Les funérailles de l'homme libre
Ce tome fait suite à EAST OF WEST - Tome 5 (épisodes 20 à 24) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé par le premier tome car il s'agit d'une histoire continue en dix tomes. Celui-ci...
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le 24 avr. 2022
Ce tome fait suite à EAST OF WEST - Tome 5 (épisodes 20 à 24) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé par le premier tome car il s'agit d'une histoire continue en dix tomes. Celui-ci regroupe les épisodes 25 à 29, initialement parus en 2016, écrits par Jonathan Hickman, dessinés et encrés par Nick Dragotta, avec une mise en couleurs assurée par Frank Martin.
Dans la ville-machine de la Nation sans Fin, Narsimah est en train de faire un cauchemar : l'esprit Nihnooteiht lui est apparu et le convoque car le temps est venu de payer. Le chef se réveille, enfourche sa moto volante et se précipite dans les territoires morts. Il trouve l'esprit et se retrouve par terre, mis à bas de sa moto. Il menace l'esprit avec un pistolet, lui rappelant qu'il y a des lois du peuple qui doivent être respectées. L'esprit tend le bras pour indiquer une direction : le chef se retourne et découvre que son neveu Sotuknang se tient devant lui. Celui-ci lui indique qu'il s'appelle dorénavant Wolf et que cette nuit il chasse les chefs. À la ville de Junction dans le désert, Mort entre dans le bar L'Atlas, et il salue Hunter le barman qui en laisse choir par terre le verre qu'il tenait dans les mains. Mort commande trois shots de Bleu. Hunter le sert et son client commence à les descendre d'une traite. Mort explique que le barman n'est pas quitte. Il lui fait la remarque que son bar a l'air d'aller mieux depuis la dernière fois. L'autre lui répond qu'il a été fermé à la suite de son passage précédent, qu'il a dû payer la remise en état de sa poche ce qui a quasiment vidé son compte en banque. Mort note qu'il y a pourtant des clients. Hunter lui répond que ce sont des mercenaires qu'il a payés pour le tuer.
Une dizaine de personnes se jettent sur Mort avec des couteaux et il s'en suit un terrible carnage. Le barman écarquille grand son œil et il prend le fusil qui se trouve sous le comptoir. Il monte dessus avec la ferme intention de tirer sur son client. Son beau costume blanc maculé de sang, Mort s'adresse à Hunter pour lui faire remarquer qu'un homme intelligent saurait quelle attitude adopter, la dizaine d'agresseurs étant à l'état de cadavre derrière lui. Hunter baisse la tête et laisse tomber son fusil. Mort lui explique qu'il est venu parce qu'il a besoin de ses services : il a besoin qu'il lui trouve quelqu'un. Hunter lui demande si alors ils seront quittes : la réponse est non. Dans la mer des os, Nihnooteiht est assis en tailleur et des corbeaux viennent à lui en nuée. Wolf fait remarquer à Narsimah qu'il lui faut rejeter les fausses voies et se conformer à ce qui s'impose à tous. Il ajoute qu'il souhaite accompagner le chef dans les prochaines étapes. Celui-ci se demande s'il n'est pas dérangé par le fait que l'esprit habite le corps de son père. Wolf répond qu'il était là quand ça s'est produit. Il explique pour quelle raison il est venu : il a reçu un message du prophète Ezra Orion, l'homme qui est devenu le Message. Il lui disait où retrouver son oncle, et qu'il lui fallait le convaincre car la chance de succès serait plus grande avec l'aide de Narsimah.
Le lecteur a pris le pli : il sait que le scénariste va passer d'un personnage à l'autre et qu'à certains passages plusieurs des principaux personnages se croiseront. Il a également bien assimilé que les actions de chaque faction concourent à rendre la guerre plus inéluctable. Au fil des épisodes, il retrouve donc Narsimah, le chef de la Nation sans Fin pas encore convaincu de l'engagement à prendre pour son peuple, Mort qui fait tout pour honorer la promesse qu'il a faite à sa femme, Andrew Archibald Chamberlain qui éduque progressivement Constance son agent spécial, le prophète Ezra Orion qui est parvenu à réunir les élus, les quatre chasseurs One-Eyed Wyatt, Ursula Mock, Billy Blackgun, Psaume 137 qui sont à la poursuite de Babylone & Ballon. Même si du temps a passé entre la lecture de deux tomes, le lecteur se remémore immédiatement qui est qui, quelle est son histoire personnelle, et quel est l'enjeu pour lui. Cette facilité de se souvenir provient pour partie de l'apparence unique de chaque personnage, sa tenue vestimentaire, sa façon de se tenir et de se comporter. L'artiste sait concevoir des apparences très marquantes qui ne reposent pas uniquement sur un détail. Même si Chamberlain et Salomon disposent chacun d'une belle moustache, il n'est pas possible de les confondre. Dans ce tome, le lecteur fait la connaissance de plusieurs nouveaux personnages, à nouveau chacun avec une apparence particulière. Il n'est pas près d'oublier le cyborg Psaume 137, et pas seulement pour son trouble dissociatif de la personnalité, mais aussi pour sa silhouette unique.
