Un Pinocchio pour adultes.
Déjà que le conte de Carlo Collodi a un petit côté glauque, Winshluss nous propose une relecture trash des péripéties du célèbre pantin. Ici il n'est plus de bois, il est un robot façonné en machine à tuer par Gepetto. Sa conscience n'est plus un criquet mais un cafard.
Dénué de conscience, puisque Jiminy est un écrivain raté, fainéant et pâtissant d'une crise existentielle, Pinocchio subit et se laisse porter par les événements. Dans ce récit majoritairement sans paroles, il est effacé, sans émotions et rarement acteur de ses aventures. C'est les personnages secondaires, à foison, qui ont le premier rôle.
Plus de forme que de fond…
On a un bel ouvrage qui rappelle le format des anciens livres de conte, une couverture qui en jette et 187 pages au beau papier légèrement cartonné. J'ai apprécié la variété des dessins. Plus ou moins imposants, styles et ton de couleurs différents selon les scènes, ils sont tous accrocheurs, même si quelques uns sont un peu démonstratifs. Un scénario à tiroir vraiment bien construit, des personnages qui se croisent judicieusement et le découpage donne un rythme de lecture maîtrisé.
Mais ce qui m'empêche de pousser la note à 8 est le récit. Pour illustrer la noirceur de cette version de Pinocchio, des thèmes faciles sont utilisés: de la drogue, de la violence, du cul, dictature et fanatisme religieux… comme j'ai pu le lire dans une critique précédente, du déjà-vu. On a parfois l'impression que c'est trash pour être trash. Toutefois, des pics lancés à notre société contemporaine visent juste.
Dans l'ensemble, j'ai trouvé la bande dessinée réussie. On sent prend plein les yeux, ou plutôt plein la tronche. On ne peut pas rester insensible à la qualité du graphisme et à la construction du récit. Le seul bémol est donc peut être la superficialité du propos.
Je ne regarderai plus le nez de Pinocchio de la même manière… Enfance ruinée.