Du Blain plein la vue. C'est pas nouveau, mais à chaque fois que j'en attaque un nouveau, ça me fait le même effet. Quel artiste !
Quai d'Orsay, c'est du haut niveau. niveau dialogues, niveau esthétique, niveau humour. Certes, on n'a pas affaire à une BD dont l'intrigue fait rêver comme celles qui traient de voyages dans l'espace ou de bonds dans le temps, car je veux bien l'admettre : la politique, c'est souvent rébarbatif ! Alors je peux tout à faire concevoir que plus d'un soit déjà refroidi par la perspective de s'enfiler 2 tomes de 100 pages chacun, avec pour sujet central la routine d'un cabinet ministériel !
Et pourtant.
Pourtant réussir à élaborer une histoire aussi prenante et drôle sur un sujet à priori aussi rébarbatif, il fallait le faire ! Taillard de Vorms, le ministre des affaires étrangères (qui est en fait une caricature de Villepin), insuffle une dynamique à l'oeuvre que même les autres personnages de l'histoire ont du mal à suivre. Son charisme réside dans le subtil équilibre établi entre ses qualités indéniables, son sens de la formule et son inépuisable réserve d'énergie, et ses défauts dont on ne peut que rigoler. Chose somme toute assez rare, il compile à lui tout seul les caractéristiques du héros et du anti héros. Par moment il pourrait même endosser le méchant, c'est dire s'il est polyvalent, le bonhomme.
Les autres personnages, ceux qui gravitent autour du ministre y compris le personnage central, n'ont pas autant de profondeur que Taillard de Vorms, reconnaissons-le. En même temps, je ne pense pas qu'il y ait la place pour deux individus pareils au sein d'une seule et même BD. Le lecteur saturerait. Il faut répartir harmonieusement les ingrédients dont on dispose. Et c'est ce que Blain et Lanzac ont si bien fait ici. Leur caricature du monde politique est tellement réussie qu'elle a carrément modifié l'image que j'en avais.
Si j'osais stabilosser mes bandes dessinées, il y aurait beaucoup de jaune dans celle-ci !