assez frustes, sans lissage, sans réalisme, les noyant souvent dans les couleurs, sans que le lecteur puisse les détailler précisément. Toutefois, ils disposent tous de caractéristiques visuelles spécifiques, que ce soit leur coiffure, la forme de leur visage, leur tenue vestimentaire. Le lecteur peut donc facilement les identifier, même quand une sorte de filtre semble les recouvrir, rendant les détails un peu flous. Ce mode de représentation donne beaucoup de libertés à l'artiste : exagérer un peu les expressions de visage pour mieux faire ressortir une émotion ou un état d'esprit, leur attribuer des postures rigides pour marquer un comportement social codifié, ou au contraire leur donner des postures de pantins désarticulés pour rendre compte de leurs gestes brusques pendant les scènes d'action. Cela lui permet aussi d'intégrer des déformations monstrueuses sans solution de continuité avec des personnages normaux. Le lecteur se rend compte qu'il se laisse emporter par ces individus habitant un monde imbibé de surnaturel.
Toujours comme Ben Templesmith, Damien Worm ne manifeste qu'un intérêt poli pour les décors, et il ne se sent pas tenu de représenter. Il peut très bien se contenter des camaïeux en fond de case, voire en fond de page pour tout arrière-plan pendant une discussion. Le lecteur n'en est donc que plus surpris quand l'artiste investit du temps à représenter un environnement. En fait, Worm s'y intéresse dans le premier épisode, que ce soit une vue en pied de l'impressionnante demeure de la famille Allan, ou un étrange pendule en forme de lame qui rappelle une nouvelle d'Edgar Allan Poe. Ce n'est qu'à partir de l'épisode 2 qu'il passe moins de temps sur les décors. Mais les camaïeux installent une ambiance si forte que le lecteur en vient à ne pas remarquer l'absence des décors. Avec quelques éléments simples, Worm sait indiquer où se situe l'action, situer les personnages les uns par rapport aux autres, donner des indications sur le volume et la géométrie des lieux. Par ailleurs, de temps à autre, le lecteur découvre un décor plus fouillé aux caractéristiques inattendues comme la salle à manger des Allan, un jardin où se déroule une fête d'anniversaire pour des enfants, le salon des Allan, une pièce souterraine dévolue aux soins médicaux artisanaux. La narration visuelle de Damien Worm fonctionne donc bien, et le lecteur sourit régulièrement devant une exagération qui capture bien l'esprit second degré des scénarios.
Damien Worm n'est donc pas Ben Templesmith, mais ses dessins possèdent leur charme propre, différent, même si l'approche visuelle est moins sophistiquée, moins sarcastique et moins cruelle que celle de Templesmith. Le lecteur se laisse donc emporter par cette histoire de famille spécialisée dans le surnaturel, avec un père qui souhaite se retirer des affaires, et des enfants qui font tout pour qu'il leur transmette son savoir. Le récit est alors moins horrifique et moins sarcastique que prévu, recelant une chaleur humaine inattendue. L'intrigue de ce premier tome est moins linéaire que les histoires habituelles de Steve Niles, avec des surprises, des enjeux qui se développent progressivement, un récit focalisé sur la présentation du lien familial un peu élargi, avec une différence d'aspiration entre les 2 générations. À l'issue du tome, le lecteur se dit qu'il reviendra bien volontiers pour le tome 2 afin d'en découvrir plus sur Opal et les revenants, et pour se replonger dans cette narration visuelle décalée. 4 étoiles du fait d'une impression de prologue.
Créée
le 14 mars 2020
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