Le départ du duo Bendis/Maleev des histoires de Tête A Cornes n'a pas fait de bien à la série. Si la paire suivante s'en tirait avec les honneurs (Brubaker/Lark), les derniers arrivés (Diggle au scénar et Gianfelice aux dessins) ont massacré le gardien de Hell's Kitchen.
Il avait fallu une bonne vingtaine d'arcs pour faire toucher le fond à Matt Murdock, pour user jusqu'à la corde ses principaux de traits de caractère : un orgueil mal placé, une faiblesse mortelle pour les femmes et une tendance certaine à la dépression. Et il en a encaisse le pauvre Matt, à tel point qu'il avait presque fini en pleureuse prostrée et autodestructrice qui succombe - comme d'hab à ses démons - dans le grotesque "Shadowlands". Meurtri, lessivé, poussé à bout, Matt finissait par prendre la route et s'éloigner de tous ceux à qui il fait du mal, par fuir cette ombre qui l'envahit.
Ce qui frappe dans un premier temps, c'est de voir à quel point Diggle reproduit à l'identique les road stories de Wolverine. Pas très inspirées, ces histoires courtes ont longtemps pollué le mensuel attitré du mutant griffu en le présentant systématiquement seul (à pieds ou à moto), dans des bleds paumés du fin fond Consanguinityville, USA. Des vilains bandits qui terrorisent une ville, un innocent abandonné, le héros qui pour une fois veut fermer les yeux et tracer sa route et qui finalement se rend compte que la fuite ne résoudra rien...
Ensuite, cet a priori ultime 100% Daredevil (la série est appelée à trouver sa place dans le mensuel "Marvel Knights" prévu pour cette année) sonne un peu comme un désaveu des conséquences de Shadowland sur Daredevil. L'histoire en elle-même était grotesque, pas inspirée mais au moins essayait-elle dans ses dernières pages de relancer DD dans une routine différente de celles brillamment utilisées par Frank Miller, Ann Nocenti ou plus récemment Bendis. "Reborn" est un trait d'union, une respiration pour tenter d'oublier Shadowland et permettre le retour de Daredevil à NYC... Franchement pas indispensable.