Arrivé à ce sixième tome, les fils narratifs sont déjà bien intriqués et s'appuient sur de nombreux événements. Pour autant, le lecteur n'éprouve pas la sensation d'être perdu. Il a gardé dans son esprit les deux fils principaux : les nations se préparent à la guerre, certaines par choix, d'autres par nécessité, et quelque part Babylon, le fils de Mort, est sorti de la prison où il était et il est lâché sur le monde. Le scénariste fait avancer ces deux intrigues de manière significative, contentant ainsi le lecteur qui apprécie le rythme. L'alternance de personnages entre les chapitres assure également une diversité qui fait que le lecteur n'a pas le temps de trouver une séquence trop longue et qu'il est content de retrouver un personnage qu'il n'a pas vu depuis plusieurs épisodes. Enfin le nombre de fils narratifs reste raisonnable : le lecteur n'est pas obligé de prendre des notes pour se souvenir de tout, le divertissement reste prépondérant. Comme dans les tomes précédents, il est régulièrement surpris par un rebondissement auquel il ne s'attendait pas, et par un visuel mémorable : Narsimah chevauchant sa moto à toute allure, Mort expédiant ses ennemis ad patres, l'œil animé d'une autonomie propre, la procession de fidèles en pèlerinage, Psaume 137 en train de réfléchir, ou encore Babylone à dos de phacochère. C'est tout l'art du dessinateur que de savoir faire exister ces moments et ces actions dans un univers visuellement cohérent.
Comme dans les tomes précédents, le surnaturel et le fantastique jouent un grand rôle dans l'histoire : la prédiction appelée Message, le prophète Ezra Orion et la créature Buer, l'existence des quatre cavaliers de l'Apocalypse, l'esprit Nihnooteiht. À nouveau, le lecteur a le choix de les prendre au premier degré et de les voir comme des personnages aux capacités extraordinaires, et aux motivations propres. Il peut aussi les considérer comme des allégories, par exemple de la puissance de la foi pour Orion, de la force des rites ancestraux pour l'esprit amérindien, ou encore du pouvoir du conte ou du mythe pour Psaume 137. En fait, ce dernier est l'incarnation même de ce principe : un individu qui a accepté de se laisser charcuter et transformer en robot, convaincu par un argumentaire faisant appel à la religion. D'une certaine manière, cette dimension fantastique vient compléter, voire renforcer le caractère irrationnel des nations et de leur meneur à vouloir la guerre, en dépit de la certitude absolu du prix à payer, même s'ils en sortent victorieux. Le texte prophétique du Message devient alors le destin, c’est-à-dire l'expression des invariants de la nature humaine, à commencer par ce goût de la confrontation.
Pour autant, cette histoire ne se lit pas comme un traité de métaphysique. Elle se lit au premier degré comme une histoire de science-fiction post apocalyptique avec des sociétés qui se sont reconstruites, des technologies d'anticipation extraordinaires, des armes inédites et une touche de transhumanisme pour la Nation sans Fin. Conformément aux conventions des comics américains, il y a une scène d'action par épisodes, à chaque fois très spectaculaire, avec une violence qui fait frémir. Dragotta sait très bien mettre en scène cette violence : dans un dessin en pleine page sur fond rouge éclatant avec une énorme onomatopée pour le bruit du coup de feu, de manière plus encombrée avec un peu de recul pour montrer un groupe se ruer sur une victime, parfois en ombre chinoise quand un chasseur est éventré par les défenses du phacochère, ou même parfois hors cadre avec seulement les cadavres à la fin de la séquence. Dans le même temps, Hickman a conservé la structure très particulière des épisodes avec une scène introductive commençant par une page blanche avec une citation d'un dialogue, puis une autre page blanche avec une autre citation extraite d'un dialogue pour la partie principale de l'épisode. Le lecteur considère alors ces citations et constate qu'elles peuvent s'apparenter à des considérations philosophiques, des remarques sarcastiques sur le comportement humain, ou une prise de recul sur ce qui va se dérouler. Ainsi le scénariste attire l'attention sur la manipulation d'une foule constituée de croyants, ce qui s'apparente à la génération spontanée de fidèles, le prix à payer pour les élus, l'inéluctabilité de la violence, la liberté toute relative de l'être humain, la nécessité de savoir reconnaître quand fuir lorsqu'on ne peut rien aux événements, le fait que le futur finit toujours par tuer les êtres humains puisqu'ils sont mortels.
Ce tome confirme l'excellence de cette série que ce soit pour la narration visuelle, ou pour l'intrigue. Le dessinateur a créé un futur mémorable, des personnages marquants. Il crée des prises de vue parlantes, racontant l'histoire de manière fluide. Le scénariste parvient à entremêler plusieurs fils narratifs sans jamais perdre son lecteur, tirant partie de la dynamique générée par l'alternance entre les personnages principaux d'un épisode à l'autre. Le lecteur a bien compris que le conflit généralisé aura lieu, et il est impatient de découvrir comment s'en tirera et se comportera chaque faction, chaque chef. Il est encore plus fasciné par les forces en place qui s'incarnent dans des personnages surnaturels comme Mort ou son fils.
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Créée
le 24 avr. 2022
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